Entre discipline, cahier des charges et pressing présidentiel, le dernier mot est tombé sur «les moindres des maux». «Nous soutenons Bouteflika, certes. Mais nous ne le faisons pas pieds et poings liés». C'est en ces termes que des sources proches de la Centrale, pour qui la décision de la CEN, qui s'ouvre aujourd'hui, ne fait plus de doute. Ceci n'empêche pas que le débat sera ouvert à la presse et que la «dizaine de cadres hostiles à cette démarche pourra défendre librement sa position». L'Ugta, qui a longtemps attendu que la classe politique lui propose une alternative recevable, qui n'a pas été très différente de l'ANP dans cette démarche, semble avoir trouvé «le vide sidéral face à elle». A l'exception de «quelques contacts stériles» établis avec de rares animateurs du «groupe des dix», rien de concret n'est parvenu à en sortir. La Centrale a ainsi laissé volontairement traîner les choses. Les buts recherchés, décrètent nos sources, étaient multiples. «Il s'agissait pour nous de prouver à tous que la discipline au sein de l'Ugta n'est pas un simple slogan puisque personne ne s'est exprimé sur la présidentielle conformément à la décision prise». Après la démonstration de force de février 2003, cette attente de plusieurs mois, a prouvé que «la force de la Centrale, qui revendique pas moins de quatre millions de travailleurs, doit être sollicitée et mise à la disposition de celui qui offre le plus de garanties». Les troupes du RND, particulièrement actives depuis quelques semaines, et largement majoritaires au sein du secrétariat national et de la CEN, n'ont guère chômé. Elles ont même réussi à prouver que «c'est plutôt la neutralité qui induirait l'éclatement de l'Ugta partant du principe que dans le cas où une décision de ce genre était prise, chacun irait faire campagne et s'exprimer au nom de l'Ugta dans le chaos le plus indescriptible». Nos sources, qui se désolent de la situation à laquelle les choses en sont arrivées, estiment que «le combat pour la neutralité n'a pas été mis sur les rails assez tôt». Elles ajoutent que «l'idée de franchir le pas n'a pas encore mûri dans les rangs des dirigeants de la Centrale, d'autant que la classe politique n'offre toujours pas d'alternatives viables». Et de conclure que «l'idée du candidat le moins mauvais, qui colle autant à la peau de Bouteflika, est encore plus vraie en 2004 qu'elle ne l'était en 1999». Sur un autre registre, nos sources confirment l'information donnée par nous en exclusivité dans une précédente édition, à savoir qu' «une sorte de sondage a été fait auprès des fédérations, des unions locales et des syndicats d'entreprises, ce qui nous a permis d'écarter définitivement le scénario de l'éclatement, de conclure que la tendance, largement majoritaire, est favorable au soutien à Bouteflika et, enfin, que ceux qui sont contre, ont tous admis que la discipline et la démocratie leur dictent de se plier à la décision de la majorité». Mais la Centrale, qui va de tourbillon en tourbillon depuis janvier 1992, et qui se trouve face à une phase cruciale de son devenir, se tourne déjà vers l'après-8 avril 2004. Même si les contours du plan d'attaque ne sont pas encore clairement définis, ils consisteront entre autres à préserver de la déprédation programmée le secteur des hydrocarbures, tel que souhaité par Chakib Khelil. «Ce serait un juste retour des choses devant l'abnégation inégalée dont a su faire montre le vieux militant Mohamed-Saïd Badreddine qui, en acceptant la discipline interne, a prouvé qu'il était un syndicaliste avant d'être militant politique.» L'homme, secrétaire national à l'Ugta et responsable de la Fédération des pétroliers, occupe par ailleurs les postes de député et de membre du Comité central au sein du FLN et est, de ce fait, demeuré fidèle à Ali Benflis dont l'élection et la candidature sont absolument légales. Deuxième, mais principale mission, décrocher absolument un Snmg de 15.000 dinars avant la fin de l'année 2006, tout en abrogeant l'article 73 bis qui a fait que les hausses précédentes, dont se gargarise Ouyahia, n'ont profité qu'à une minorité de travailleurs. La Centrale, qui va traverser une phase de turbulences dont les signes annonciateurs se feront voir à l'occasion de chauds débats qui auront lieu aujourd'hui à l'hôtel Ryad. Mais, il est vrai que l'Ugta en a vu d'autres depuis sa naissance en 1956, en passant par son rôle primordial, joué dans la nationalisation des hydrocarbures en 1971 et le sauvetage de la République en 1992.