Une rencontre-débat avec l'auteur du livre Juste Algérienne comme une tissure, d'Eveline Safir Lavalette, publié aux éditions Barzakh sera présenté cet après-midi à la librairie Chihab, (10, Ave Brahim Gharafa Bab El Oued, Alger), à partir de 14h30. «Ce livre vient d'un long silence» écrit Ghania Mouffok dans sa préface. Eveline Safir Lavalette, moudjahida d'origine européenne, ayant fait le choix, très tôt, et évident pour elle, d'être Algérienne au point d'en payer le prix fort (arrêtée en novembre 1956, elle est condamnée à trois ans de prison, torturée, abusivement internée dans un service psychiatrique), aura attendu l'âge de 86 ans pour enfin publier ces textes que l'on reçoit comme un don. Dans un registre tout à fait inédit, entre poème en prose, réminiscence, évocation, chronique des petits riens, son écriture reste inclassable. Ici, nul désir de rédiger des mémoires, de verser dans l'autobiographie, nul souci d'exhaustivité - tout est dans l'ellipse, le rythme, le mot juste et sobre. Le lecteur devra se «contenter» de bribes, de fragments, de sensations: l'enfance à Rouiba, le militantisme scout, l'engagement auprès du FLN ensuite, la prison - souvenirs glaçants, lumineux pourtant, aériens presque -, l'indépendance, Benchicao dans les années quatre-vingt-dix, l'exil, le retour à Médéa enfin. L'auteur tisse les mots de ses textes comme elle a tissé la tissure de sa vie, avec courage, gravité, intégrité, mais aussi un humour, une fraîcheur et une fantaisie qui sont sa marque. On en vient alors à se poser la question: cette forme qu'Eveline Safir a choisie - cette vision poétique, cet «ailleurs» -, ne serait-elle pas la forme la plus éloquente, la plus puissante, et peut-être la plus «vraie», du témoignage? se questionne en effet son éditeur. Eveline Lavalette, issue d'une famille vivant en Algérie depuis trois générations, naît à Alger en 1927. Dès 1955, elle s'engage pour l'indépendance de l'Algérie, côtoyant Ben Khedda, Abane, Krim Belkacem, Ben M'hidi, et d'autres. Ses activités au sein du FLN sont nombreuses: liaisons avec remises de documents, hébergement de moudjahidine, transport de matériel, impression de tracts... Arrêtée le 23 novembre 1956 par la police française, torturée, elle est libérée en 1959. À l'indépendance, en 1962, élue à l'Assemblée constituante, puis à la première Assemblée nationale en 1964, elle participe à l'étude et la mise en place du système éducatif. En 1967, elle épouse le journaliste Abdelkader Safir et mène, jusqu'à sa retraite, une carrière au ministère du Travail. Elle habite aujourd'hui Médéa.