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L'impuissance fataliste des dirigeants arabes
AINA EL ARAB?
Publié dans L'Expression le 15 - 03 - 2012

A Ghaza, la tension est à son comble. Des Palestiniens ont été tués et d'autres blessés
«Le combattant qui l'emporte est celui qui gagne la campagne de l'information. Nous en avons fait la démonstration au monde: l'information est la clef de la guerre moderne - stratégiquement, opérationnellement, tactiquement et techniquement.» Glen Otis (Général US)
Trois grands événements ont structuré ce début de mois de mars, il s'agit tout d'abord de la discussion entre «grands»
- Israël et les Etats-Unis - du type de punition à infliger à l'Iran pour délit d'indépendance énergétique. Dans le même sillage, nous parlerons de la Syrie et de la nécessité à en croire la doxa occidentale - de retirer son permis de tuer à Al Assad- Enfin, nous aborderons le problème palestinien vieux d'une centaine d'années et qui risque de ne plus trouver de solution. Dans ces trois conflits en creux, la Ligue arabe a joué un rôle tragiquement servile pour imposer les instructions de l'Occident à tous les autres pays arabes qui, à des degrés divers sont fragilisés.
Pour rappel, la Ligue arabe - en fait, un service du ministère des Affaires étrangères égyptien depuis la création il y a 66 ans - a toujours suivi les instructions du Raïs, ce pharaon aux pieds d'argile qui est tombé de son socle l'année dernière, abandonné par ses maîtres occidentaux. Depuis, Amr Moussa a tout fait en vain pour un retour de l'Occident pour un adoubement en tant que président de l'Egypte. Il a notamment fait voter à la hussarde, la fameuse résolution rédigée sur dictée occidentale et votée par les Arabes demandant au Conseil de sécurité de faire une zone d'exclusion aérienne. Résultat des courses: El Gueddafi fut lynché dans des conditions atroces, la Libye est en morceaux et, aux dernières nouvelles, la Cyrénaïque, riche en pétrole, se déclare autonome... Amr Moussa n'a pas tout perdu; les potentats arabes se sont cotisés pour lui assurer une retraite paisible de plusieurs millions de dollars...
La punition de l'Iran par Israël
Début mars en effet, tous les médias occidentaux relayant Israël parlent d'une rencontre décisive pour décider du sort de l'Iran. Avec un rare parti pris, Jean Daniel, qui abdique apparemment tout entendement quand il s'agit d'Israël, fait tout pour présenter Israël comme un petit pays mais qui discute d'égal à égal avec les Etats-Unis. Mieux, il diabolise l'Iran en reprenant toutes les antiennes éculées. Mieux, il a répété ad nauseam une fausse information voulant à tout prix que l'Iran veut rayer Israël de la carte jouant sur l'ambiguïté juifs et Etat. La phrase en fait, de Khomeiny, rapportée par Ahmadinejad, disait que le régime en place en Israël devait être rayé de la page du temps... «On sait, écrit-il, en quoi consiste la question iranienne. Voici un pays dont l'armée est puissante. Et qui prétend exporter son idéologie islamiste. Ce pays apporte de l'aide militaire et matérielle à la Syrie en crise ainsi qu'au Hezbollah libanais. Mais c'est aussi un pays qui est tout prêt à disposer de la bombe atomique et qui, parfois, laisse entendre ou fait comprendre qu'il pourrait en user pour rayer Israël de la carte du monde.» (sic) (1)
Il comprend et absout Israël: «On peut comprendre que la première victime potentielle, à savoir Israël, s'émeuve d'une telle situation, préfère prévenir que subir et redoute que si l'on remet l'intervention à plus tard, ce ne soit trop tard.» Il demande ce faisant, aux Iraniens pour ne pas encourir la fureur d'Israël de: «(...) Mais surtout que les Iraniens sont trop respectueux des intérêts de leurs frères palestiniens pour prendre des décisions à leur place. Si les Palestiniens jugeaient opportun et bénéfique de conclure une paix au Proche-Orient, il ne pourrait plus être question de supprimer l'Etat avec lequel cette paix serait conclue. Si les Russes et les Chinois arrivaient à obtenir cela des Iraniens, toute la face du monde en serait changée.» (1)
Y a-t-il un jeu subtil entre les Etats-Unis et l'Iran?
Il semble que l'Iran et les Etats Unis jouent un jeu très subtil basé sur la diabolisation mutuelle par médias interposés. La contribution suivante explique pourquoi le point de non-retour ne sera pas atteint: «Les tensions récentes entre les puissances occidentales et l'Iran ont de nouveau entraîné la région dans une frénésie diplomatique avec les nations s'empressant de se protéger des conséquences de la confrontation renouvelée entre l'Amérique et l'Iran sur son programme nucléaire. Par exemple, le secrétaire américain de la Défense, Léon Panetta, a laissé entendre la possibilité d'une action militaire dans le cas où l'Iran irait trop loin. Il a déclaré: «Nous devons nous assurer que nous sommes prêts à toute situation et que nous disposons de toutes les options sur la table.» Lors d'une conférence de presse, le ministre russe des Affaires étrangères, Sergeï Lavrov, a mis en garde contre une attaque sur l'Iran. Il a dit «Je n'ai aucun doute que ça enflammerait un feu qui se consomme déjà, le feu latent de la confrontation sunnite-chiite, et au-delà, çela provoquerait une réaction en chaîne - Je ne sais pas où ça irait (...) Cependant, au-delà de l'actuelle montée des tensions militaires, il y a des gestes des deux cotés qui semblent être en contradiction avec les va-t-en guerre à Washington et Téhéran. Le sauvetage de marins iraniens par les Américains et les lettres d'Obama adressées aux leaders iraniens semblent indiquer que l'Amérique souhaite résoudre le problème de manière diplomatique.» (2)
On ne peut pas s'empêcher de remarquer qu'au cours des six dernières années, l'Amérique a eu d'amples opportunités d'attaquer les sites nucléaires iraniens ou de mettre en oeuvre un changement de régime, mais, à chaque occasion, l'Amérique a soit minimisé la menace iranienne, soit elle a apporté un soutien peu enthousiaste à la population iranienne pour renverser le régime. Certains de ces incidents peuvent être résumés de la façon suivante: en 2005, le gouvernement Bush a rejeté les craintes israéliennes d'un Iran doté de l'arme nucléaire après que la National Intelligence Estimate (NIE) a révisé son évaluation de 2010 à 2015, la date à laquelle l'Iran posséderait la bombe atomique. De plus, et plus important, la NIE a soutenu que l'Iran avait abandonné ses plans de transformer son programme nucléaire en arme militaire en 2003. En 2008, l'Amérique a refusé de vendre des versions avancées de ses bombes bunker buster (pour exploser dans
les bunkers) à Israël. En 2009, les manifestations en Iran ont éclaté contre la réélection d'Ahmadinejad. Les manifestants étaient vivement soutenus par l'Union européenne, mais le soutien de l'Amérique était au mieux réticent. (...) Il est à noter que l'Iran a joué un rôle essentiel pour assurer l'hégémonie des Etats-Unis dans la région: l'Iran a amené la stabilité en Irak à travers le régime chiite au pouvoir dont la très grande majorité a été développée et façonnée sous la tutelle de Téhéran. Téhéran a également fourni un soutien inestimable aux forces américaines pour empêcher la résistance afghane pachtoune de s'étendre vers l'Ouest. (...) Pour dissuader les Etats-Unis, la Russie a envoyé des livraisons d'armes à la Syrie, a signé un accord pour des jets militaires d'une hauteur de 550 millions de dollars et a placé des navires de guerre en Syrie. L'autre raison pour inonder la région d'armes est que l'Amérique se prépare à une guerre éventuelle avec d'autres grandes puissances telles que la Russie, la Chine et l'Europe pour le contrôle de l'approvisionnement du pétrole et du gaz au Moyen-Orient. (2)
On comprend alors, les salamalecs de part et d'autre. Les Américains qui délivrent un équipage iranien, les Iraniens qui commuent une peine de mort d'un Américano-Iranien et le guide suprême iranien Ali Khamenei qui a salué pour sa part, l'appel du président américain Barack Obama à éviter l'option militaire contre le programme nucléaire iranien controversé, selon son site officiel. Les déclarations de M.Obama appelant à éviter toute frappe contre l'Iran «sont de bonnes déclarations qui montrent que les Américains sortent d'une illusion», a déclaré l'ayatollah Khamenei devant de hauts responsables religieux iraniens. Le président américain a mis en garde mardi contre des frappes militaires en Iran ou en Syrie, accusant de légèreté ceux qui exigent des interventions contre ces deux pays. Il a estimé qu'une issue pacifique était dans l'intérêt de tous, y compris d'Israël, qui envisage d'intervenir militairement contre les sites nucléaire iraniens. Il a affirmé que l'Iran était ´´politiquement isolé´´ et en train de ´´ressentir profondément l'effet de ces sanctions´´, pour justifier son opposition à toute action militaire. (...) Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a dit lundi à Barack Obama qu'Israël resterait ´´maître de son destin´´ face à la menace posée selon lui par l'Iran, le président américain estimant de son côté qu'une solution diplomatique était encore possible avec Téhéran. Pour rappel, la dernière fois qu'Obama a tenté de parler des Palestiniens cela s'est mal passé pour lui. MM.Obama et Netanyahu se sont vus pour la dernière fois à l'Assemblée générale de l'ONU en septembre 2011. Quatre mois plus tôt, le dirigeant israélien avait infligé un camouflet à son allié en rejetant face à la presse dans le Bureau ovale son appel à un Etat palestinien sur la base des lignes de 1967. (3)
Michel Rocart, ancien Premier ministre français, d'une façon lucide déplore l'absence de l'Europe. «Personne dit-il, ne regarde le grand Moyen-Orient. Nous avons une stratégie américano-anglaise, acceptée par les autres, et notamment par nous, de torpiller toute possibilité de discuter sérieusement avec les Iraniens. Comme s'il s'agissait de préparer une situation de tolérance rendant acceptable une frappe israélienne. Dans cette hypothèse, la guerre devient une guerre irano-syrienne soutenue par la Chine et la Russie, comme on le voit à l'ONU, contre en gros l'Occident et ses clients. Et l'Europe se tait. C'est une affaire à millions de morts, l'hypothèse étant que ça commence nucléaire. Je connais bien ces dossiers et je n'ai jamais eu aussi peur.(4)»
Pourtant l'Iran -contrairement à Israël - est signataire du Traité de non-prolifération nucléaire, se conformant à ses obligations. Seul le nucléaire civil l'intéresse, en particulier le nucléaire médical. Qu'on se le dise, une guerre contre l'Iran, c'est la boîte de Pandore qui s'ouvre. L'Iran ce n'est pas un pays arabe qui fait dans les rodomontades. Il a les moyens de se défendre. «L'arc chiite» est une réalité. Qu'arrivera-t-il si les oléoducs de la province pétrolifère de Qatif se mettaient tous à sauter? 5 dollars, c'est la hausse du prix du baril déclenchée samedi à la suite de l'annonce de cette nouvelle que CNN, dans un excès du ridicule, attribue à l'agence de presse iranienne PressTV. Il suffirait que quelques chiites saoudiens fassent exploser les oléoducs qui passe a proximité de chez eux, pour plonger l'Occident dans une chute dont il n'a aucune chance de se relever. De plus, l'Irak chiite s'affirme, les observateurs suivront avec attention la rencontre des chefs d'Etat arabes le 29 mars. La présidence reviendra à l'Irak et nous en aurons terminé avec le colosse gazier au sabre nain mais à la grande capacité de nuisance par sa diplomatie du chéquier. Peut-être que la politique anti-syrienne dernier bastion avant l'Iran, connaîtra alors une inflexion.
Le désespoir des Palestiniens
A Ghaza, la tension est à son comble. Des Palestiniens ont été tués et d'autres blessés. Selon l'armée israélienne, une quarantaine de roquettes et d'obus ´´de toutes sortes´´ se sont abattues vendredi sur le territoire israélien en provenance de l'enclave palestinienne. Cette escalade de violence - la plus meurtrière depuis la fin octobre 2011 - a suivi ´´l'élimination ciblée´´ du secrétaire général du groupe radical des Comités de résistance populaire (CRP). Zouheir al-Qaïssi, un adolescent palestinien, a été tué lundi matin 12 mars dans la bande de Ghaza lors d'une frappe israélienne, portant à vingt et un le nombre de Palestiniens morts depuis vendredi, l'aviation israélienne avait effectué de nouvelles frappes à Ghaza dans la nuit de dimanche faisant 35 blessés, en riposte aux tirs de roquettes palestiniens. En Israël, un bâtiment situé dans un kibboutz a été endommagé mais ces tirs n'ont fait aucune victime. (5)
Le problème palestinien se règle à coups de millions de dollars sur le dos des Palestiniens. Khaled Mechaâl a changé de fusil d'épaule; il quitte la Syrie qui l'a hébergé, nourri et considéré comme un chef d'Etat pour le non-Etat qu'est le Qatar. Il n'est pas étonnant de ce fait, qu'à l'issue d'une réunion à Doha, dimanche 5 février, sous l'égide du cheikh qatari, le président palestinien Mahmoud Abbas et le chef du Hamas Khaled Mechaâl seraient tombés d'accord sur la nécessité de tenir rapidement des élections présidentielle et législatives ´´et d'éliminer les obstacles entravant´´, les discussions entre les deux hommes, qualifiées de ´´positives´´, visent à accélérer la réconciliation entre le Hamas et le Fatah.(6)
Ce qui se passe en Syrie
C'est un fait que des morts tous les jours sont à déplorer. C'est un fait que la rébellion est aidée en armement lourd, on parle même de mercenaires occidentaux arrêtés par l'armée syrienne qui est en train de payer un lourd tribut mais qui est absente des statistiques. Réagissant au massacre de Homs, le ministre français des Affaires étrangères, Alain Juppé, a affirmé lundi que les autorités syriennes ´´devront répondre de leurs actes devant la justice´´ internationale. M.Juppé a aussi appelé «la Chine et la Russie à entendre la voix des Arabes et de la conscience mondiale et à se joindre à nous» pour condamner la répression en Syrie. Lundi à New York, le chef de la diplomatie russe, Sergueï Lavrov, a affirmé que le Conseil de sécurité est ´´manipulé´´ sur la crise syrienne comme il l'avait été sur la Libye. L'émissaire des Nations unies reçu par Al Assad lui a soumis des propositions pour une sortie de crise. Aux dernières nouvelles, la Syrie y a répondu.
En définitive, où sont les Arabes si mal représentés par des potentats qui pensent plus à sauver leur tête qu'à sauver leur peuple? Où sont les Arabes qui sont dénigrés alors qu'ls disposent de deux tiers des réserves pétrolières du monde? Eux qui n'ont cessé de servir de variables d'ajustement tétanisés par Israël et l'Occident au point de regarder ailleurs quand 25 Palestiniens sont tués en deux jours, qu'Al Jazeera, appelée dit-on aussi «Al Khanzira, «la cochonne», bidonne des reportages pour diaboliser le gouvernement syrien. Où était la Ligue arabe en 2009 n'appelant pas à la protection des populations par une couverture aérienne comme elle le réclame de façon hystérique dans le cas syrien? Qu'a-t-elle fait du Rapport Goldstone? Que fait-elle pour dire le droit, seulement le droit? Dans les discussions israélo-américaines, pas un mot sur le conflit palestinien. La colonisation continue à grande vitesse, El Qods est judaïsée et les Arabes regardent ailleurs.
1. Jean Daniel: Guerre en Iran: Obama-Netanyahu, la rencontre décisive Le Nouvel Obs
2. http://hizb-australia.org/culture/political-analysis/4035-american-iranian-tensions-brinkmanship-or-war http://www.alterinfo.net/Tensions -americano-iraniennes-jeu-calcule-ou-guerre_a72270.html
3. Iran: Khamenei salue l'appel d'Obama à éviter l'option militaire le 08.03.12
4. http://www.liberation.fr/politiques/01012393328-on-est-dans-l-imbecillite-politique-collective
5. Palestiniens tués lors de nouveaux raids israéliens à Gaza Le Monde 12 03 2012
6. Discussions ´´positives´´ entre le Hamas et le Fatah au Qatar Le Monde avec Afp 5 02 2012


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