Le parti d'Ahmed Taleb Ibrahimi a profité d'une conjoncture favorable pour interpeller de nouveau le pouvoir sur le déni de droit dont il est victime. Le mouvement Wafa est revenu à la charge. Joint hier par téléphone, son secrétaire général, Mohamed Saïd, a tenu à préciser que «la levée des scellés des locaux pris en otage par le pouvoir depuis 33 mois est surtout une victoire pour le propriétaire du local». Il n'empêche que cette décision, mise en application en l'absence des dirigeants du parti alors que la pose des scellée s'était faite en leur présence, dénote peut-être une «détente» dans les positions des décideurs vis-à-vis du mouvement Wafa publiquement et officiellement refusé par le ministre de l'Intérieur sans le moindre argument juridique valable. Une occasion rêvée, donc, pour le mouvement alors que très peu de mois nous séparent de la présidentielle, pour revenir à la charge par le biais d'un communiqué très long et très explicite sur cette question qualifiée «d'éminemment politique», «née de la peur du pouvoir d'affronter une opposition dont il ne serait pas le créateur ou qui émanerait de la volonté populaire». Le communiqué, avec une minutie qui a toujours caractérisé ce parti, rappelle avec quelle manière scrupuleuse les règles et les lois ont été respectées avec un grand luxe de détails. Dans une conférence de presse animée au siège du FFS, une fois le mouvement officiellement interdit et les scellés posés sur les locaux, son président avait invité les observateurs et la presse à consulter l'ensemble des documents liés à ce parti pour constater de visu que «les accusations lancées par Yazid Zerhouni sont toutes dénuées de tout fondement» ajoutant que «si Ahmed Taleb Ibrahimi était réellement coupable des accusations et anathèmes que lui avait lancés le ministre de l'Intérieur, l'on se demande comment ce dernier a pu travailler aussi longtemps sous les ordres d'un terroriste». Car, pour la petite histoire, Yazid Zerhouni a longtemps servi sous les ordres d'Ahmed Taleb Ibrahimi. Cette entrée en matière annonce, estiment de nombreux observateurs, que Ahmed Taleb Ibrahimi, donné favori en 1999 avant qu'il ne se retire en compagnie des six autres candidats laissant l'actuel président seul en lice, serait en train de se préparer à prendre sa revanche et à battre le rappel de ses troupes à travers ce communiqué qui ne laisse guère de place au doute. Cette supposition, aussi légitime que les ambitions politiques de cet homme dont le programme a été largement applaudi aux quatre coins du pays, se devine à travers le fait que le communiqué de Wafa a dépassé le simple cadre de son combat pour sa survie aux fins de s'intéresser aux grands dossiers qui font l'actualité en ce moment. Pour le mouvement, tous les grands dossiers actuels sont enchevêtrés en quelque sorte: «Le mouvement Wafa interpelle le pouvoir pour qu'il cesse de s'opposer à la volonté populaire et de tromper le peuple par l'orchestration de campagnes cycliques orientées et de batailles politiques provoquées; il considère que l'ouverture du champ politique et des médias publics, le respect des libertés publiques, la levée de l'état d'urgence et le règlement politique de la crise en Kabylie constituent autant de mesures préliminaires indispensables pour permettre aux forces politiques, ancrées dans la société, d'assumer leur rôle dans le rétablissement de la sécurité et de la stabilité, et la réalisation de la réconciliation nationale.» Cette dernière aspiration rejoint, dans ses grands traits, le programme du Président Bouteflika même si les moyens des uns et des autres semblent «sensiblement» diverger. Le mouvement Wafa, pour rappel, a officiellement condamné la suspension dont sont victimes des journaux privés algériens par le biais d'un communiqué transmis à toutes les rédactions. Dans son communiqué, en revanche, il précise que «le peuple algérien a perdu toute confiance dans ce régime obsolète, incapable de saisir le besoin légitime de la société au changement ou de s'adapter au niveau de son évolution». L'alternative, selon le mouvement Wafa, consiste à «restituer au peuple l'espoir dans l'édification d'un Etat fort et juste, fondé sur la justice sociale, le respect des libertés et des droits de l'Homme, l'encouragement des vertus du dialogue, la préservation des valeurs et des composantes de la personnalité nationales».