Le Président en exercice au fond bénéficie tout naturellement des moyens de l'Etat et des frais de représentation qui lui sont alloués. Sans oublier tous les autres avantages liés à sa fonction: l'accès aux médias lourds, la couverture par la presse de toutes ses activités, y compris celles qui sont protocolaires, la possibilité de se déplacer à l'intérieur et à l'extérieur du pays, l'inauguration des infrastructures et même des chrysanthèmes, les bains de foule en déplaçant des populations et en faisant sortir les écoliers, la prononciation des discours fleuves tout cela entre dans l'ordre des choses et c'est tout à fait normal, pourrait-on dire sans risque de pléonasme. Mais ce que l'on constate, c'est qu'après avoir oublié de sillonner les quatre coins du pays pendant les quatre premières années de son mandat, le président de la République met les bouchées doubles pendant les quelques mois qui restent, comme si la vie de la nation en dépendait. Les calculs électoralistes sont trop évidents. Les autres candidats ne bénéficient pas des mêmes avantages ni des mêmes moyens, loin s'en faut. Le combat est par trop inégal. Néanmoins, les électeurs ne sont pas dupes. Ils savent très bien ce qui se trame. La cote de popularité d'un candidat à l'élection présidentielle, - fût-il le Président en poste - ne se mesure pas uniquement à la manne en dinars dépensés, mais bien à l'ancrage de son électorat au sein de la société. De quelle frange sociale est-il représentatif? A-t-il un projet, un programme politique clair et susceptible d'emporter l'adhésion des couches sociales les plus larges? Est-il en mesure de sortir le pays de la crise profonde dans laquelle il se débat depuis presque treize ans? Ce que l'on peut remarquer, en revanche, c'est que malgré des réserves de change estimées à quelque 28 milliards de dollars, la misère sociale n'a jamais été aussi voyante. La détresse et le désespoir touchent de larges couches de la population. Entre 1999 et 2003, les inégalités sociales n'ont fait que s'accentuer, et le fossé s'est davantage creusé entre les riches et les pauvres. Autant dire que le bilan économique du Président est négatif et ce ne sont pas les milliards distribués à la hâte ces trois derniers mois qui vont faire oublier cette réalité amère. Quant aux autres fronts, ils ne sont pas plus reluisants. Les atteintes aux libertés publiques se multiplient allègrement sans que le président de la République daigne sortir de sa réserve pour y mettre un holà. La dernière atteinte à relever concerne la ratonnade des professeurs de lycée, après celle des archs et le harcèlement des journalistes. La liberté de la presse, qui est l'un des fondements du pluralisme politique arraché depuis le 5 Octobre 1988, est menacée depuis le mois d'août, certainement pour mettre un terme à la divulgation des scandales qui éclaboussent le sérail. Pour financer sa pré-campagne électorale, M.Abdelaziz Bouteflika n'hésite pas à faire casquer les contribuables. Les autres candidats partent défavorisés. Quelque part, il y a comme une injustice.