Cette confrérie fait l'objet depuis l'indépendance du pays de la sollicitude d'un grand nombre de personnalités politiques. Attendu au chef-lieu de la wilaya de M'sila, le président de la République a entamé sa visite de deux jours par les zaouias de cheikh Lazhari où il a fait une petite halte avant de se rendre à la zaouia El-Hamel, dont la réputation dépasse de loin les limites de la région, voire de toute l'Algérie. Fondée en 1944 par Sidi Cheikh Mohamed Aboulkacem, cette zaouia se distingue par son encrage nationaliste. Elle a apporté son soutien à l'émir Abdelkader, visitée à plusieurs reprises par Abdelhamid Ibn Badis et ayant enfanté plusieurs moudjahid, la déclaration d'indépendance de l'Algérie a été proclamée dans son enceinte. Dès 1962, un institut de formation attenant à la zaouia, créé avec la bénédiction des pouvoirs publics, a formé des milliers de cadres qui occupent actuellement des hauts postes dans la hiérarchie de l'Etat algérien. Et c'est justement là la force de cette confrérie religieuse qui, de fait, agit directement ou indirectement sur les destinées de la Kabylie. Malgré cette profession de foi, il n'en demeure pas moins qu'elle fait l'objet, depuis l'indépendance, de la sollicitude d'un grand nombre de personnalités politiques allant de Ferhat Abbas à Bouteflika, en passant par Benabi et Ben Bella. Aussi, la visite qu'a rendue, hier, le chef de l'Etat à cet important centre de rayonnement théologique, mais aussi socio-politique, ne peut passer inaperçue à quelques mois d'une échéance majeure. Sans doute conscient de l' aura positive qu'elle dégage en direction d'une région qui lui est traditionnellement réfractaire. Bouteflika entend frapper à la porte de la Kabylie et pour-quoi pas glaner quelques voix, malgré la farouche opposition qu'affiche le mouvement citoyen. Pour avoir la faveur de cette zaouia, qui jouit de son caractère apolitique, le chef de l'Etat sera vraisemblablement tenté de puiser dans les fonds publics pour donner corps au rêve de milliers d'Algériens, qui ne désespèrent pas de voir l'institut fermé par Boumediene, renaître de ses cendres. L'institut a néanmoins semé sa graine dans les institutions de l'Etat algérien. A ce propos, le voeu du cheikh Mohamed El-Harroun El-Kacimi El-Hassen, actuel guide de la zaouia El-Hamel, espère une aide des pouvoirs publics pour la réouverture de ce centre de formation supérieur qui semble avoir laissé son empreinte au sein des structures de la République. L'autre aspect tout aussi important de la zaouia, c'est son poids au sein de larges couches de la population et notamment en Kabylie où le fondateur de la zaouia a fait ses premières études. «Nous recevons des milliers de visiteurs qui nous viennent de Kabylie. La relation entre notre zaouia et cette région du pays est très forte», affirme Mustapha El-Kacimi, fils du guide actuel de la zaouia. Cependant, notre interlocuteur soutient que la confrérie «n'a aucune prétention politique et ne compte pas influencer sur le comportement électoral» de la grande masse de ses fidèles. Une pareille action, assurément nous dénuée d'arrière-pensées électoralistes, permettra-t-elle à Bouteflika de monter dans l'estime des fidèles de la zaouia d'El-Hamel? L'avenir nous le dira.