L'équipe de campagne de Barack Obama multiplie les coups contre le républicain Mitt Romney, au risque d'écorner la popularité personnelle du président américain sortant, l'un de ses atouts en vue de l'élection du 6 novembre. Les sondages rendus publics cette semaine, à un peu plus de cinq mois de la présidentielle, donnent un léger avantage au président face à M.Romney, mais montrent aussi, comme celui publié par le Washington Post et ABC, que les Américains sont plus nombreux à désapprouver la façon dont M.Obama gouverne (49%) qu'à l'approuver (47%), un score tiré à la baisse par sa gestion des dossiers économiques: 55% d'insatisfaits. En revanche, pour 52% de ces sondés, M.Obama possède de meilleures qualités personnelles que M.Romney pour être président. Seuls 38% donnent l'avantage à M.Romney dans ce domaine. Dans une enquête Wall Street Journal/NBC, 49% affirment avoir une opinion «très» ou «assez positive» de leur président: ce chiffre n'atteint que 34% pour M.Romney. Or, depuis la semaine dernière, l'équipe de M.Obama a adopté une stratégie d'attaques contre M.Romney, visant en particulier sa carrière dans le capital-risque. Il est dépeint dans des vidéos comme un «vampire», un «destructeur d'emplois» ou le «contraire de Robin des Bois», sur fond d'images d'usines liquidées et d'employés licenciés. A la fin de ces films, conformément à la loi, on entend le président dire «je suis Barack Obama, et j'approuve ce message». «Les partisans (de M.Obama) ont décidé d'essayer d'empêcher la cote de popularité de Romney de remonter. C'est peut-être un peu dangereux» pour l'image du président-candidat, observe Clyde Wilcox, professeur de sciences politiques à l'université de Georgetown. Pour lui, la popularité personnelle peut faire la différence le jour de l'élection si l'écart est serré: «Trouver (le candidat) sympathique peut vouloir dire avoir tendance à faire confiance à son jugement. Et toutes choses égales par ailleurs, on vote pour la personne avec qui on aimerait bien prendre une bière». Les arguments de campagne musclés de l'équipe Obama, qui ont créé le malaise jusque chez certains de ses alliés, pourraient lui coûter des voix au sein de l'électorat centriste, un groupe censé se détourner des candidats qui ont recours aux publicités négatives. Pour Robert Erikson, enseignant en sciences politiques à l'Université Columbia de New York, l'équipe de M.Obama prend un «risque calculé». «C'est peut-être le coût de la campagne, on perd des points au niveau personnel, mais votre concurrent en perd encore plus», note l'universitaire. Sous couvert de l'anonymat, des conseillers de M.Obama assurent ne pas être inquiets de le voir subir un retour de bâton et soulignent la nécessité, de leur point de vue, de mettre en exergue les aspects les plus gênants du bilan de M.Romney, que ce soit en tant que chef d'entreprise ou gouverneur du Massachusetts de 2003 à 2007. Jeudi, M.Obama a commencé à évoquer ce dernier sujet, en observant à Des Moines (Iowa, centre) que M.Romney «ne parle vraiment pas de ce qu'il a fait au Massachusetts». «Mais il parle de sa carrière en entreprise. Il dit que cela lui permet de comprendre la façon de créer des emplois, même s'il est incapable de présenter une seule nouvelle idée», a assuré le président. Pour M.Obama, «le but principal d'une société financière comme celle du gouverneur Romney n'est pas de créer des emplois».»Ce genre d'expérience a peut-être ses mérites, mais pas à la Maison Blanche», a-t-il encore lancé. Pour M.Erikson, la stratégie de M.Obama répond aussi à celle de son adversaire, qui a fait une campagne agressive contre lui depuis les primaires. «C'est difficile de mener une campagne propre, pleine de principes, si le concurrent ne le fait pas», dit-il.