Il est de notoriété publique de voir le mouvement associatif se métamorphoser en vaste magma politique à l'approche de l'élection présidentielle. Les services spécialisés du ministère de l'Intérieur sont en train de «voir de près» l'activité de dizaines, voire de centaines d'associations à caractère social et culturel ou sportif, et qui «semblent avoir dérivé vers l'activisme politique pur», à l'approche de l'élection présidentielle. Selon des sources au ministère de l'Intérieur, «il ne sera toléré à aucune association de se détourner de ses missions et de faire fi de ses statuts constitutifs pour faire de la politique». Le motif de cette opération, menée en douce en direction des associations, est le «débordement total de toutes les activités sociales vers le soutien à des personnalités politiques par le biais de réunions, conférences et manifestations». L'opération qui s'inscrit dans le cadre de suivi et de contrôle des activités des associations gérées par l'Intérieur et les Collectivités locales doit, en principe, veiller au strict respect des lois sur les partis et les associations, mais on peut aussi, en toute légitimité, se poser la question de savoir pourquoi, en ce moment précis, pareille opération est entreprise, alors que beaucoup, si ce n'est le plus important, a été déjà fait, c'est-à-dire que les associations, qui vont appuyer tel ou tel candidat à la présidentielle ont déjà mobilisé le gros de leurs troupes et choisi leur camp. Mieux encore, la fameuse réunion initiée par les «redresseurs», clan pro-Bouteflika au sein du FLN, qui a été organisée à Djelfa, l'a été sous le couvert d'une association culturelle locale, et ce, au vu et au su de toutes les autorités chargées aujourd'hui de gérer les associations. C'était bien cette petite association inconnue à 1000 mètres de son siège, que la grande réunion des pro-Bouteflika a été rendue possible, et à aucun moment il ne fût question de prendre des sanctions contre cette association qui a servi de cheval de Troie au clan des «redresseurs». Le mouvement associatif, en Algérie, reste toujours rattaché aux partis politiques, et il n'est pas exagéré de dire qu'aujourd'hui, il est difficile de trouver un syndicat, une association à caractère social, un mouvement estudiantin ou une action de corporation ou d'utilité publique, qui ne soit «connecté» à des personnalités politiques. Entre 1994 et 1998, alors que les groupes armés étaient au faîte de leur force de frappe alors que les partis politiques étaient en «hibernation» c'est vers ces «associations à caractère culturel, social ou sportif» que les autorités algériennes se sont tournées dans une tentative désespérée de faire pièce à la stratégie anti-pouvoir qui s'installait jour après jour. «Mettre à contribution le mouvement associatif» avait été, à l'époque, toute une stratégie mise en place pour «faire travailler» ces associations qui bénéficiaient des largesses de l'Etat. De 1991 à 2001, 8 700 milliards de centimes leur avaient été octroyés par le Trésor public. Aujourd'hui, les associations, surtout celles, très fortes, implantées à Alger, Oran, Annaba et les grandes villes du littoral méditerranéen, ont été, à ce point, «mouillées» dans le jeu politique pour en être écartées facilement.