Sans exécution d'une décision de justice, il n'y aura jamais, au grand jamais un Etat de droit! Trois jeunes sont en taule pour être opposés à une opération de police concernant une expulsion des lieux décidée par la justice. Les inculpés ont donné du fil à retordre au président qui en a vu et entendu d'autres, avant de reprendre en main les débats qu'il a voulu sereins, francs. A chaque tentative de diversion, Baric Rabah a su freiner les ardeurs des jeunes dont les trois avocats ont tenté de balancer de gros seaux d'eau sur le brasier: inculpations. Il faut dire que dans ce cas d'espèce, la rébellion se marie aux cris, aux exclamations, aux protestations, aux dérapages verbaux lorsque ce n'est pas carrément un déluge d'insultes et d'injures qui n'ont pas de place dans ce genre d'opérations. Malek Drissi, le représentant du ministère public avait, pour «goudronner» la route du juge, posé de nombreuses questions relatives aux faits et uniquement les faits. «A l'arrivée des policiers, vous aviez fait quoi?» dit Drissi en direction du premier inculpé, lequel a dit son aversion pour la hogra: «On m'a injurié, on m'a bousculé, on m'a humilié!» avait-il martelé avant que le juge du siège ne passe aux deux autres inculpés dont les avocats avaient tenu à mettre les points sur les «i». Il y a eu aussi des larmes et beaucoup d'émotion en réévoquant l'expulsion des familles. «Oui, les poursuites sont justifiées mais il faut impérativement revenir au pourquoi!» a lancé Maître Chourar qui verra et entendra le juge dire: «Non, Maître. Rien ne justifie la violence. Et si le tribunal décèlera les circonstances atténuantes, il ira sans état d'âme!» tranche Hadj Rabah Baric qui tiendra les rênes des débats comme il l'a voulu, comme la loi le veut, ni plus ni moins. Il a aussi réussi à calmer tout le monde. Maître Yaïche de Blida a suivi l'attitude du juge, attendant le moment de sauver les meubles de son client. Les trois plaideurs pour les trois détenus consacreront l'essentiel de leurs interventions au laxisme des services de l'administration, «coinculpés» au même titre que les inculpés poussés à la révolte par la mollesse desdits services. Maître Liès Chourar s'écriera que les aveux de son client sont la preuve par neuf du remord ressenti et surtout sa demande pressante de pardon aux personnes et à la société qu'il a éclaboussées. Selon l'avocat, le délit y est et son client est prêt à accepter le verdict du tribunal sans broncher. «Ce fils d'une honorable famille de la région est à neuf jours de son mariage alors qu'au moment des faits il en était à 19!! Il était hors de lui face aux gendarmes et il ne savait pas ce qu'il disait y compris les propos orduriers proférés malheureusement.» «La démence passagère a aussi été évoquée par le conseil qui a regretté que son client n'ait pu se maîtriser et depuis, il regrette amèrement son geste et son attitude. Il fait la remarque autour de la virginité du casier et surtout son mariage la semaine prochaine, qui demeure aux yeux d'Allah, la moitié de la religion», a articulé le défenseur qui a conclu par le souhait de voir le tribunal être indulgent avec les inculpés. Lui succédant, Maître Yaïch s'était résolu pour les deux frères détenus à dénoncer avec force l'agressivité des forces de l'ordre et donc outre le fait que la loi n'ait pas été respectée par l'administration puisqu'aucune mise en demeure n'avait été dressée aux citoyens soit-disant irrespectueux de la loi en aménageant des constructions illicites, il y a eu cette véritable «charge» des gendarmes venus utiliser la force pas le dialogue. «Cinquante ans d'indépendance, et on est encore aux constructions illicites par la faute de la bureaucratie et de la corruption», s'était offusqué l'avocat de Blida qui a martelé que la construction de l'Etat de droit commence par le respect vis-à-vis des autoconstructeurs à qui on aurait pu demander de prendre leurs dispositions et cesser les travaux, ramasser leurs effets surtout que les faits s'étaient produits à 70 m des familles incriminée. «C'est insupportable comme situation, oui, monsieur le président, c'est franchement insupportable, car vous constatez les dévastateurs dégâts et énormes préjudices moraux causés à toutes les parties y compris aux éléments des services de sécurité», a conclu Maître Yaïch qui laissera le soin au dernier plaideur de s'occuper du troisième détenu qui se trouvait très mal, assis au box avec la permission du président dont il faut saluer la centaine de qualités qui font que nous ne cesserons jamais de louer la justice avec des «Baric» de tout acabit! L'avocat prit vite la résolution de promettre au juge de ne pas faire long: «M.le président, vu que vous aviez vraiment instruit le dossier où plusieurs points sombres avaient été éclairés, je ne dépasserai pas le temps raisonnable», a dit le jeune conseil qui s'était surtout appliqué à «expliquer» les provocations commises qui ont pourri la situation: «L'administration a été défaillante. Rien n'avait été entrepris pour avertir les familles de la décision de déloger ces gens qui ont mal accepté les faits», a expliqué encore une fois le plaideur qui a réclamé beaucoup de circonstances atténuantes en direction de ce jeune qui a vu le ciel lui tomber sur la tête, surtout à quelques jours de l'arrivée des grandes pluies, du mauvais temps, d'une météo exécrable». «Imaginez ces familles dehors par un grand froid», articule le conseil qui avait entendu les trois détenus prononcer le traditionnel dernier mot qui sera, pour le deuxième inculpé: «Laissez-moi rentrer chez moi, attendre mon épouse!». Les rires avaient dégelé l'atmosphère et tout comme Malek Drissi, le procureur qui avait eu la main lourde lors de ses demandes, Hadj Rabah Baric avait souri cinq secondes avant d'annoncer la mise en examen du dossier et passer à un autre dossier aussi lourd: «Conduite en état d'ivresse. Destruction de bien d'autrui et...état de fuite.» Brrrr!