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«L'histoire du pays souffre des porteurs de mémoire»
DAHO DJERBAL, HISTORIEN, À L'EXPRESSION
Publié dans L'Expression le 24 - 07 - 2012


«Un débat entre histoire et mémoire»
Le Congrès de la Soummam a constitué le premier pouvoir algérien souverain autochtone du XIXe siècle.
L'Expression: Daho Djerbal, vous avez été convié les 12 et 13 juillet derniers à une conférence sur le Congrès de la Soummam du 20 Août 1956 à Ifri. Qu'en est-il de l'importance de cette rencontre?
Daho Djerbal: Evidemment, dans la rencontre scientifique, il y a eu des chercheurs, des historiens et des témoins oculaires qui ont travaillé dans les préparatifs, l'organisation et la sécurité des éléments du Congrès de la Soummam. Ces témoins ont rencontré des responsables qui sont venus de toutes les régions du pays au Congrès de la Soummam. C'était réellement une occasion assez rare et assez originale.
D'habitude, on se retrouve dans des colloques universitaires ou dans des cérémonies organisées par des partis, ou par d'autres institutions officielles de l'Etat. Donc, pas de dialogue. Mais à cette occasion, il y a eu un dialogue, «un débat entre histoire et mémoire». Cela est le premier aspect qui est très important. Il y avait à la fois des gens âgés qui ont connu et vécu la période. Il y a aussi les jeunes de l'association Horizon qui a pris l'initiative d'organiser cette rencontre et des jeunes d'Ouzellaguène et de la localité de la vallée de la Soummam.
Parlez-nous de l'aspect du Congrès de la Soummam...
Le deuxième aspect de la question sur le Congrès de la Soummam lui-même, c'est que le Congrès de la Soummam a connu beaucoup d'interventions qui ont insisté dans le discours politique, ou des discours idéologiques. Ces discours-là, vont essayer de mettre en évidence le caractère particulier et les particularismes de la région. Au fond du discours, tout s'est passé comme si la Kabylie et les Kabyles qui ont pris cette initiative et assuré la réussite du Congrès de la Soummam, le 20 Août 1956 à Ifri, à Béjaïa, ont finalement payé le prix de l'organisation de ce Congrès, puisque les décisions prises par les congressistes au Congrès de la Soummam ont étés contestées.
Mais en même temps et malgré les divergences, il y a une fierté du fait que le Congrès de la Soummam a été une occasion de créer une unité de commandement, des institutions centralisées et une organisation unique dans l'histoire de l'Algérie. Donc, un embryon de l'Etat algérien indépendant.
Il y a des questions de divergences, de malentendus, de règlements de comptes entre les éléments qui se sont réunis au Congrès de la Soummam, ou les éléments qui n'ont pas pu arriver au Congrès de la Soummam pour une raison ou une autre. Tout cela a permis un vrai débat entre historiens, chercheurs et une population de tout âge. En fait, rien n'est tranché une fois pour toutes. On continue à travailler sur toutes ces questions et ces approches, qu'elles fussent celles du point de vue des partisans de Abane Ramdane, des partisans de Ben Bella, du point de vue des partisans des deux Wilayas I et II, des partisans de Omar Benboulaïd, des partisans de Adjal Adjoule, de Zighoud Youcef, Ali Kafi et d'autres partisans d'autres régions comme le colonel Ouamrane et toutes ces questions ont été abordées d'une manière sérieuse, sans préjugés et sans instrumentalisation politique. Ce travail-là est nouveau en termes d'écriture et connaissance de notre histoire, et c'est très important. Ce qui appartient à l'Histoire est resté à l'Histoire, et ce qui relève de la politique est resté au politique.
Qu'en est-il justement de la question des archives du Congrès de la Soummam?
Les archives du Congrès de la Soummam contiennent, à la fois des procès-verbaux qui ont été plus ou moins récupérés ou conservés. Mais il y a aussi les rapports qui ont été faits par les représentants des différentes zones qui sont devenues actuellement des wilayas. Donc, aujourd'hui, il y a lieu de faire un bilan de ce qui existe en Algérie et en France. Parce que l'armée française a pu récupérer des documents. Il y a des sacs de documents du Congrès qui ont été récupérés par l'armée française. Une partie se trouve dans les archives de l'armée française à Vincennes, une autre partie ailleurs, et il faut arriver à faire les inventaires pour faire les copies, les consulter ou les exploiter. Mais aussi, de la volonté des chercheurs d'aller les trouver où ils sont. Tout cela dépend des accords entre les deux Etats.
56 ans après le Congrès de la Soummam, 50 ans après l'Indépendance nationale, que représente réellement ce Congrès aux yeux de l'opinion publique et de l'Etat?
Ce qui me semble important à retenir, indépendamment des accords et des divergences qui se sont exprimées, c'est que c'est la première fois depuis l'Emir Abdelkader, depuis le XIXe siècle qu'il y a eu la constitution d'un pouvoir souverain autochtone et ce, depuis quatre siècles. Depuis l'arrivée des Turcs. Il faut savoir que le pouvoir central était représenté par des étrangers. Quand les Turcs sont partis, ce sont les Français qui constituaient le pouvoir central. Hors, l'événement révolutionnaire de 1954, ensuite couronné par le premier congrès du FLN (1954- 1962), du 20 Août 1956 à Ifri (Béjaïa) (à ne pas confondre avec la politique FLN 1962-2012). C'est solennellement du point de vue de la mémoire collective algérienne et internationale, la naissance d'un pouvoir algérien autochtone. Cela est un fait historique énorme et considérable.
Enfin, les Algériens ont leur pouvoir politique, leur souveraineté présentée par un groupe révolutionnaire qui a conduit le pays à l'Indépendance nationale.
A priori, jusqu'à aujourd'hui, l'histoire de l'Algérie est souvent écrite par des étrangers. Du coup, l'historien algérien a-t-il accès aux archives du pays ou celles se trouvant en France ou ailleurs?
Je dis oui et non. Que l'histoire est écrite par des étrangers. L'histoire d'Algérie est écrite par des Français en particulier par des Allemands, des Anglais, des Américains qui ont écrit sur la Guerre d'Algérie. Mais, il y a aussi des Algériens qui ont écrit sur l'histoire de la Guerre d'Algérie et plus à partir des archives locales ou archives déposées en France. Je rappelle que le problème qui se pose, c'est que beaucoup de ces archives de fonds ne sont pas accessibles.
Les archives militaires sont des archives qui sont prises sur l'Armée de libération nationale (ALN). Donc, on ne peut y accéder que si nous possédons des autorisations spéciales, délivrées par les autorités gouvernementales françaises. Le problème, c'est aussi pareil chez nous. Il y a des archives de l'ALN et du Gpra qui ne sont pas accessibles aux chercheurs algériens. On ne peut pas jeter la pierre que d'un seul côté. Mais, il faut voir des deux côtés. Comment faire en sorte, aujourd'hui que ces archives sont réglementées par la loi en plus des règlements intérieurs, inaccessibles, non seulement aux chercheurs, mais à tous les citoyens? Les archives c'est un domaine public, ce n'est pas une propriété de l'Etat.
Qu'en est-il de l'intérêt de la repentance de la France et ce, en réponse aux appels successifs sur le sujet?
Pour moi, c'est une fausse piste et une fausse issue. La question de la relation entre l'Algérie et la France a été réglée depuis l'Indépendance. Cela est un premier aspect. Maintenant, la question de la repentance est soulevée par des institutions officielles et gouvernementales. Le problème du pardon et des relations est un domaine qui relève de l'Histoire. Cela ne règle pas le problème. On s'est battus contre les colons français et ils sont partis.
Le dédommagement, c'est l'Indépendance nationale.
De quoi souffre réellement l'histoire de l'Algérie?
L'histoire de notre pays souffre des porteurs de mémoire. Ces porteurs de mémoire se considèrent comme les seuls habilités à parler de l'histoire de l'Algérie. L'histoire de l'Algérie appartient à tous les citoyens algériens.
Chaque citoyen a le droit d'écrire et de recueillir la mémoire de ce qui s'est passé. Donc, il n'y a pas quelqu'un qui soit plus habilité que l'autre pour défendre les valeurs, les symboles et les figures algériennes. Chaque Algérien est concerné. Le fait de consacrer la chose et de faire en sorte que l'institution soit le gardien du temple, ça fausse la réalité.
Quel est au juste votre point de vue, en tant qu'historien, sur la qualité de l'enseignement de l'histoire dans le secteur de l'éducation nationale?
Ecoutez, le problème qui se pose, c'est que le secteur et les départements qui se chargent du manuel scolaire, ne s'appuient pas sur la recherche historique. Ils font appel à des personnes ou à des institutions officielles du parti unique au départ, puis les partis dominants des institutions gouvernementales qui, aujourd'hui, ne représentent pas la volonté nationale. Il y a des travaux de recherche qui sont extrêmement importants. Il y a des textes originaux qui ont été publiés. Il y a des articles écrits par des historiens, des dirigeants de la Révolution algérienne qui pourraient faire partie du manuel scolaire nationale. Or, tout cela n'existe pas pour l'instant. Je pourrais vous envoyer même des sujets posés lors d'un examen du baccalauréat. C'est un scandale sans nom.
Les erreurs commises à l'encontre de la réalité. Les contresens historiques, etc. C'est tellement gros qu'on ne peut imaginer de poser de telles questions à des élèves de la classe terminale. Alors, où sont-elles les commissions scientifiques qui sont chargées de vérifier au moins la véracité et la validité des chronologies et biographies des personnes? Où sont-elles ces commissions chargées de la description d'événements essentiels historiques et de l'histoire contemporaine de l'Algérie? il n'y en a pas.
On se retrouve dans des comités et en face de gens qui se considèrent comme des spécialistes de l'histoire, alors qu'ils n'ont même pas les validations académiques pour pouvoir faire ce travail de très grande responsabilité historique. Donc, il y a une sorte de divorce entre l'Education nationale et la recherche historique. Il y a une exclusion des historiens dans la participation à l'élaboration du manuel scolaire national.


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