L'essentiel de l'intervention de Djaballah, hier, a été une réponse au discours du président-candidat. Le président du MRN, Abdallah Djaballah candidat à la présidentielle du 8 avril, a repris à son compte la notion de «la neutralité positive de l'armée», lancée il y a quelques mois par Ahmed Taleb, lui aussi candidat à l'élection présidentielle. «Est-il concevable pour une institution aussi respectable de se taire face à l'instrumentalisation de l'administration, au monopole exclusif de la télévision, au piétinement de la Constitution et des lois de la République par le président-candidat», s'est interrogé Djaballah, hier, lors de la conférence de presse qu'il a organisée au Centre international de presse (CIP) Abdelhamid-Benzine. Affirmant que le retrait de l'armée du champ politique a toujours été une revendication de son parti «pour le bien de l'institution elle-même qui sera préservée du jeu politique ainsi que pour l'Etat», Djaballah a interpellé la grande muette pour «réagir dans le cadre d'une neutralité positive pour mettre fin aux dépassements du président-candidat». Identifiant clairement sa cible, le candidat islamiste s'est adressé à Bouteflika par une série de questions en guise de réponses: «Le peuple algérien a-t-il besoin de changement ou de continuité d'un système?», «la situation actuelle est-elle à l'optimisme?» «les libertés collectives, individuelles, les conditions socio-économiques des Algériens ont-elles changé?», s'est interrogé Abdallah Djaballah avant de clamer: «Non à la continuité, oui au changement.» C'est donc en tant qu'alternative et porteur de changement que le candidat islamiste déclare affronter le rendez-vous du 8 avril. «Nous ne participerons pas pour améliorer notre image, nous allons à la présidentielle, et derrière nous, il y a un parti implanté dans 80% des communes du pays et soutenu par des dizaines de milliers de citoyens», a affirmé Djaballah. Comme pour mettre le Conseil constitutionnel devant le fait accompli, quant à la validation de sa candidature, il indique : «Notre dossier est clean et ne souffre d'aucune irrégularité.» Très prudent, Djaballah semble inscrire son intervention dans le seul cadre que lui a délimité l'armée et exprime par ailleurs plusieurs craintes. Aussi précise-t-il que le changement qu'il compte apporter s'inscrira «dans le cadre de la Constitution» et ne fait aucune référence à la charia. «J'espère que la neutralité de l'armée sera effective et non un simple discours», ou encore «Je n'ai aucun doute que ma candidature sera validée par le Conseil constitutionnel.» Dans un entretien qu'il a accordé au journal El Ahram le 30 juin 2003, le général Lamari a déclaré que «l'armée accueillera favorablement le candidat qui sera élu par le peuple, fut-il Djaballah», une déclaration diversement interprétée mais qui prend aujourd'hui une connotation de véritable garde-fou.