L'opposition civile et les rebelles armées syriens se sont engagés lors d'une rencontre en Turquie à coordonner leurs efforts contre le régime du président Bachar al-Assad, ont indiqué jeudi des responsables de l'opposition. Ce contact survenu lundi à Hatay, dans le sud de la Turquie, près de la frontière avec la Syrie, entre le Conseil national syrien (CNS), qui regroupe la majorité des courants de l'opposition en Syrie, et l'Armée syrienne libre (ASL), formée de soldats déserteurs syriens, intervient alors que le poids de l'ASL est de plus en plus important et marque une radicalisation du mouvement de contestation en Syrie. L'opposition, notamment le CNS, craint une dérive de la contestation en mouvement de lutte armée et souhaite le maintenir à une «révolution pacifique» malgré la férocité de la répression par le régime de Bachar al-Assad. «Ce n'est pas la toute première rencontre entre le CNS et l'ASL en Turquie, mais c'est la première pour parler de manière constructive», a déclaré la porte-parole du CNS, Bassma Kodmani, jointe par téléphone à Paris. «L'ASL cherchait depuis le début de sa formation à être en coordination avec le CNS», a ajouté Mme Kodmani. «Nous sommes tombés d'accord pour que le Conseil et l'armée soient en coordination», a déclaré pour sa part en Turquie Khalid Hodja, membre du comité des relations étrangères du CNS. CNS et ASL ont en outre convenu que «le devoir de l'Armée syrienne libre est de protéger le peuple et de ne pas attaquer» le régime syrien, a dit ce responsable. Il a évoqué parmi les tâches assignées à l'ASL «la protection des minorités et l'envoi de troupes dans les zones de conflit pour prévenir d'éventuels incidents entre les différentes factions». Riad Al-Assaad, un colonel de l'armée syrienne qui commande l'ASL depuis la Turquie, où il s'est réfugié, s'est entretenu avec six membres du CNS, dont Bourhan Ghalioun, son dirigeant et figure historique de l'opposition syrienne. L'officier syrien s'est engagé à respecter «le discours politique» du Conseil, selon M. Hodja. «Le Conseil a ainsi reconnu l'ASL comme une réalité et l'armée (ASL) a reconnu le CNS comme le représentant politique» de l'opposition syrienne, a souligné M. Hodja. «L'armée libre s'engage à rester sous l'autorité des civils et à ne rien faire sans l'accord du CNS», selon Mme Kodmani. «Il s'agit aussi de montrer que l'armée libre n'est pas confessionnelle. Il n'y a pas que des désertions d'officiers sunnites, des alaouites ont également rejoint les rangs de l'ASL», a-t-elle affirmé, chiffrant de 15.000 à 30.000 le nombre de militaires de l'ASL. Le CNS a également lancé un appel à la grève générale et à la «désobéissance civile». Il faut «que les Syriens cessent de travailler, de payer leurs factures. Le mouvement de désobéissance civile est lancé aujourd'hui, il faut qu'il s'étende mais ce sera une action progressive», a dit Mme Kodmani. La Turquie accueille environ 7.500 opposants syriens qui ont fui le conflit dans leur pays dans des camps de toile à Hatay. De source diplomatique turque, on a confirmé que cet entretien avait bien eu lieu dans l'un de ces camps. L'ASL a multiplié ces dernières semaines les attaques, ouvertement revendiquées, contre l'armée syrienne et les miliciens du régime. Le colonel Assaad a affirmé la semaine dernière depuis Hatay, que l'ASL comptait «au moins 20.000 hommes et (que) le nombre augmente chaque jour». La semaine dernier, le CNS avait exhorté les déserteurs à ne pas mener «d'actions offensives contre» l'armée régulière. Depuis le début des manifestations contre le régime en mars, la répression a fait au moins 4.000 morts selon l'ONU.