Avec sept ministres intérimaires depuis près d'un mois, le gouvernement donne l'impression de naviguer à vue. Elle est inédite, cette période que traverse actuellement l'Algérie sur le plan institutionnel. A 15 jours de la célébration du Cinquantenaire de l'Indépendance, le statu quo est général dans le pays. Avec sept ministres intérimaires depuis près d'un mois, le gouvernement donne l'impression de naviguer à vue et ce ne sont pas les échéances importantes qui manquent. A commencer par la préparation du Ramadhan, la rentrée sociale et scolaire. L'opinion publique qui s'attendait à un changement de la composante du gouvernement au lendemain des élections législatives du 10 mai dernier, à plus forte raison que six ministres ont été élus députés, a fini par ne plus se poser de questions. Même le département de la justice est géré par un intérimaire après la désignation de l'ex-ministre, Tayeb Belaiz, à la tête du Conseil constitutionnel. Les six ministres en question (Cherif Rahmani, ministre de l'Aménagement du territoire et de l'Environnement, Amar Tou, ministre des Transports, Amar Ghoul, ministre des Travaux publics, Rachid Harraoubia, ministre de l'Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique, Tayeb Louh, ministre du Travail, de l'Emploi et de la Sécurité sociale, et Moussa Benhamadi, ministre de la Poste et des Technologies de l'information et de la communication), ont été démis de leurs fonctions le 24 mai dernier. Ils sont remplacés par des intérimaires qui sont aussi des ministres en poste. Depuis cette date, aucun Conseil des ministres n'est tenu pour, ne serait-ce que pour évaluer les élections législatives. Si le pouvoir exécutif donne l'image d'un pouvoir déboussolé, attendant on ne sait quoi, pour se reconstituer, le pouvoir législatif peine à commencer son travail, 40 jours après les élections législatives et 24 jours après l'installation de l'Assemblée. L'APN reflète toujours l'image d'une cathédrale dans le désert, en sus des critiques des partis politiques qui la désignent sous le label d'Assemblée mal élue, manquant de crédibilité et de légitimité. Aucune activité n'est tenue depuis son installation, le 26 mai dernier. Ce qui est anormal quand on ne veut pas badiner avec le fonctionnement des institutions. Les partis qui y siègent ont commencé à afficher leurs intentions concernant des propositions de projets de loi, mais ça reste toujours au stade de l'intention, car l'APN n'as même pas achevé l'installation des différentes commissions. Les trois partis islamistes de l'Alliance de l'Algérie verte (AAV) ont annoncé quatre projets. Il s'agit d'un projet de constitution d'une commission d'enquête parlementaire sur la fraude électorale du 10 mai dernier, une autre commission d'enquête sur le niveau d'instruction des parlementaires, la réduction des salaires des députés. Ce groupe parlementaire a annoncé également de remettre sur la table le projet de loi sur la criminalisation du colonialisme. Ce projet a fait, il y a deux ans, couler beaucoup d'encre lorsqu'un député FLN l'a proposé avant d'être bloqué par le gouvernement. Cela n'enlève pas le caractère morose de ce début d'exercice de la septième législature. Ce qui affligera encore l'Assemblée, c'est le boycott de ses structures par trois groupes parlementaires. Il s'agit du Parti des travailleurs (PT), du Front des forces socialistes (FFS) et de l'AAV. Voilà donc dans quelle atmosphère se prépare la célébration du Cinquantenaire de l'Indépendance. C'est à juste titre que le commandant Lakhdar Bouregaâ a fait constater, le 14 juin dernier, lors d'un hommage rendu à l'ex-officier de l'ALN, Mohamed Chérif Ould El Hocine, que la France fait plus que l'Algérie dans la perspective de cette commémoration. C'est dire que ce blocage institutionnel met dans une mauvaise passe les célébrations du Cinquantenaire de l'Indépendance. Toujours est-il que cette indécision n'est pas pour rassurer une population à bout du souffle. Il est donc pour le moins déplorable pour un pays qui a arraché son indépendance au prix de dizaines de milliers de martyrs, de célébrer le cinquantenaire dans un quasi-vide institutionnel.