Le pouvoir russe a opposé hier une fin de non-recevoir aux revendications de l'opposition deux jours après des manifestations sans précédent, le porte-parole de Vladimir Poutine excluant que soient remis en cause les résultats des élections malgré les fraudes présumées. Les fraudes dénoncées par l'opposition et dont des témoignages ont inondé l'Internet russe depuis les législatives du 4 décembre, ne peuvent pas remettre en cause les résultats, a déclaré hier le porte-parole du Premier ministre, Dmitri Peskov. «Même si vous additionnez tous ces prétendus témoignages, cela concerne à peu près 0,5% du nombre total de bulletins», a déclaré M.Peskov. «Même si l'on admet de manière hypothétique qu'ils puissent être contestés en justice, cela ne peut en aucun cas remettre en question la légitimité du scrutin ou les résultats définitifs», a-t-il ajouté. L'opposition, qui a organisé samedi des manifestations d'une ampleur sans précédent dans le pays depuis l'arrivée au pouvoir de Vladimir Poutine en 2000, avec de 50.000 à 80.000 personnes à Moscou, exige l'invalidation du scrutin remporté avec plus de 49% des suffrages par le parti au pouvoir. La mission d'observateurs de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) avait déclaré à l'issue du scrutin avoir relevé «de sérieuses indications de bourrage des urnes». Le Procureur général Iouri Tchaïka a cependant estimé qu'il n'y avait «aucune base pour l'organisation de nouvelles élections ou un nouveau décompte des voix», dans des déclarations à l'agence Interfax. Vladimir Poutine, homme fort du pays, ne s'est jusqu'à présent pas exprimé après ces manifestations dont les slogans étaient très largement dirigés contre lui. Président jusqu'en 2008, puis Premier ministre faute de pouvoir enchaîner plus de deux mandats consécutifs, il avait annoncé avant les législatives qu'il comptait revenir au Kremlin lors de la présidentielle de mars prochain. Le président Dmitri Medvedev n'a fait lui non plus aucune déclaration officielle depuis samedi, ne s'exprimant que sur sa page Facebook dimanche. Il y a souligné n'être «pas d'accord» avec les revendications des manifestants, et a annoncé avoir ordonné de «vérifier» les résultats électoraux. Le Parti communiste russe, qui ne fait pas partie de la coalition de formations libérales, nationalistes ou d'extrême-gauche organisatrices des manifestations, mais qui dénonce lui aussi des fraudes, a déclaré ne pas croire à de réelles enquêtes. «Nous ne croyons pas aux paroles de Medvedev, c'est le n°1 du parti des escrocs et des voleurs (nom donné par l'opposition au parti Russie unie, ndlr)», a déclaré Sergueï Oboukhov, un responsable du PC. L'ONG de contrôle électoral Golos, qui a recensé des milliers de témoignages de fraudes, a elle aussi mis en doute les intentions du pouvoir. «Ces enquêtes, si elles sont confiées à la commission électorale dans sa configuration actuelle, sont vaines et ne donneront aucun résultat», a estimé sa présidente, Lilia Chibanova. La presse russe s'est fait hier largement l'écho des manifestations du week-end.