La semaine qui commence sera décisive pour les titres encore interdits d'impression. Paraître ou ne pas paraître? C'est cette angoissante question qui tarabuste actuellement les rédactions du restant des journaux encore sous le sceau de la mesure d'interdiction d'impression décidée, il y a près de deux semaines, par les imprimeries d'Etat à l'encontre de six quotidiens de la presse nationale privée. Les imprimeurs avaient exigé alors le paiement total et immédiat de toutes les créances qu'ils avaient vis-à-vis de ces quotidiens qui ont le plus fort tirage du pays. Après la stupéfaction et toute une série de consultations et de sollicitations indirectes envers les plus hautes instances du pays, les patrons de ces entreprises de presse se sont entendus sur une démarche de gestion de cette soudaine crise éditeurs-imprimeurs: que celui (le quotidien) qui peut satisfaire aux exigences financières des imprimeries le fasse! Cette stratégie a apparemment réussi. Mais seulement à moitié. Puisque seuls trois journaux (Liberté, El Khabar et Le Matin) qui avaient apparemment les ressources financières nécessaires ont pu payer et reparaître après quelques jours de disparition. Les trois autres (L'Expression, Le Soir d'Algérie et les publications du groupe de presse d'Er-Rai ) ont adopté la tactique du donnant-donnant impliquant de facto l'Anep à qui ils doivent, selon leurs responsables respectifs, des sommes considérables au titre des redevances de recettes publicitaires que cette agence de publicité n'a pas payées à ces journaux. Combinant harcèlement administratif et action en justice pour essayer de récupérer leur dû afin, arguent-ils, de réunir les montants exigés par les imprimeurs, ces journaux clament qu'ils sont dans l'impossibilité de répondre aux exigences des imprimeries si l'Anep ne s'exécute pas. Cette dernière aurait apparemment donné quelques engagements de principe pour renflouer, dans les plus brefs délais, les caisses de ces journaux, mais aucun des responsables des publications en affaire avec l'agence de publicité n'a de certitudes acquises quant à la mise en pratique de ces promesses de paiement. La genèse de la situation ainsi faite, on peut dire que pour le restant des journaux qui ne paraissent pas encore, ce n'est que le début du tunnel mais pas son bout. Autrement dit, tant que ces quotidiens ne sont pas dans les rotatives, la crise ne connaît pas encore de solution. Alors, à moins que les pouvoirs publics,- très gênés par ce conflit presse privée-imprimeurs publics, mêmes s'ils donnent d'eux l'image de n'être pas désarçonnés par cette affaire en cette année de pré-campagne électorale - n'interviennent pour calmer le jeu entre les deux protagonistes. Sinon, on est parti pour une rentrée sociale et politique qui sera empoisonnée par cette question très sensible des rapports entre le pouvoir politique et ses relais dans la société. Au vu des expériences passées similaires, aucune des deux parties ne pourrait souhaiter et encore moins accepter le pourrissement d'un tel aspect de la vie politique et sociale du pays. Particulièrement en cette conjoncture.