Sans surprise, les Etats-Unis ont usé de leur veto pour bloquer la condamnation d'Israël pour terrorisme d'Etat. Encore une fois, Israël échappe à une condamnation du Conseil de sécurité de l'ONU grâce au veto usité par les Etats-Unis pour venir en aide à leur protégé israélien. Une fois encore aussi, faut-il le souligner, l'amalgame est rapidement fait par les Etats-Unis entre terrorisme et lutte de libération. Soit les Palestiniens sont des résistants qui luttent avec leurs moyens, pour libérer leur pays, la Palestine occupée par Israël, soit ce sont des terroristes et à ce moment on peut se demander à quoi riment tous ces plans de paix et autres «feuilles de route» parrainés, notamment par les Etats-Unis. Dans quelle logique se placent les Etats-Unis dans le contentieux israélo-palestinien qui interpelle la communauté internationale depuis plus d'un demi-siècle? En effet, s'il est juste, et de bon aloi, de lutter contre la menace terroriste, il est en revanche erroné de tout mettre sur le dos des Palestiniens lesquels, à ce que l'on sache, se battent uniquement à l'intérieur de leurs territoires occupés et en Israël, et ne menacent ni le monde et encore moins les Etats-Unis. L'ambassadeur américain auprès de l'ONU, John Négroponte, explique le veto de son pays par le fait que le projet de résolution présenté par l'Algérie, au nom des pays arabes et des Palestiniens, ne serait pas «équilibré» en ne condamnant pas de la même manière le «terrorisme» palestinien. En d'autres termes il fallait également condamner la résistance du peuple palestinien à l'occupation israélienne. Or, qu'y a-t-il de plus abject que les assassinats ciblés, qui sont le terrorisme de fait, que ces assassinats des Palestiniens, à tout le moins, tacitement encouragés par les Etats-Unis qui ne font rien pour dissuader leur protégé israélien de recourir à des procédés entrant en droite ligne avec le terrorisme d'Etat. Or, l'assassinat délibéré de personnes, considérées comme des adversaires politiques avec lesquelles, d'une manière ou d'une autre, Israël devra négocier, constitue en réalité une fin de non-recevoir de la part de l'Etat juif de tout processus de paix qui ne soit pas de son seul fait. Aussi, l'assassinat ciblé constitue-t-il une entrave claire au plan de paix dit de la «feuille de route» mené par les USA notamment. Or, interrogé par la presse sur le fait de savoir s'il y avait une contrepartie au veto américain, l'arrêt des assassinats ciblés, l'ambassadeur israélien à l'ONU, Dany Gillerman a dé-claré «qu'à sa con-naissance, les Etats-Unis n'avaient pas de-mandé un arrêt des opérations de liquidation de Palestiniens en échange de leur veto». En d'autres termes, les Améri-cains approuvent ces assassinats que condamne l'ensemble de la communauté internationale. De fait, réunie présentement à Genève pour sa session ordinaire, la Commission des droits de l'homme de l'ONU, (CDH) a fermement condamné l'assassinat, lundi, par Israël de cheikh Yassine. Comment, dans ces conditions, cette super-puissance peut-elle se présenter comme le garant du processus de paix au Proche-Orient lorsqu'elle prend fait et cause pour Israël? Une partialité qui en réalité aurait dû, si les Nations unies fonctionnaient normalement, éliminer de fait les Etats-Unis de tout processus de paix initié pour cette région du monde. Mais les choses étant ce qu'elles sont ce n'est sans doute pas demain que les choses seront remises à l'endroit tant que le droit de la force prendra le pas sur le droit et les lois internationaux. Et c'est encore l'ONU qui en sort toute déconfite, son crédit en prenant à nouveau un sale coup. Le projet de résolution condamnant Israël déposé par l'Algérie a recueilli 11 voix pour, trois abstentions et une contre, celle des Etats-Unis qui, en tant que membre permanent, annule par son «non», toute résolution bien que réunissant la majorité des voix. A juste raison, réagissant à ce nouveau veto américain en faveur d'Israël, Saab Erakat, négociateur palestinien a déclaré : «Nous craignons réellement que ce veto américain soit interprété par Israël comme un encouragement à poursuivre sur la voie de la violence, de l'agression et des assassinats.» De son côté, Nabil Abou Roudeina, conseiller politique du président Arafat a indiqué: «Cette position est regrettable, car la politique des assassinats doit être condamnée par tous. Mais malheureusement l'administration américaine a pris l'habitude de se servir du veto (en faveur d'Israël) et cela ne sert pas le processus de paix». En fait, placer les évènements du Proche-Orient et singulièrement le contentieux israélo-palestinien, sous le seul contexte de la lutte antiterroriste, outre de détourner le dossier de sa nature réelle - qui demeure le retrait d'Israël des territoires palestiniens - est encore le moyen le plus sûr de renvoyer aux calendes grecques toute solution négociée du conflit entre Israël et les Palestiniens.