En quarts de finale, les Verts devront avoir un tout autre mental. C'est fou ce que le football peut transformer les gens. Ce match contre le Zimbabwe avait de l'importance dans la mesure où la qualification des Verts aux quarts de finale de la CAN n'était pas assurée. Il a, malgré tout, attiré moins de monde que lors des confrontations contre le Cameroun et contre l'Egypte. Ce public là s'était déplacé pour concrétiser un rêve et poursuivre une fête qu'il avait entamée depuis plus de dix jours. Pour lui plus rien de grave ne pouvait arriver à ses favoris du moment qu'ils avaient passé avec succès les deux examens du Cameroun et de l'Egypte autrement plus difficiles que celui du Zimbabwe. C'est pourquoi il était venu une nouvelle fois dans le stade de Sousse car il voulait être près de son équipe et la soutenir. Mais ce public-là, entièrement acquis à la cause des Verts, évolue au gré des circonstances. C'est ainsi qu'en s'apercevant que ses favoris se dirigeaient vers une défaite il n'a pas hésité un seul instant à leur tourner le dos et à les huer. Il s'est mis aussi à critiquer le staff technique de l'EN et un homme comme Charef en a entendu des vertes et des pas mûres. Enfin, lorsqu'en fin de match, il se tourna vers la tribune de presse et qu'il apprit que, malgré sa défaite, son équipe était qualifiée il s'est mis à crier et à chanter tout en tressant des louanges aux joueurs. Ainsi va la vie avec les supporters du club Algérie qui passent du degré le plus élevé en matière de soutien à celui le plus vil quand il s'agit de s'attaquer à son prochain. Ils avaient simplement oublié que cette équipe qu'ils soutiennent venait du néant et qu'elle venait d'accomplir un véritable miracle en se qualifiant pour les quarts de finale de la CAN. Il faut se mettre à la place des Egyptiens venus en Tunisie avec des ambitions grandes comme ça, qui s'étaient préparés en conséquence avec 25 matches amicaux au compteur et qui au final se retrouvent au tapis dès le premier tour face à cette équipe d'Algérie qui n'avait eu qu'un seul match amical dans les jambes avant de venir en Tunisie. Une équipe d'Algérie dont les responsables n'avaient jamais dit qu'elle avait pour objectif de passer au premier tour, prenant en compte les faiblesses de notre football et le fait que cette équipe était composée essentiellement d'éléments jeunes manquant d'expérience du haut niveau. Elle a compensé ce double handicap par une volonté et un courage qui ont fini par saper le moral des Camerounais et des Egyptiens qui, sans aucun doute, pensaient ne faire qu'une bouchée d'eux. Les deux très bons résultats obtenus face à ces deux équipes ont fait croire aux gens que l'écueil du troisième match de poule n'allait constituer qu'une simple formalité pour les Verts. Du reste, n'a-t-on pas appris que du côté du pays, des supporters ont défilé, le soir de la victoire contre l'Egypte, en scandant que le trophée ne pouvait échapper à l'équipe d'Algérie? La démesure dans le sport n'a pas de limite et on se souvient qu'après la victoire de Verts contre les Allemands en 1982, des fans prétendaient que la coupe du monde serait algérienne. Il y a que ce troisième match de poule contre le Zimbabwe était aussi important que les précédents car la qualification pour les quarts de finale de la compétition n'était pas assurée. Il aurait fallu aux Verts qu'ils l'abordent dans les mêmes conditions psychologiques que face au Cameroun et à l'Egypte. Or depuis la sortie victorieuse contre les Egyptiens, il semblerait qu'il y ait eu une sorte de décompression fatale pour le groupe des joueurs algériens. Toute la concentration axée sur la compétition s'est disloquée. Les raisons? La joie débordante inhérente au succès, l'euphorie des supporters, la fête de l'Aïd El-Adha et certainement une certaine suffisance qui leur a fait croire, malgré les mises en garde de leur staff technique, que l'équipe du Zimbabwe n'était absolument pas à craindre. Ajoutons, également, les errements de ce même staff technique qui a joué avec le feu en procédant, au nom du «turn over» (faire tourner l'effectif c'est-à-dire faire jouer tout le monde), à des changements qui se sont avérés inopportuns. Rabah Sâadane et ses adjoints passent leur temps à expliquer, aux représentants de la presse qui les questionnent, que dans leur effectif il n'y pas de titulaires et de remplaçants. Le match contre le Zimbabwe a apporté la preuve qu'il y a bien un groupe capable d'apporter le plus dont l'équipe nationale a besoin et un autre dont le rôle ne peut que consister à faire banquette. Au bord du terrain, c'est peut-être dur de l'admettre mais c'est la réalité du football où des joueurs sont meilleurs que d'autres lorsqu'il s'agit d'aller vers un objectif. Il est inutile de se voiler la face pour ne pas reconnaître que les joueurs du championnat national accusent un trop grand retard. D'ailleurs, même en n'évoluant pas dans de très grands clubs européens, les émigrés ont, au moins, la rigueur que ne possèdent pas les joueurs locaux. Ne pas accepter un tel fait aussi évident que le nez au milieu du visage reviendrait à croire que notre football est au sommet de la hiérarchie mondiale, donc à se leurrer. Le staff technique des Verts a pris une sacrée leçon lors de ce match contre le Zimbabwe et gageons que pour les quarts de finale il réfléchira à deux fois avant de composer le onze rentrant. Maintenant si l'EN venait à échouer au prochain tour, il n'y aura pas de quoi en faire un drame sachant qu'elle en a déjà trop fait en se qualifiant dans un groupe qui comprenait, tout de même, le Cameroun et l'Egypte, deux des plus gros calibres du football africain. Mais elle devra, malgré tout, se battre pour défendre ses chances sachant qu'un match reste un match avec son lot de surprises. Le stress des fans algériens n'est, peut-être, pas fini.A. A.