Une scène du film Zabana Le film s'ouvre avec l'attaque de la Poste centrale d'Oran (avril 1949). La 65e édition du Festival de Cannes, qui se déroulera du 16 au 27 mai, aura-t-elle son nouveau «Hors-la-loi»? À quelques mois de la célébration du 50e anniversaire de la fin de la Guerre d'Algérie, un film algérien qui retrace les derniers jours d'une figure importante de la Révolution algérienne a été déposé auprès du comité de sélection du Festival de Cannes et cela pour être inscrit en sélection officielle. Il s'agit du film Zabana! de Saïd Ould Khelifa, qui aborde pour la première fois à l'écran (en Algérie et en France) le sujet de la première exécution par guillotine du 1er militant algérien du FLN. Après le film de Gillo Pentecorvo, Zabana! est le film qui explique pourquoi «La bataille d'Alger» a éclaté six mois après l'exécution d'Ahmed Zabana et Abdelkader Farradj. Le film évoque surtout l'implication directe de François Mitterrand, ministre français de la Justice de l'époque qui avait voté favorablement pour l'exécution de Zabana. Le film montre également les premiers clivages entre MNA et FLN à l'intérieur même de la prison de Serkadji (sur la base des confidences de Ali Zamoum, le plus proche compagnon de Zabana en prison). Le procès de Zabana, constitue également un moment unique au cours duquel Me Thuvenny (un des avocats de Zabana, assassiné par la suite, par la Main rouge) fait le procès de la colonisation depuis le décret Crémieux au soulèvement du 8 mai 1945. Le film se base également sur des documents confidentiels qui auront permis la reconstitution du Conseil des ministres (15 février 1956) et de la réunion du Conseil supérieur de la magistrature (5 juin 1956), les deux présidés par René Coty, chef de l'Etat français à l'époque et «animés» par le ministre de la Justice, François Mitterrand. Le film s'ouvre avec l'attaque de la Poste centrale d'Oran (avril 1949) et là aussi des noms historiques sont cités et certains n'ont jamais été évoqués dans le cinéma algérien: Aït Ahmed, Ahmed Ben Bella, Souïdani Boudjemaâ, Bakhti Nemiche, entre autres... Le film rend hommage enfin à un militant embastillé à Serkadji, depuis mai 1945, Mohamed-Saïd Mazouzi. Sur le plan technique, le film de Saïd Ould Khelifa, n'a rien à envier aux films généralement sélectionnés pour le Festival de Cannes. Ce film d'une durée de 1h 50 est tourné en version scope. La direction photo est signée Marc Koninckx qui venait de terminer le film L'Ordre et la morale de Mattieu Kassovitz. Il avait aussi fait l'image de Johnny Mad Dog de Stéphane Sauvaire. Marc Koninckx a été également cadreur au steadycam chez Carax, Chéreau, Polanski, Louis Malle, Verheoven etc. La musique du film est signée par Michel Wintsch, compositeur-pianiste suisse qui fait beaucoup de musiques de films, d'Alain Tanner en particulier. Compositeur pour l'opéra Ma Barker, de rock progressif et de jazz avec le fameux musicien américain Gerry Hemingway. Côté distribution, on trouve aux côtés de Imad Benchenni (véritable révélation dans le rôle de Zabana) et Khaled Benaïssa (Ali Zamoum), l'actrice suisse Anne Richard (qui a le rôle-titre du juge de la série de France 2: «Boulevard du Palais»). Le rôle de Mitterrand est tenu par Jean-Marie Galey, une étoile montante de la comédie française. En attendant le verdict final du comité de sélection du Festival de Cannes, dirigé par Thierry Frémaux et Gilles Jacob, le cinéma algérien retient son souffle, dans l'espoir de figurer une nouvelle fois dans le gotha mondial du cinéma, le mois de mai prochain.