Les islamistes pour la confirmation du scrutin de novembre d'où ils sont sortis victorieux Les islamistes, grands vainqueurs de la première étape des législatives égyptiennes, abordaient hier en position de force une nouvelle phase de cette première élection depuis la chute du président Moubarak. Des files d'attente ont rapidement grossi dans la matinée devant les bureaux de vote de Guizeh, qui englobe une grande partie de l'ouest du Caire, pour atteindre parfois plusieurs centaines de personnes. D'importantes files ont également été constatées dans la grande ville portuaire de Suez, à l'entrée sud du canal du même nom. Les opérations de vote devaient durer jusqu'à 19h00 (17h00 GMT) et se poursuivre aujourd'hui dans un tiers des gouvernorats du pays, notamment ceux de Suez, Ismaïliya (nord-est), Assouan (sud) et Guizeh, soit 18,8 millions d'électeurs. Un second tour doit avoir lieu les 21 et 22 décembre dans ces régions. La formation des Frères musulmans, le Parti de la liberté et de la justice (PLJ), compte sur son avance lors du début du scrutin, organisé fin novembre dans d'autres régions, pour continuer de s'imposer. Le PLJ a fait campagne sur le mot d'ordre: «Continuons, pour un Parlement fort, qui réponde aux demandes, aux inquiétudes et aux priorités du peuple». Abdelhalim, un fonctionnaire, confie voter pour les Frères «parce que ce sont des gens d'expérience, et qu'ils sont modérés». Sayyed, 26 ans, un chef cuisinier qui vote dans un quartier proche des pyramides à Guizeh affirme en revanche qu'il est pour les fondamentalistes salafistes d'Al-Nour «parce que c'est le meilleur parti». Un électeur qui ne souhaite pas donner son nom tempête en revanche contre les déclarations des islamistes hostiles à l'alcool et aux plages mixtes dans ce pays très dépendant du tourisme. «Ils vont nous ruiner en interdisant d'aller à la plage!» s'exclame-t-il. La première phase du vote, qui avait concerné notamment Le Caire, Alexandrie (nord) ou Louxor (sud), avait été marquée par un raz-de-marée des formations islamistes, qui avaient remporté au total 65% des suffrages. Les Frères musulmans étaient arrivés en tête avec 36% des voix, les salafistes, plus radicaux, réalisant une percée surprise avec 24% des suffrages. Frères musulmans et salafistes sont toutefois fréquemment apparus en rivalité pour le vote islamiste, et une éventuelle alliance parlementaire entre eux n'est pas acquise. Les formations laïques libérales ainsi que les mouvements de jeunes issus de la révolte contre le régime Moubarak en début d'année se sont présentés morcelés et incapables de faire face à la déferlante islamiste. Le dernier tiers du pays votera en janvier pour élire ses députés, puis débutera jusqu'en mars l'élection de la Choura (chambre haute consultative). Cette élection dans un pays pionnier du «printemps arabe» fait suite à celles tenues en Tunisie et au Maroc, où les islamistes ont également remporté des succès. Le futur Parlement devra former une commission chargée de rédiger la nouvelle Constitution de l'Egypte, le pays le plus peuplé du monde arabe avec plus de 80 millions d'habitants. La perspective d'un Parlement contrôlé par les islamistes a provoqué l'inquiétude dans les milieux libéraux et la communauté copte (chrétiens d'Egypte), mais aussi au sein de l'armée, qui dirige le pays depuis le départ de M.Moubarak. Une polémique oppose également l'armée aux Frères musulmans sur les prérogatives du Parlement, notamment à propos de la rédaction de la Constitution et de la cohabitation avec un exécutif aux mains des militaires en attendant un président élu. Ce vote se déroule également dans un climat de grave crise économique, avec notamment une chute du tourisme et des investissements étrangers. Le Premier ministre récemment nommé par l'armée, Kamal el-Ganzouri, a estimé dimanche que la situation économique était «beaucoup plus grave que prévu».