Quand l'imaginaire passe de la littérature au cinéma Une conférence animée samedi dernier dans l'enceinte de la Safex et développée devant un public rarissime faute de communication sérieuse et avec une déprogrammation de dernière minute. Quand une hôtesse du salon est censée vous orienter et le fait mal, que reste t-il? La chaleur aidant et faire le tour du salon en courant s'avère par conséquent ardu et digne d'un tournoi de marathon. Ainsi, les différents animateurs de cette conférence ont tout de même donné leur communication devant une salle quasiment vide comme le sont la plupart des conférences auxquelles on a assisté depuis le début du Sila. Une situation regrettable qui rompe avec l'image de dynamisme des conférences bien vivantes des années précédentes. Où est le public? la question reste posée. Sans doute fatigué, à arpenter les artères immenses de la Safex pour se faire entendre dire à la fin: «Madame, ce n'est pas ici, le programme a changé, faut aller dans l'autre salle...». Et le temps passe allègrement... Mais passons! Prenant la parole en premier, le journaliste irakien Rachid Arfan dira que les Irakiens n'ont commis aucun crime si ce n'est d'être irakiens justement. Pour le plasticien, l'artiste arabe est devenu «folklorique ne reflétant aucunement l'actualité de son temps». Pour le réalisateur de Nahla Farouk Beloufa dont on a été surpris de le voir ici vu qu'il ne figure pas au programme et c'est tant mieux qu'il soit là finalement, «la séparation que tendent de faire certains entre documentaire et fiction est une illusion» a-t-il tenu à souligner au départ. Et d'ajouter: «Ce qui est important c'est de savoir comment impliquer les personnages dans une histoire, un processus car le cinéma aujourd'hui est arrivé à maturité. Cela implique le droit qu'on accorde à l'imaginaire, car dira-t-il un peu plus loin «le cinéma c'est l'art de la manipulation». Pour Rachid Arfan le cinéma irakien a toujours été marqué d'une «déformation de l'image brouillée et ce jusqu'à la chute de Saddam Hussein en 2003», arguant qu'il y a une différence entre le cinéma qui se fait à l'intérieur et à l'extérieur de Baghdad bien que celui-ci souffre aussi du danger et est basé surtout sur la politique et le vécu des Irakiens. Rachid Arfan qui condamnera les dépassements qu'a vécus le monde musulman suite à la vision du film Innocence of Islam s'est demandé pourquoi nous ne sommes pas capables de réagir autrement, c'est à dire «avec intelligence intellectuelle et respect». Pour le réalisateur de Zabana! Said Ould Khelifa il est difficile de ne pas être d'accord avec Farouk Beloufa mais se dit ne pas partager son point de vue car «au lieu d'opposer le documentaire à la fiction, je préfère faire un parallèle entre les deux. L'un est venu pour faire de la propagande..» Et de renchérir: «Zabana est parti d'un fait divers. On en a fait une fiction. Mais sommes-nous cinéastes du tiers? Je dirais, condamnés à ne pas rêver, à faire des constats sociaux... je me considère cela dit, chanceux car depuis 1988 la censure nous a oubliés et cela revient au peuple qui a instauré ces nouvelles règles du jeu..» De son côté, le critique de cinéma et président de l'association «A nous les écrans», organisateur des Journées cinématographiques d'Alger, Salim Aggar, s'est demandé quelle aurait été l'image d'un film western si c'était l'Indien qui avait pris la caméra. Pour notre conférencier, Hollywood s'est toujours évertué à glorifier son pays et son armée et ce à la sortie de la Première et Seconde Guerre mondiale mais ne saurait pas faire des films sur sa défaite face au Vietnam. «Le cinéma de la révolution est une politique d'un Etat comme aux USA...». Evoquant l'Algérie, il dira qu'environ 90 films ont été faits depuis 1966 à nos jours sur la Guerre d'Algérie. A l'arrivée des années 2000, les sujets ont changé de champ. «Le politique s'est remis à financer et subventionner des films sur la Guerre d'Algérie, notamment Benboulaïd. Salim Aggar posera la problématique de l'Union des cinéastes arabes invitant les réalisateurs algériens à faire des films notamment sur la guerre en Palestine, en Irak. ou au Liban notamment. Pour Saïd Ould Khelifa c'est le cinéma français qui capitalise le plus de films sur la Guerre d'Algérie. «Si aujourd'hui on a plus de liberté de traitement, le public, lui, manque souvent d' informations.» Et de se demander «comment faire aujourd'hui un film historique tout en restant dans le dialogue positif et non pas négatif». Aussi, tiendra-t-il à souligner enfin: «Zabana! n'est pas un film sur un symbole mais pour condamner le colonialisme. Avant on disait un seul héros le peuple. Aujourd'hui, tous les films historiques portent un nom, cela veut dire qu'on peut faire des films histochimiques vus sur un plan humaniste..»