L'attentat de Jakarta ravive les inquiétudes et les peurs du terrorisme dans cette région du Sud-Est asiatique déjà frappée l'an dernier. L'attentat de mardi à Jakarta, la veille de l'annonce du premier verdit, aujourd'hui, du procès de Bali - l'attentat, le 12 octobre 2002, le plus meurtrier depuis ceux anti-américaine de New York du 11 septembre 2001 - n'est guère fortuit et se veut une démonstration de force de la nébuleuse terroriste qui a frappé en plein coeur du quartier réputé le plus sécurisé de la capitale indonésienne. L'objectif en fait était double : frapper les Américains, physiquement et psychologiquement, (l'hôtel Marriott qui appartient à la chaîne hôtelière américaine du même nom est estimé comme étant le plus sûr de Jakarta), mettre en garde d'autre part le gouvernement indonésien. Une mise en garde plutôt macabre comme le laissait entendre un partisan de la Jamaâ Islamiyah, dont la presse rapporta hier les propos et selon lequel cette action contre l'hôtel Marriott devait «servir d'avertissement sanglant» à la présidente indonésienne Megawati Sukarnoputri, indiquant: «C'est un message pour elle et tous nos ennemis: s'ils exécutent l'un de nos frères musulmans, nous poursuivrons cette campagne en Indonésie et dans la région». De fait, cette déclaration prêtée à un «militant» de la Jamaâ islamiyah, est estimée comme une revendication en bonne et due forme de la part du groupe terroriste - affilié à Al-Qaîda - le plus actif de cette région du monde. Cet attentat qui occasionna la mort de 14 personnes et des blessures pour plus de 150 autres présente, selon les services de sécurité indonésiens, de troublantes similitudes avec l'attentat de Bali d'octobre 2002 (plus de 200 morts). Selon des sources proches de l'enquête, les composants de l'explosif utilisés dans l'attentat, contre l'hôtel Marriott à Jakarta sont identiques à ceux ayant servi contre le night-club de Bali. Ce que confirme la déclaration d'un enquêteur indonésien. «Pour ce qui est de la façon de procéder, des composants et autres, il y a des similarités», indique-t-il. Toutefois, en l'état actuel de l'enquête, l'officier refuse de dire s'il s'agissait d'un attentat à la voiture piégée ou d'un attentat suicide. Le fait, est que cet attentat remet en cause les décisions prises jusqu'ici par les autorités de Jakarta pour parer à de telles situations. La presse indonésienne d'hier n'avait pas de mots assez durs pour dénoncer «l'attitude laxiste» du gouvernement «à l'égard de la menace terroriste». L'attentat de Jakarta intervient de fait à la veille du verdict du procès du premier de la trentaine de personnes suspectes actuellement jugées dans le cadre du carnage de Bali. En dépit des nombreuses arrestations dans les rangs de la JI, au lendemain de l'attentat de Bali, cette organisation, liée à la nébuleuse Al-Qaîda d'Oussama Ben Laden, montre qu'elle demeure opérationnelle et peut frapper au coeur même de la citadelle indonésienne. Pour un expert de l'Institut of Defense and Stratégic Studies de Singapour, Rohan Gunaratna, «Le procès de Bali arrive à une phase critique. Les groupes islamistes sont furieux et c'est certainement leur manière d'exprimer leur colère». De fait, le suspect Amrozi, accusé d'avoir pris part à la préparation de l'attentat de Bali, risque probablement la peine de mort. La communauté internationale a été unanime à condamner l'attentat de mardi à Jakarta, à l'instar des Etats-Unis lesquels, dans une déclaration du porte-parole de la Maison-Blanche, Scott McClellan, condamnent «fermement cet attentat terroriste». M.McClellan indique que «l'attentat de Jakarta venait rappeler que nous sommes toujours en guerre contre le terrorisme», avant d'ajouter: «Même si le gouvernement américain fait des progrès pour démanteler le terrorisme». Sans doute, mais il n'en reste pas moins que le terrorisme vient de frapper à Jakarta dans un quartier résidentiel parmi les plus sécurisés de la capitale indonésienne. Comme quoi le terrorisme fait valoir qu'il dispose encore de ressources comme le montrent les actions terroristes commises ces derniers mois en Afrique, notamment au Maroc et en Tunisie.