Les rivalités FLN-RND existent bel et bien. En cette période de flottement politique et d'offensive contre le parti majoritaire, on est tout naturellement amené à se demander à qui profite l'affaiblissement du FLN. A première vue, le vote de la loi de finances a montré que c'est d'abord le courant islamiste, sous la houlette du mouvement El-Islah, qui a recueilli les dividendes des divisions Flnistes. En réalité, les choses ne sont pas aussi simples et d'autres courants n'ont pas dit leur dernier mot, notamment le RND, à qui on a offert la chefferie du gouvernement sur un plateau d'argent. Un mirador stratégique à partir duquel il peut suivre le cours des choses en toute tranquillité, même s'il n'a pas vocation à les piloter. Mais enfin, pour l'instant, cette position le place dans une situation de wait and see dont il saura tirer les bénéfices le moment venu. Pour lui, les choses ne se présentent pas mal. Ses anciens alliés au sein de la coalition gouvernementale sont tous en train de filer du mauvais coton et il sent que sa revanche est proche. Après la mort de cheikh Nahnah, le MSP essaie de se remplumer sous les efforts acharnés d'un Aboudjerra Soltani qui n'y arrive pas du tout, surtout que dans cette mouvance, c'est surtout Djaballah qui a le vent en poupe. Soltani étant loin d'avoir le charisme et le bagout de son prédécesseur. Reste le FLN. Ses divisions étalées au grand jour sont une aubaine et un pain béni pour son grand rival du RND, auquel il a ravi la première place au sein des instances élues aux deux dernières élections locales et législatives. C'est donc tout naturellement que le RND prétend reconquérir ses fiefs perdus, d'autant plus que les déboires du FLN ne sont pas une nouveauté pour lui, puisque c'est à la faveur d'une autre disgrâce du FLN qu'il a dû les circonstances de sa propre naissance, comme si le Rnd n'était qu'une doublure du FLN, toutes les fois que ce dernier est pris en défaut. Il est un peu celui qui réalise les cascades quand l'acteur principal ne le fait pas. De là à dire que la vie politique algérienne c'est du cinéma, il y a un pas que nous n'allons pas franchir ici. Les rivalités FLN-RND existent bel et bien. En temps normal, elles s'expriment sous forme d'alliance et de saine et virile émulation, mais quand il y a de l'eau dans le gaz, comme c'est le cas actuellement, la rivalité peut prendre des formes moins civilisées. Pour preuve, la manière avec laquelle le RND a éjecté son grand frère de l'Exécutif, en attendant de lui ravir ses sièges à l'Assemblée populaire nationale, au cas où des législatives anticipées seraient organisées juste après la présidentielle, selon le scénario plausible. Par ailleurs, le RND arrive à profiter de toutes les divisions du FLN, y compris celles qui opposent les différents chefs des «redresseurs» pour le leadership. Amar Tou, qui se présente comme l'Alain Juppé du camp Bouteflika, cherche à fédérer, autour d'un vaste rassemblement, les forces qui soutiennent le président de la République, tout en faisant le forcing pour prendre la présidence sinon le secrétariat général du FLN version redresseurs, surtout que Abdelaziz Belkhadem n'y est pas du tout intéressé. Mais Barkat et Si Afif n'entendent pas lui faciliter les choses. Par conséquent, cette guéguerre pour le leadership renforce la position d'Ahmed Ouyahia et le place en situation d'arbitre. Au cas où! A l'opposé, les islamistes peuvent apparaître en position de force, surtout après le coup réussi de l'interdiction de l'importation d'alcool et les déclarations tonitruantes de Abassi Madani sur Al Jazira. Ces deux derniers faits montrent le dynamisme du camp islamiste tout en révélant les rivalités qui travaillent cette mouvance au tréfonds de ses entrailles. La remise en selle d'Abassi Madani ne va pas dans l'intérêt de Abdallah Djaballah, qui espérait recueillir les voix du Fis dissous à la prochaine présidentielle. Elle n'arrange pas également Ahmed Taleb Ibrahimi, qui a un pied au FLN et un autre dans l'opposition radicale, un feu chez les nationalistes et un autre chez les islamistes, tout en n'acceptant qu'une seule définition, celle d'islamiste moderne soucieux du respect de la démocratie. Observant toutes ces divisions, Ouyahia gouverne tout en ayant l'oeil sur le tableau de bord. Les sénatoriales seront pour lui un test sérieux, surtout qu'il sera appelé à arbitrer entre les deux tendances du FLN pour garder la majorité au Conseil de la nation.