Energie, force, doigté et sensibilité émanent du jeu du trio. «On oublie bien souvent que les standards du jazz ont été avant tout des morceaux chantés», affirme Francis-Alfred Moerman qui n'a plus remis les pieds en Algérie depuis 15 ans. Forcément, l'émotion est là. Entouré d'un bon guitariste rythmique, Gilles Parodil et d'un excellent violonniste, Jean Christophe Rouet, ils forment le trio jazz tsigane de France. Initié par le Centre culturel français d'Alger en collaboration avec Riadh El Feth, le trio a animé jeudi dernier à la salle Ibn Zeydoun un concert plein de charme et de rebondissement où il a été question de rendre hommage en partie à l'oeuvre du grand Django Reinhardh par ses propres compositions et à Charles Trénet «qui a su populariser le jazz dans les années 30», dit Moerman. Plutôt lent et doux au départ, le rythme a pris du nerf et du tonus vers la fin, si bien que toute la salle s'est mise à applaudir et à battre la mesure. F. A. Moerman s'est plu tout au long du concert à nous conter l'histoire du jazz tsigane par évocation musicale. De la romance sentimentale au swing des plus mélodieux et mouvementés. Cependant, toujours avec une note de sobriété et d'intelligence raffinée. Une manière de rappeler son maître avoué Sarane Ferret. Le trio, très à l'aise, ne quittera plus la scène au grand bonheur d'une assistance charmée. Francis-Alfred Moerman joue de sa guitare comme il bercerait un enfant avec sensibilité et délicatesse. De la tendresse au bout des doigts. Le jazz tsigane de Moerman est également festif et enjoué comme on en jouerait dans un bal musette ou dans un village avec des forains autour d'un feu de bois. Sorti peut-être de nulle part (out off) le jazz tsigane a su inspirer plus d'un musicien comme Djeingo Reinhardh en l'occurrence. Le jazz gitano-parisien a su lui aussi se faire une place dans les années 50-60 avec les grands maîtres de la guitare manouche, aujourd'hui disparus. Formé en 1986, le trio jazz tsigane de France continue à séduire et à plaire. Il est intéressant de souligner, voire surprenant de constater que des jeunes s'intéressent et viennent s'imprégner de la musique d'hier. Il faut croire que tout ce qui est authentique est éternel ! De Maldovie à Moscou, le jazz tsigane atterrit chez nous. «Souvenance» est une bossa-bolero que Maerman exécutera avec brio, tandis que le violoniste nous servira un bon «Gershwin» à faire roucouler ses cordes.