Combien sont-ils les immeubles susceptibles de connaître le même sort que celui de la bâtisse qui s'est effondrée aux Halles? Désormais, passer du rouge à l'orange 4 est mortel ! Aux toutes premières expertises du CTC (Contrôle technique des constructions) l'on avançait le chiffre, déjà très important de 30.000 logements endommagés par le séisme du 21 mai dernier. Un chiffre qui était appelé alors à atteindre les 60.000 bâtisses. Cette estimation, que l'on qualifiait au début de «non encore officielle», englobe les logements sérieusement endommagés et ceux qui l'ont été partiellement. La wilaya d'Alger faisait déjà état de 40.303 habitations marquées en orange et de 6847 au rouge, sur un total de 82.583 logements expertisés. Un total qui aurait connu entre-temps une sensible hausse. Mais par-delà les dommages, c'est la question de la reconstruction et des travaux de réfection et de rénovation qui demeure préoccupante. Avec l'effondrement d'hier, c'est encore une fois la problématique d'un relogement à la hâte qui refait surface, bien que la wilaya d'Alger ait consenti à établir un budget spécial pour la reconstruction des sites dévastés par le séisme. «Une entreprise que l'on entend mener en fonction des moyens dont dispose la wilaya». Alors que les experts architectes demeurent sceptiques sur les délais de relogement des sinistrés, M.Abdelhamid Boudaoud du CNA (Collège national des experts architectes) s'est plus d'une fois montré sceptique par rapport au respect des délais concernant la réhabilitation des habitations endommagées par le séisme et le relogement des familles sinistrées. «Il est impossible de finaliser l'opération de relogement avant l'hiver. Les promesses des autorités publiques de recaser tous les sinistrés dans les délais n'engagent qu'elles. Nos responsables pensent en termes de quantité et non de qualité. Et cela est très grave», a-t-il confié. Tandis que l'un de ses collègues, dans les colonnes mêmes de notre journal, avait averti que «(...) il faut savoir que dans ce genre de situation, il ne faut jamais entamer les travaux avant de faire des études préalables de simulation. Tout doit se faire sur ordinateur. Il est vrai que c'est très compliqué mais ça ne coûte pas beaucoup d'argent. De plus, nous avons les logiciels nécessaires. Rien n'a été fait dans ce sens.» Encore une fois, avec la mort de cinq personnes hier, le tremblement de terre met à nu l'incurie des décideurs à tous les échelons. Encore des citoyens qui font l'expérience de la duplicité du discours. Alors que la réalité est toute autre. Alger manque cruellement d'une cité, au sens politique du terme. L'opération de reconstruction ne peut souffrir le règne de l'opacité et de l'impunité. Car l'institution qui, dans le cas d'hier, a autorisé la réfection puis le relogement de familles dans la bâtisse en question est tout simplement criminelle. Faut-il mettre en péril des vies humaines sous la pression quel qu'en soit le motif? Et face à la brutalité de l'argent? Plus que la catastrophe naturelle, l'homme ne cesse de faire des victimes. Il est temps de purifier la ville. Des lacunes ont été constatées sur les constructions effondrées à Boumerdès, pourquoi perpétuer le cycle meurtrier de l'erreur humaine, maintes fois relevée? Pourquoi bâcler encore une fois les études techniques qu'aucun centre digne de ce nom ne pourra jamais approuver? Finalement nombreuses sont les habitations dont le sort reste inconnu, à l'instar de la cité Sonatrach (Cosider) que ses locataires ont déserté au lendemain du cataclysme du 21 mai dernier. Dans cette cité, les bâtiments ont été marqués au vert 2 et deux autres orange 4. L'initiative revient aux services de l'APC tandis que le CTC n'y aurait pas encore fait les investigations nécessaires. La réfection de chaque appartement requiert l'engagement de 400.000 DA, somme offerte par l'Etat. Le chantier est donc immense et ne pas différencier les couleurs, est fatal.