Ce débrayage pourrait devenir national et illimité. La grève des 4000 travailleurs du complexe Snvi de Rouiba s'est poursuivie hier encore. Depuis samedi dernier, elle paralyse cet important pôle des industries mécaniques du pays, et commence à être connue de l'opinion publique nationale. En effet, au cinquième jour de son déclenchement, les différentes entrées du complexe, bien que savamment verrouillées sur ordre de la Direction Générale, sont de plus en plus harcelées par les reporters de la presse nationale, venus s'informer de l'évolution de la situation et notamment de celle des pourparlers entre la Direction de l'entreprise et le partenaire social. Mais, un black-out total est maintenu sur ces négociations engagées entre les deux parties dès le déclenchement du conflit au sein de l'entreprise. Seules quelques bribes d'information sur la teneur de ces tractations circulent chez les grévistes auprès desquels nous avons pu y accéder malgré les interdits de la Direction et la surveillance des agents de la Sogiss, un sous-traitant de la sécurité auprès de la Snvi. Subséquemment, il apparaît que les pourparlers entre les deux parties progressent à un rythme de tortue. Les propositions d'augmentation de salaire de la Direction générale seraient ainsi passées de 625 DA à 1100 DA. Une information non confirmée auprès des deux protagonistes de la négociation qui se terrent dans un silence inexpliqué. Et, même cette relative progression n'est pas du tout prise au sérieux par les travailleurs qui réclament leur 2000 DA ou tout au moins un montant qui s'en approche. Ils l'ont, d'ailleurs, fait savoir à certains de leurs représentants syndicaux venus les informer du déroulement des pourparlers et du virement de leur paie de ce mois avant les fêtes de l'Aïd. En outre, pour les grévistes tout ceci n'est que «manoeuvres et fourberie de la Direction» ils ont demandé à leurs représentants de ne pas focaliser uniquement sur le volet financier mais aussi sur le statut particulier de certaines unités de travail comme la forge ou la fonderie. Autrement dit, les négociations semblent serrées, et une issue rapide pour ce conflit de travail n'est pas du tout évidente, surtout, si l'on se fie aux rumeurs qui commencent à circuler dans les rangs des grévistes et selon lesquelles la grève pourrait devenir à la fois nationale et illimitée. Encore plus grave certains grévistes ont laissé entendre qu'il pourraient sortir dans la rue à partir de la semaine prochaine au cas où leurs revendications ne seraient pas satisfaites. Pourtant, cette radicalisation rampante d'un conflit pouvait facilement être évitée, d'abord, parce que la revendication d'une augmentation de salaire de 2000 DA semble dérisoire par rapport à celles déjà accordées dans d'autres secteurs (Algérie Poste, Education nationale), ensuite, parce que le syndicat de l'entreprise, affilié à l'Ugta, et actuellement donnant l'impression d'être en dehors du coup, n'a pas su ou n'a pas pu concrétiser rapidement les derniers résultats de la récente tripartite, dont le volet de cette révision de la convention collective de l'entreprise que ne cessent de revendiquer depuis trois ans les travailleurs aujourd'hui en grève. Et c'est là que réside l'exaspération de ces derniers et partant l'exacerbation et la multiplication de ce genre de conflits sociaux.