Dans une circulaire adressée à certains de ses services, Mohamed Lamari commande des enquêtes minutieuses sur les organisations chargées de déstabiliser l'actuelle direction du FLN. L'initiative, à en croire des sources sûres, serait quasi officielle. Le chef d'état-major, Mohamed Lamari, aurait décidé de prendre le taureau par les cornes par rapport aux attaques commises contre le FLN et son actuelle direction nationale. Il aurait, à ce titre, adressé une circulaire aux services compétents dont il a la charge, le DRS croit-on savoir. Mohamed Lamari, visiblement outré par les constats faits sur le terrain et largement rapportés et commentés par la presse, demande à ses enquêteurs de «trouver l'identité des meneurs de ce mouvement ainsi que leurs obédiences politiques, c'est-à-dire chapelles et protecteurs au sommet de l'Etat». Nos sources croient savoir que cette enquête désigne implicitement du doigt le ministre de l'Intérieur, Yazid Zerhouni. Les rapports de ce derniers, nous dit-on, «n'ont jamais été au beau fixe avec l'institution militaire. Mais cette fois-ci, le torchon semble carrément en train de brûler entre eux». Lamari, dans le même document, exige «un rapport détaillé sur les mouvements des capitaux des associations engagées dans ces actions durant ces quelques derniers mois». La rumeur, à ce sujet, précise que «des sommes importantes auraient été transférées vers les comptes des associations estudiantines, caritatives, professionnelles et autres, afin de garantir et financer la tenue des réunions de prétendus militants et cadres du FLN déçus par Benflis et les résolutions du 8e congrès». Même s'il n'en fait pas directement reproche au ministre de l'Intérieur, le chef d'état-major le suggère dans sa circulaire puisqu'il compare «les agissements politiques de ces associations à ceux du FIS-dissous, soulignant (qu'il est) du ressort de l'institution que dirige Yazid Zerhouni de prévenir ce genre de graves dérapages n'augurant rien de bon et ouvrant la voie à beaucoup de dérives». Suivant les textes de lois en vigueur, il appartient au ministère de l'Intérieur d'empêcher les associations de dépenser leurs fonds pour des buts autres que ceux pour lesquels elles ont été créées, quitte à en prononcer le gel ou l'interdiction en cas d'absolue nécessité. Or, il est apparu aux yeux de tous que si Zerhouni n'a rien fait de tel, il s'est même permis le luxe d'encourager les agissements de ces associations, comme ont eu à le dénoncer maintes fois les représentants légitimes des instances dirigeantes du FLN. En effet, si Yazid Zerhouni a interdit formellement et publiquement la marche des militants et cadres fidèles à Benflis, il a ostensiblement fermé les yeux sur la rencontre de ce jeudi, en dépit du caractère illégal qui s'y rattache et qui la frappe de nullité, tel que rapporté dans notre édition d'avant-hier. Notre journal, dans une précédente édition, avait également évoqué la possibilité que l'Armée intervienne d'une façon ou d'une autre dans cette affaire de déni de droit, en train de remettre en cause les règles de démocratie et de bienséance, mais aussi tuer dans l'oeuf les pratiques démocratiques encore balbutiantes sous nos cieux. Le summum des actions visant à déstabiliser le FLN, on s'en souvient, est prévu après-demain, jeudi, puisque les adversaires de Benflis, sous le couvert d'une association estudiantine, et à grand renfort de paquets d'argent, comptent «ramener des milliers de manifestants dans le but de tenir un congrès parallèle à celui qui avait eu lieu au mois de mars dernier». Beaucoup d'observateurs, à la suite de la sortie de Mohamed Lamari, se demandent si l'institution «ne va pas interdire d'une manière ou d'une autre cette sorte de congrès parallèle, parfaitement illégal, que se propose d'organiser ce qu'il convient d'appeler le parti de l'administration». Des sources proches de l'institution militaire, qui indiquent au passage qu'il est du ressort de l'institution militaire d'enquêter sur des questions de ce genre, ajoutent que «la circulaire du général Mohamed Lamari est un message indirect à l'Administration afin qu'elle révise son comportement avant que les choses n'aillent trop loin et qu'il ne soit trop tard». L'on croit même savoir que l'état-major au grand complet doit se réunir la semaine prochaine autour de cette question afin de tenter de trouver les solutions idoines et légales afin que n'advienne l'irréparable. Même si le FLN a fait montre de grande sagesse et d'une rectitude morale sans égale en annulant sa marche en vue de prévenir tout dérapage sanglant, les militants et les cadres de ce parti ne désarment pas pour autant. Ahmed Boumahdi, coordinateur des chefs de kasma d'Alger, revient à la charge aujourd'hui à travers une conférence de presse durant laquelle il compte revenir sur la marche annulée d'Alger, le regroupement que doivent tenir ses détracteurs, mais aussi les multiples actions envisagées en vue de contrer ces derniers. Les choses sérieuses ne font que commencer alors que plusieurs semaines nous séparent encore de la rentrée sociale...