La communauté internationale, en dépit d'une mise en garde unanime, semble dépourvue des moyens pour vraiment jouer son rôle et faire pression sur Israël. La communauté internationale, unanime, semble considérer que la décision d'Israël d'expulser le président palestinien, Yasser Arafat, est «une énorme erreur», sans pour autant prendre sur elle de condamner fermement ce nouvel oukase du cabinet Sharon. Ce dernier, depuis son arrivée à la tête du gouvernement israélien en mars 2001, a fait de la mise hors jeu du leader palestinien son objectif prioritaire allant jusqu'à rejeter, quelques semaines après sa prise de pouvoir, l'offre de paix arabe faite lors du sommet arabe de Beyrouth, le 29 mars 2001. Par défi ou provocation, Sharon a décidé en revanche d'assiéger le président palestinien dans le réduit de la Moukataâ à Ramallah. Faisant passer sa haine envers Abou Ammar avant même l'intérêt de l'Etat hébreu, Ariel Sharon, par ailleurs boucher des camps palestiniens de Sabra et Chatila, a quasiment fait obstacle à toutes les initiatives qui ont, ces dernières années, tenté de mettre sur pied des plans de paix à même de relancer un processus ayant toujours buté sur l'intransigeance des gouvernants israéliens qui ont ruiné toute possibilité de parvenir à un consensus entre les deux communautés juive et arabe. La décision d'expulser Yasser Arafat prise par le cabinet Sharon est surtout indicative du peu de cas que les Israéliens font, et ont toujours fait, de la communauté internationale et de ses réserves. Aussi, les mises en garde de la communauté internationale, y compris celle du Conseil de sécurité de l'ONU, ne semblent pas avoir d'effets sur les Israéliens comme l'a montré hier un responsable israélien lequel a déclaré, sous le couvert de l'anonymat, «Dès qu'il s'agit de défendre un terroriste comme Yasser Arafat, le monde se mobilise, mais lorsque des enfants, des se font tuer dans les rues d'Israël, le Conseil de sécurité de l'ONU se tait, c'est de l'hypocrisie» indiquant «Malgré ces critiques injustifiées, Israël ne modifiera pas la décision de principe prise jeudi par le cabinet de sécurité de se débarrasser de Yasser Arafat au moment opportun». Ce que le responsable israélien se garde d'évoquer, ce sont les innombrables massacres commis au grand jour par l'armée d'occupation israélienne dans les camps palestiniens de Jénine, (Tel-Aviv a même interdit à une commission d'enquête officielle du Conseil de sécurité de l'ONU d'enquêter sur ce crime contre l'humanité) de Raffah, Beit Hanoun, Naplouse, Al-Khalil, Ghaza, les assassinats de centaines d'enfants palestiniens par cette même armée à l'instar du jeune Mohamed Al-Douro, dont le monde entier a pu voir le martyr. Car, s'il y a une chose qui est condamnable aujourd'hui, c'est bien le terrorisme d'Etat israélien qui s'en prend à un peuple désarmé, à ses enfants, à ses , à ses vieillards et à une population réellement désarmée dont les seules armes restent le martyr et le sacrifice de ses fils. La guerre en Israël, et le cortège de mort qu'elle induit, est le fait d'abord d'Israël même qui en occupant un territoire, ne lui appartenant pas, à induit une résistance qu'elle qualifie trop facilement de terrorisme. Aussi, expulser Yasser Arafat n'a jamais été la solution, d'autant que le vrai obstacle à la paix dans la région est bien Ariel Sharon, lequel a toujours été obsédé par l'idée de cantonner les Palestiniens dans des ghettos. En réalité les Israéliens ne mesurent pas ou ne veulent pas mesurer, du moment qu'ils estiment eux seuls détiennent la vérité, les conséquences qu'induirait une expulsion de Yasser Arafat, ou plus grave, s'il est attenté à sa vie, comme l'en menace le ministre israélien de la Défense, Shaoul Mofaz. L'expulsion de Arafat, mettra alors un terme à tout ce qui a été réalisée ces dix dernières années pour parvenir à une solution équitable au contentieux israélo-palestinien. C'est l'avis partagé de nombreux analystes qui estiment que la mise à exécution d'une telle décision ramènerait la situation au niveau de ce qu'elle était à l'époque de la première Intifada. Pour Clivis Maksoud, ancien ambassadeur de la Ligue arabe auprès de l'ONU, «s'ils (les Israéliens) exilent ou tuent Arafat, non seulement ce serait le coup de grâce au processus de paix, mais une telle action mettrait aussi probablement fin aux efforts d'apaisement exercés dans les territoires palestiniens par les Etats arabes modérés comme l'Egypte et la Jordanie». Shibley Telhami, expert sur le Proche-Orient à la Brooking Institution, estime pour sa part, que «Arafat est le symbole historique de la résistance palestinienne et toute tentative de l'humilier aurait pour effet de mobiliser l'ensemble des Palestiniens, même ceux qui lui sont hostiles». L'ancien journaliste et écrivain français, Paul Balta, résume bien le sentiment général de la communauté internationale en affirmant: «La France, par la voix du président Jacques Chirac, a dit son opposition à une telle mesure contre un homme qui, aux yeux de son peuple, possède malgré les accusations de corruption, la force symbolique d'un Winston Churchill pour les Britanniques, ou d'un Charles de Gaule pour les Français». Reste la position ambiguë des Etats-Unis lesquels désapprouvent du bout des lèvres la décision inique d'Israël, d'expulser le leader palestinien, déclarant par la voix du porte-parole du département d'Etat, Richard Boucher, «nos vues sur M.Arafat n'ont pas changé. Nous pensons toujours qu'il fait partie du problème, pas de la solution» ajoutant, «mais dans le même temps, nous pensons qu'il ne serait pas utile de l'expulser, car cela ne ferait que lui donner une autre tribune pour s'exprimer». La position de Washington est d'autant plus équivoque que la réaction internationale à la menace d'expulsion de M.Arafat et surtout le soutien massif et unanime des Palestiniens à leur leader, replace a contrario le président palestinien au centre de toute solution future du contentieux proche-oriental. En réalité la décision de «principe» de faire expulser Yasser Arafat aura surtout montré aux Israéliens le poids du leader palestinien pour tout plan et processus de paix, qui veulent avoir des chances d'aboutir. En tant que démocratie, les Etats-Unis doivent bien, d'une manière ou d'une autre, en tirer les enseignements et rectifier le tir, pour pouvoir jouer pleinement leur rôle de parrain du processus de paix au Proche-Orient.