«Le changement ne peut pas être produit par des élections» Abdesselam Ali Rachedi, Tarik Mira et Hamid Ouazar appellent à un moratoire de trois ans sur les élections en vue de l'instauration d'une IIe République. La Campagne nationale pour la IIe République (Cndr) a été lancée, hier au siège du quotidien El Watan à Alger, à l'occasion d'une conférence de presse animée par les initiateurs du projet. Abdesselam Ali Rachedi, ancien cadre du FFS, Tarik Mira, ancien député et ancien cadre du FFS puis du RCD et Hamid Ouazar, porte-parole du Mouvement des droits et liberté (MDL) et ancien du FFS se sont alternés pour expliquer leur initiative visant l'instauration d'une IIe République. «C'est une initiative citoyenne qui s'adresse à tous les citoyens et à toutes les citoyennes. Elle est née de libres concertations entre des personnalités de l'opposition. Notre but c'est de lancer l'initiative et souhaiter qu'elle soit prise en charge par la société. Toute participation est la bienvenue», ont indiqué les conférenciers. Ces derniers se sont accordé à dire qu'il est temps pour le changement pacifique du système politique, qualifié par Abdesselam Ali Rachedi de «pervers». Hamid Ouazar a indiqué que tous les moyens seront utilisés pour sensibiliser les citoyens sur le projet. «Il faut inventer de nouvelles formes de luttes en profitant des nouvelles technologies de l'information», a ajouté Tarik Mira. Un moratoire de trois ans sur les élections Pour jeter les jalons de la IIe République, les conférenciers proposent un moratoire de deux à trois ans sur les élections. «Le moratoire n'intervient qu'à partir de l'ouverture médiatique et politique réelle pour laisser le temps à la société de s'organiser», a précisé Tarik Mira. «Le changement ne peut pas être produit par des élections», a estimé Hamid Ouazar. Et à Abdesselam Ali Rachedi d'ajouter: «Les élections organisées en Algérie ne sont pas crédibles.» Une raison de plus pour affirmer que les élections ne sont jamais un moyen de changement dans un pays où toutes les échéances électorales sont entachées d'irrégularités. «Ce délai (deux à trois ans) doit permettre aux forces politiques et sociales représentatives de s'organiser, une fois l'ouverture politique et médiatique acquise, avant d'affronter le suffrage universel», est-il expliqué dans une déclaration rendue publique, hier. Les initiateurs de la campagne pour la IIe République ont plaidé pour une refondation totale des institutions et de la pratique politique. «Il faut une large ouverture politique et médiatique, d'inspiration libérale, destinée à établir l'Etat de droit, l'égalité entre tous les citoyens, hommes et femmes, et le respect des droits de la personne humaine», lit-on dans la même déclaration. Les conférenciers plaident aussi pour la décentralisation, la séparation et l'équilibre des pouvoirs qui doivent être consacrés. «Il faut également bâtir une vraie économie productive à même de créer des richesses, mais dans le respect des droits sociaux et avec la garantie de services publics efficaces et accessibles», ajoutent-ils. Il propose, en outre, de revoir de fond en comble le système éducatif pour le soustraire à l'idéologie et jeter les bases d'une école républicaine et citoyenne. C'est cette refondation qui aboutira à terme à la naissance de la IIe République. En finir avec la gérontocratie Les conférenciers ont fait un bilan peu reluisant des 50 ans de l'indépendance du pays qui ont vu, dès 1962, se mettre en place «un régime autoritaire fondé sur une prétendue légitimité historique». «Aujourd'hui, l'Algérie est dans une impasse quasi totale et se trouve à un tournant historique. Les dirigeants issus de la guerre de Libération sont tous très âgés. Le déficit budgétaire est tel qu'il n'y aura plus, à l'avenir, de possibilité d'acheter la paix sociale avec l'argent du pétrole», ont-ils indiqué. «Le discours nationaliste et populiste, le recours abusif à l'Islam comme ressource politique, ont été les moyens utilisés pour pallier l'absence de légitimité démocratique. Les institutions ont toujours été des coquilles vides et les diverses moutures de la Constitution n'ont été qu'un cadre juridique factice, le pouvoir réel étant, pour une large part, ailleurs que dans les institutions formelles», soulignent encore les initiateurs de la campagne dans leur déclaration. Pour eux, les élections, régulièrement entachées de fraude, n'ont jamais eu d'autre but que de préserver le statu quo. Les conférenciers estiment que la République algérienne démocratique et populaire n'a été ni démocratique ni populaire et a tourné le dos aux valeurs républicaines de liberté, d'égalité et de solidarité. D'où la nécessité, pour eux, de passer à une IIe République.