le déplacement du chef de l'Etat dans cette ville intervient dans un contexte politique brouillé. Avec comme cerise sur le gâteau, l'interdiction de parution de six titres de la presse indépendante, dont certains ont carrément boycotté la couverture. C'est donc deux mois après la visite de Benflis à Annaba que Bouteflika y fait escale, accompagné de six de ses ministres : Saïd Barkat (Agriculture), Mohamed Nadir Hamimid (Habitat), Harraoubia (Enseignement supérieur), Ouled Abbès (Solidarité natinale), Zerhouni (Intérieur) et Chakib Khelil (Energie). Autant de noms qui parfois incarnaient le noyau dur du mouvement de redressement du 8e congrès du FLN, dont Dahdouh Abderazak, fils de cette ville et fervent défenseur et non moindre bras droit de Benflis, secrétaire général du parti FLN. Vers 10h, le cour de la Révolution est fin prêt pour accueillir le chef de l'Etat. Il réserve un accueil tout en fanfare à l'hôte du jour. La veille déjà, un communiqué placardé aux quatre coins de la cité et signé par le mouvement de redressement, invitait la population «à réserver un accueil à la hauteur de ce qu'amène la visite présidentielle sur les plans économique et social». Au moment où la presse locale dont l'Est Républicain édité à Annaba, titrait «Annaba en vacances, accueille Bouteflika», ajoutant en exergue que «cette escale ne suscite pas l'enthousiasme des foules indifférentes». Non sans ajouter: «A l'occasion de cette visite, la mouhafadha du FLN est déjà étroitement surveillée par un cordon de sécurité qui ne fait pas dans l'apparence.» A croire que le gros du plein, dont a été faite la foule, a été ramené des wilayas limitrophes. Tandis qu'il est évident que les travailleurs de l'Ispat-Sider n'ont pas lésiné sur l'effectif délégué à l'accueil. L'un des animateurs, portant badge Ispat et mégaphone en main, scande des slogans pour soutenir un deuxième mandat de l'actuel Président. Parmi les badauds, l'on reconnaît des natifs d'El-Bouni, pourtant une commune d'obédience MRN, «finalement, revenue à Abdallah Djaballah sur décision de justice». Sous les confettis jetés du haut des balcons et encadrés par le maire de la ville, le wali et le chef de la 5e Région militaire ainsi que le chef de la coordination FLN, version redressement, Bouteflika arpente la grande avenue du cour, sous un impressionnant cordon sécuritaire, débordé par les élans de part et d'autre des rambardes qui longent l'avenue où des lettres sont parfois remises en main propre du Président. Ce dernier n'hésite pas à accorder de chaleureuses poignées de main et des accolades à ceux qui le sollicitent. Des banderoles sur lesquelles était écrit: «Le comité provisoire de la mouhafadha de Annaba, mouvement de redressement soutient Bouteflika pour un deuxième mandat», plantent le décor. A quelques mètres du théâtre régional Azzedine-Medjoubi, la mouhafadha, plutôt sobre en couleurs, affiche quand même les posters d'un Benflis triomphant. Des militants pro-Benflis qui, semble-t-il, bouillonnaient à l'intérieur, sont discrètement tenus en respect. Sans grand enthousiasme, ils ne dépassent pas le seuil de leurs quartiers. Plus loin, dans la foule et presque inaperçu, un jeune dresse une timide affichette sur laquelle est écrit au marqueur: «Liberté d'expression». Sans discontinuer, la zorna et les salves de baroud baignent les tympans. Mais à hauteur du grand carrefour central, attenant au cour des la Révolution, des militants pro-Benflis, apparemment exacerbés et que feint d'ignorer le Président, surgissent des rangs et tentent de gâcher l'ambiance festive. Ils sont vite maîtrisés. Sur sa lancée, le chef de l'Etat entame enfin le cycle des inaugurations.