Couronnant ses 30 ans de carrière, l'artiste accompagnait ses chansons de notes d'humour et de gaieté. Un mec bien, qu'il est... Trente ans de carrière et un superbe coffret de chansons, cela se fête! Et faute d'une tournée nationale, Djamel Allam anima deux concerts, mercredi et jeudi dernier à la salle Ibn Zeydoun. Dans une salle comble et devant un public composé de la vieille - nostalgie oblige - comme de la jeune génération de l'Oref, Djamel Allam s'évertua durant deux heures à donner beaucoup de bonheur aux gens. Au milieu d'un décor coloré signé Larbi Arezki, fait de quelques chèches suspendus çà et là et d'une petite table sur laquelle étaient disposées des oranges, des pommes et des bananes ainsi que de l'eau pour rafraîchir les cordes vocales de l'artiste, Djamel Allam était le roi sur scène. Il était aussi accompagné du chef d'orchestre Nasredine Delil, flûtiste et leader du groupe Mougar (souvenez-vous du concert de Bledstock l'année dernière) et de ses musiciens compagnons de 15 ans de vaga dans le monde, à savoir, le Corse Jean-Michel Palauzio, à la guitare l'Italien Rosalio Ricobono à la basse, Thierry Rock au clavier et à l'accordéon, Nacer Sellami et Dahmane Khalfa aux percussions. Chanteur mais aussi poète, sarcastique et ironique, Djamel Allam se plaît à raconter l'histoire de la création, le contexte de certaines chansons, il se fait conteur ou amuseur de foule. Humble et modeste, il aime communiquer avec son public, celui-ci le lui rend bien car l'artiste est avant tout un mec bien, drôle et généreux. L'on chante, on reprend en choeur le morceau, on tape des mains et on rigole un bon coup. Tout cela pour le prix symbolique de 200 DA la place. C'est donné, et c'est voulu par l'artiste qui se veut accessible à tous et notamment aux chômeurs et aux étudiants. Burnous blanc sur les épaules, Djamel Allam trône au milieu de la scène lorsqu'on entend en off et de sa voix, le texte Vos enfants. Un début solennel, il entame son tour de chant par une balade, une complainte dédiée à «dadda» et les conditions malheureuses des . «Le «couscous clan» est le nom du groupe» fait remarquer en plaisantant Djamel Allam. La suite du répertoire est un enchaînement de chansons plus ou moins connues. La vie, la femme, l'exil, autant de thèmes qui importent à l'artiste qui revendique à fond la chanson à texte, la musique engagée. En effet, si la forme est bien entraînante ou remuante, le fond laisse à méditer. Il en est ainsi avec Argu, chanson qui traite de la mal vie des émigrés et leurs rêves pour s'en sortir. Il nous est rappelé à notre mémoire le valeureux Hsissen de l'époque de l'association Nord-Africaine dont il reprendra son célèbre Tir el kafs. Un hommage est également rendu au grand Léo Ferré à travers L'âge d'or, chanson qu'il dit «utopiste» mais nécessaire. Le chanteur kabyle sert en cette première partie du spectacle un pot pourri de ses plus belles chansons, Cousteau, Arjouth, Trabendo, Nomad's land... Seul, il est juste soutenu par la beauté mélodique d'une flûte maniée avec talent par Nasreddine Dellil. D'une anecdote à l'autre, cette découverte: le jeune Idir, timide à ses débuts avait proposé à Djamel Allam d'interpréter Avava Inouva, celui-ci refusa car il estima qu'Idir avait toute les capacités pour la chanter. Quand l'artiste se lâche, il troque pour un moment sa guitare pour la percussion et joue pour changer avec ses camarades les musiciens. C'est une avalanche de rythmes, kabyles puis laâlaloui, dans le même esprit que l'ONB. Djamel Allam promet encore plus de surprises en deuxième partie. Il est en compagnie d'une chorale dont certains viennent de Nagham. Un autre flûtiste, Mourad, rejoint Nasreddine Dellil sur le morceau Ouretsrou, première composition de Djamel Allam, qui sera suivie de Jaouhara, un hymne à Alger la Blanche. La gaieté et la fraîcheur réunissent ces musiciens pleins de fantaisie qui marqueront chacun sa particularité par un solo ou une chanson aux couleurs de la Méditerranée. Kateb Yacine, Tahar Djaout, Rachid Mimouni, Alloula, Maâtoub Lounès...autant de personnalités disparues tragiquement que Djamel Allam a voulu marquer, à jamais, leur présence parmi nous. Afoussiou autrement dit «Donne-moi la main» traduit toute la symbolique de l'intention. «C'est une belle chanson», dit quelqu'un dans le public, «la musique est belle», dit un autre dans la salle. Quelques allumettes et briquets s'allument. Après le recueillement, place de nouveau à la fête et à la joie de vivre avec Tella, Alho et enfin Mara diyoughal pour clore en beauté la soirée. Jeudi, Samir de Triana d'Alger et Lamari notamment étaient les invités de Djamal Allam. Soutenus par le ministère de la Communication et de la Culture en collaboration avec le centre culturel français, ces deux concerts couronnent une carrière riche en mélodies et en émotions. Une carrière qui ne compte pas s'arrêter là, puisque Djamel Allam comme tous les artistes rêveurs, a plein de projets en tête. Yemma Gouraya, son dernier album est par ailleurs disponible chez Belda Diffusion. Chansons du bonheur, chansons pour toujours...