Le retour à la légalité du parti islamiste dissous passe par une ouverture sur les réalités politiques. Le leader de l'ex-FIS, Abassi Madani, qui se trouve en Malaisie a entrepris de larges consultations avec ses principaux lieutenants à l'étranger, a-t-on appris de source proche des milieux islamistes du parti dissous. Le but de ces consultations est de finaliser «l'initiative de paix» promise par l'ancien leader de la scène politique algérienne du début des années quatre-vingt-dix. Selon notre source, cette plate-forme politique qui sera soumise au président de la République et aux partis politiques «traitera de points concrets, notamment de l'arrêt de l'effusion de sang, en lançant un appel aux groupes armés qui se réclament encore de l'ex-FIS, du dossier des disparus et du respect de la Constitution par les leaders islamistes». Condamné à douze ans de prison en juillet 1992, mis en résidence surveillée en juillet 1997 et libéré définitivement en juin 2003, Abassi Madani a bénéficié d'une autorisation de sortie du territoire national, «afin de se faire soigner», selon la version de la présidence et «pour des raisons humanitaires» selon le ministère de l'Intérieur. Mais tout le monde aura compris que le «deal» entre le chef du parti dissous et les autorités passait par cette concession avec, en retour, «un éloge appuyé» de la part de l'ex-n°1 du FIS au président de la République, Abdelaziz Bouteflika. La présidentielle de 2004 semble permettre toutes les compromissions, même si l'option - encore reconduite - du «tout-sécuritaire» semble exclure les islamistes radicaux de toute activité politique légale. Cheville ouvrière du FIS à l'étranger depuis la mise à l'écart forcée de Rabah Kebir, un des initiateurs de la trêve de l'armée islamique du salut, Mourad Dhina est le principal appui de Abassi Madani dans son parcours politique post-juin 2003. Très introduit auprès des cercles décideurs, des ONG et des institutions politiques européennes, Dhina a donné le ton et dévoilé son jeu il y a quelques mois dans un entretien donné à un journal électronique. «Notre objectif est le retour du FIS sur la scène politique». Voilà en clair le but des leaders du parti dissous et voilà - étalé dans toute sa simplicité ou son ambiguïté - ce qui fait courir les chefs et lieutenants du parti dissous. Entité exclue et absente de l'échiquier politique légale, mais réalité sociale incontournable, l'islamisme radical représenté par les leaders de l'ex-FIS continue d'empoisonner la quiétude des autorités. Les pérégrinations de Ali Benhadj à travers le pays focalisent une forte concentration des services de sécurité et le jeu de coulisse des leaders du parti à l'étranger nourrit les plus grandes appréhensions de la part des autorités, à un moment où la vie politique algérienne est dangereusement fragilisée par des enjeux suspects et des dérives graves engendrées par l'approche de l'échéance de la présidentielle d'avril 2004.