Les juges demandent la consécration de l'indépendance de la justice dans la prochaine révision de la Constitution. La lutte contre la corruption est une mission difficile dans une société gangrenée par le fléau. L'aveu fait, hier, par le président du Syndicat national des magistrats, Djamel Laïdouni, est significatif à plus d'un titre. «Il n'est pas facile de lutter contre la corruption», a-t-il déclaré en marge de la rencontre régionale organisée par le Syndicat au niveau de la cour d'Alger. M.Laïdouni qui a indiqué qu'il faut lutter contre ce phénomène, a ajouté que «la corruption est là, mais on ne peut pas engager des actions sans qu'il y ait des plaintes déposées devant les juges». L'orateur a plaidé pour plus de formation pour les juges afin de lutter plus contre la corruption ainsi que de leur donner les moyens nécessaires pour accomplir ce travail. Concernant les grands dossiers de corruption, on accuse souvent la justice, quand elle intervient pour traiter l'affaire, d'être actionnée par des ordres venant de parties extérieures. A cette question, le président du syndicat a répondu qu'«on ne peut pas ramener une personne accusée de corruption pour la juger sans preuves matérielles». La rencontre d'hier a été consacrée à l'étude des préoccupations socioprofessionnelles des juges et des recommandations de la réunion du conseil national du syndicat. L'une des plus importantes recommandations est l'indépendance de la justice. Les juges demandent la consécration de cette indépendance à l'occasion de la prochaine révision de la loi fondamentale. «On demande l'indépendance de la justice depuis plus de 20 ans. Cette indépendance doit être arrachée par les juges, car personne ne la donnera. Quand l'Algérie a pris son indépendance, elle ne l'a pas demandée à la France», a indiqué un magistrat intervenant dans le cadre des débats. Aussi, le syndicat des magistrats demande à revoir la composante du Conseil supérieur de la magistrature, de sorte à ce que le pouvoir exécutif n'y soit représenté par aucun membre. Le syndicat veut que le ministre de la Justice (représentant du pouvoir exécutif) qui occupe actuellement le poste de vice-président du Conseil ne soit plus membre du conseil. Le Conseil supérieur de la magistrature est, faut-il le souligner, présidé par le président de la République en sa qualité de premier magistrat du pays et de président de tous les pouvoirs. Pour le poste de vice-président, certains magistrats veulent qu'il revienne de droit au président de la Cour suprême. D'autres veulent qu'il soit un poste électif. Le syndicat demande également le rattachement de l'instance de l'inspection au Conseil supérieur de la magistrature et une indépendance matérielle. Les juges ont évoqué également les problèmes socioprofessionnels de la corporation tout en répondant à ceux qui les accusent de corruption et d'incompétence. «Personne n'a de leçon à nous donner en matière de droit», a indiqué M.Laïdouni. Ils demandent un régime indemnitaire à l'instar des autres corporations. L'un des intervenants a décrit une situation sociale déplorable des magistrats. Selon lui, le juge est délaissé socialement. «On n'a pas de vie sociale», a-t-il résumé.