Plus que jamais la ville de Kidal constitue le problème majeur au nord du Mali Le président intérimaire, Dioncounda Traoré, notait lui-même le 14 mai que «si ces élections sont ratées, elles vont créer encore plus de problèmes». La confirmation de la tenue de la présidentielle fin juillet a été plutôt bien accueillie au Mali, mais de fortes inquiétudes subsistent sur le statut de Kidal, ville du Nord toujours occupée par les rebelles touareg avec la bienveillance de la France. Le Conseil des ministres a confirmé lundi à Bamako la date du 28 juillet pour le premier tour du scrutin, sous la pression de l'ex-puissance coloniale française qui intervient militairement au Mali depuis le 11 janvier aux côtés d'armées africaines contre les jihadistes ayant occupé tout le nord du pays. Jusqu'alors, juillet était un but à atteindre, mais des hommes politiques et observateurs maliens jugeaient l'échéance trop proche, s'interrogeant sur les conditions de vote des quelque 500.000 réfugiés et déplacés par le conflit, la sécurité dans le Nord où des attentats ont encore eu lieu récemment et la persistance de profondes divisions ethniques exacerbées par l'occupation jihadiste des deux tiers du pays pendant presque toute l'année 2012. Le président malien par intérim Dioncounda Traoré, désigné à la suite d'un coup d'Etat ayant renversé le 22 mars 2012 le président élu Amadou Toumani Touré, notait lui-même le 14 mai que «si ces élections sont ratées, elles vont créer encore plus de problèmes». Mais l'insistance de la France, qui se voulait «intraitable» pour un scrutin en juillet, et les promesses d'une aide considérable de la communauté internationale de 3,2 milliards d'euros au Mali, semblent avoir eu raison des réticences: la quasi-totalité des partis politiques maliens ont fini par l'accepter. «Cette pression, on la comprend, car tout le monde est d'avis que le gouvernement actuel ne peut pas régler les problèmes», note Gilles Yabi, d'International Crisis Group (ICG) à Dakar, «mais il semble que la date elle-même était plus sacrée que la tenue d'élections crédibles». Il dit ne pas être «convaincu» de la possibilité d'un tel scrutin «crédible», citant les difficultés pour finaliser à temps le fichier électoral et distribuer de nouvelles cartes d'électeurs, l'absence de réconciliation et l'incertitude qui entoure la situation à Kidal. Cette ville du nord-est du Mali est occupée par la rébellion touareg du Mouvement national de libération de l'Azawad (MNLA) et ses alliés, qui y sont revenus à la faveur de l'intervention de l'armée française. Les rebelles touareg, indépendantistes devenus officiellement «autonomistes», s'opposent pourtant à la présence de l'Administration et de l'armée maliennes à Kidal. Les troupes françaises contrôlent toujours l'aéroport de la ville et collaborent avec le MNLA, jugé par l'écrasante majorité des Maliens comme le principal responsable des malheurs de leur pays, puisque c'est lui qui, avec les islamistes liés à Al Qaîda, avait lancé l'offensive dans le Nord en janvier 2012. «Sans la présence de l'armée (malienne) à Kidal, il n'y aura pas d'élections, tel doit être le leitmotiv de tous les candidats à la présidentielle. Même les agents de l'Etat ne doivent pas accepter de s'y rendre sans les forces armées et de sécurité», notait lundi un éditorial du journal malien 22 septembre. Le texte adopté en Conseil des ministres le stipule bien, l'élection doit se tenir «sur toute l'étendue du territoire», un sentiment partagé par la France, comme l'a répété son ministre des Affaires étrangères Laurent Fabius mardi à Bamako: «Pour la France, il est évident qu'il ne peut y avoir deux pays dans un même pays. Les dispositions seront prises pour qu'à Kidal, on puisse voter comme partout ailleurs». Mais il n'a pas précisé quelles pourraient bien être ces «dispositions» alors que des négociations sont en cours à Ouagadougou pour tenter de parvenir à un accord sur le vote à Kidal le 28 juillet. L'attitude de la France, dont l'intervention a été unanimement saluée au Mali, suscite désormais de vives critiques à Bamako. Soumana Sacko, ancien Premier ministre et candidat à la présidentielle, va jusqu'à se demander si Paris ne souhaite pas transformer Kidal, «partie intégrante du Mali, en un protectorat français».