C'est aujourd'hui que le Conseil d'Etat entendra les plaidoiries des deux parties rivales. Légalistes et «redresseurs», les deux blocs antagonistes, auront à enflammer un débat politico-judiciaire d'une extrême sensibilité, et ce, bien entendu, dans le cas où l'affaire ne connaîtra pas un autre report. De l'avis de tous les observateurs, le rendez-vous d'aujourd'hui constituera un tournant décisif où se dessineront les contours que prendra ce conflit. La direction légaliste qui a déposé un recours juste après l'invalidation du 8e congrès, attend du conseil à ce qu'il donne une suite favorable à sa requête. Elle met incessamment en avant la légitimité du 8e congrès «qui ne saurait être invalidé sous aucune forme légale». Selon M.Sallat, membre du bureau politique et ancien ministre de la Justice, la légalité ne peut «nous échapper, puisque nous disposons même des deux tiers du comité central issu du 7e congrès». C'est en s'arc-boutant autour de la «solidité» de cet argumentaire que les partisans de Benflis font «confiance» au Conseil d'Etat «souverain à agir». Ce regain de confiance, après les précédentes vociférations contre cette même justice qualifiée de «nuit», est incité, à s'en tenir aux explications de Sallat, par le fait que «la bévue n'émane pas de la justice mais de ses manipulateurs».Quoique «sceptiques» quant à la «neutralité» de Mme Aberkane (épouse de M.Aberkane, ancien ministre de la Santé et proche de Benflis), les «redresseurs» affirment être prêts pour la bataille. «Nous aurons le dernier mot», nous a déclaré M.Chennini, coordinateur du «mouvement de redressement». Fidèles à leur obsession, les «redresseurs» persistent à soutenir que «le FLN nous appartient». L'encouragement franc qu'ils ont eu de la part du candidat-président pèsera certainement dans la balance politique. Mais au-delà des positions des uns et des autres, qui sont, d'ailleurs, suffisamment professées, la question taraudante est de savoir l'ambiance dans laquelle se déroulera le procès. Même si les deux camps s'en remettent superficiellement à la prééminence de la justice, il n'en est pas ainsi dans le fond. Le jusqu'au-boutisme est de mise. Chacun essaye de tirer la couverture de son côté. La spirale des reports est là pour témoigner de la complication du problème. Mais aussi le Conseil d'Etat qui a largement dépassé les délais impartis afin de statuer sur le recours des légalistes. Une situation qui a été amplement profitable pour les «redresseurs» en se mêlant dans les présidentielles avec un brin de légalité du fait de la litispendance. Et à constater de visu l'implication du chef de l'Etat lui-même dans la «mêlée», reflète l'embarras auquel pourraient être confrontés les magistrats en charge du dossier.