Cette seconde visite à Djelfa en l'espace de deux mois renseigne sur la volonté de rallier à sa cause les Ouled Naïl. Le 22 juillet 2004, le président de la République Abdelaziz Bouteflika, faisait une rentrée triomphale à Djelfa. Son «hammam de foule- avait été à la démesure du zèle du wali de faire venir, par la ruse et les miroitements, tous les pauvres citoyens de Sidi Ladjel, Charef, Hassi Bahbah, Aïn Lbel, etc. Aujourd'hui, c'est-à-dire soixante-quatorze jours plus tard, Bouteflika est encore à Djelfa. Le but de cette visite est simple et efficace à la fois: faire en sorte d'exaucer le souhait des chouyoukh de la zaouia Al Azharia, située sur la route de Charef, et qu'il a «omis» de visiter en juillet dernier. En fait, le président algérien, comme tout un chacun le sait, voue une royale vénération pour les soufis et les zaouias et ne souhaiterait jamais essuyer la colère de ces saints hommes. Cette visite spirituelle est aussi une opportunité politique pour le Président qui, à défaut de s'assurer le soutien des islamistes, tente de s'entourer de la grande communauté spirituelle des soufis de la Kadiriya, la Tidjaniya, la Azharia, etc. D'ailleurs, sont inscrites à l'ordre du jour de sa visite de cette semaine, une virée du côté de la zaouia Kadiriya et une autre à la zaouia d'El Hamel, lors de son périple à M'sila. La stratégie politico-spirituelle du président de la République a été manifeste bien avant son investiture, en avril 1999. Lors de ses pérégrinations, qui l'ont amené dans toutes les régions du pays, alors qu'il était encore en pleine campagne février - mars 1999 - Le candidat Bouteflika n'a jamais raté une occasion de montrer son extrême humilité aux cheikhs de zaouias et son attachement à l'aspect religieux que véhiculent ces institutions islamiques traditionnelles. Seulement voilà, le spirituel et le politique ne font pas bon ménage et les stratégies des hommes ne concordent pas obligatoirement avec celle de Dieu. Alors que Bouteflika sera occupé par l'éloge qu'il fera aux saints hommes, Djelfa est occupé par d'autres scandales. Le procureur de la République a convoqué, hier, sur plainte du wali lui-même, quatre des principaux responsables de la wilaya. Selon un de nos correspondants locaux, l'installation suspecte d'un président d'APC, à El-Khemis, dépendant de la daïra de Sidi Ladjel, est à l'origine du scandale. L'ancien président de l'APC a été démis de ses fonctions, suite à un retrait de confiance «monté» de toutes pièces contre lui et son remplaçant, un élu de la commune d'El-Khemis, aurait donné l'équivalent de 100 millions de centimes pour prendre la place du maire déchu. Les bénéficiaires de cette corruption sont quatre responsables-clés de la wilaya de Djelfa. La rumeur publique cite le chef de cabinet de la wilaya, le Drag, le chef de cabinet de l'APW et un quatrième responsable, c'est-à-dire ceux-là mêmes qui ont été convoqués par le juge d'instruction auprès du tribunal de Djelfa, hier matin. Djelfa, plaque-tournante du comité de redressement des anti-Benflis, est aussi une ville équivoque. «Le wali, un natif de Tlemcen, est un des hommes de confiance du président de la République et un subalterne zélé du ministère de l'Intérieur», précise une source proche du clan Addou. C'est dans cette optique qu'il faut placer le choix de la ville pour abriter le congrès du redressement, lors duquel Abdelaziz Benkhadem a constitué le fer de lance des dissidents du FLN pro-Benflis. La ville occupe le bas du tableau, au niveau national, en matière d'emplois, de relance économique, d'éducation et de santé. Rongé par ses contradictions, par un taux hyper-élevé de corruption, notamment au niveau de l'enseignement, elle est devenue le nid des intrigues de toutes sortes.