Cette fille d'immigrés algériens est taxée de «clientélisme», voire de populisme, par ses adversaires. Le second tour d'une primaire socialiste pour les élections municipales de 2014 se tenait dimanche à Marseille, ville méditerranéenne gangrenée par la criminalité et la corruption qu'une gauche fragilisée par ses divisions et l'impopularité du gouvernement espère malgré tout ravir à la droite.La campagne pour départager la «rebelle» Samia Ghali, 45 ans, élue des «quartiers Nord» populaires de Marseille, et Patrick Mennucci, 58 ans, député du centre-ville, plus aisé, qui a reçu le soutien de l'appareil du parti socialiste, a été tendue. Samia Ghali, arrivée en tête au premier tour avec 25% des voix, a accusé le gouvernement de Jean-Marc Ayrault d'avoir pris parti pour son adversaire, taxé de «candidat de Paris». La ministre chargée des Handicapés, Marie-Arlette Carlotti, figurait parmi les candidats au premier tour, mais elle a été largement distancée par les deux finalistes et a appelé à voter Mennucci. «Si j'étais à sa place, peut-être que je rendrais mon poste», a lancé Samia Ghali. Cette fille d'immigrés algériens est taxée de «clientélisme», voire de populisme, par ses adversaires. Au premier tour, elle avait affrété des minibus pour aller chercher des électeurs chez eux, une pratique qui n'est pas illégale, et Mme Carlotti avait parlé d'«échanges d'argent». Samia Ghali s'est fait connaître en France en août 2012 en prônant le recours à l'armée pour combattre la délinquance à Marseille. Elle est aussi accusée par M.Mennucci (20% au premier tour) d'être le poulain de Jean-Noël Guérini, l'encombrant homme fort du Parti socialiste à Marseille et dans sa région, que les instances nationales ont contraint à démissionner de la présidence de la fédération du PS en raison de son inculpation dans trois dossiers judiciaires pour corruption et détournement de fonds publics. Corruption, clientélisme et criminalité plombent depuis longtemps la vie de Marseille, ville du Sud de 850.000 habitants, chaleureuse et cosmopolite, parfois regardée avec dédain depuis Paris et le nord de la France. On en parlait déjà en 1995 quand l'actuel maire de droite (UMP) Jean-Claude Gaudin avait ravi son siège à la gauche. M.Gaudin, 74 ans, se représente en 2014, mais les sondages le placent en position difficile. On lui reproche, notamment d'avoir laissé à l'abandon les quartiers populaires, où l'économie souterraine a comblé le vide laissé par l'absence d'emplois et de services publics. Marseille compte 12% de chômeurs tous quartiers confondus, mais le taux est bien plus élevé dans les «quartiers nord». Le trafic de drogue y prolifère et les règlements de comptes meurtriers font régulièrement la une des médias nationaux. Ce qui a conduit le gouvernement à annoncer début septembre un plan d'action contre la criminalité et à renforcer les effectifs de police. Mais Marseille a aussi été en 2013 la «Capitale européenne de la culture», un titre qui lui a permis de développer une multitude d'événements artistiques et l'ouverture d'un splendide Musée des civilisations de l'Europe et de la Méditerranée (Mucem) face à la mer. La primaire socialiste, une première pour une municipale à Marseille, avait pour but d'insuffler «une dynamique populaire de mobilisation» pour mettre fin au règne de Jean-Claude Gaudin. La mobilisation a été là, avec un taux de participation comparable à celui de la primaire socialiste pour l'élection présidentielle de 2012 gagnée par François Hollande. La participation à la mi-journée était dimanche en hausse de 13,5% par rapport au premier tour, qui avait déjà suscité une forte participation. Les 55 bureaux de vote devaient fermer à 17h GMT. Mais le rassemblement de tous les sympathisants socialistes autour du vainqueur du second tour semblait par avance difficile après les accusations réciproques lancées par les deux candidats. Mme Ghali a soigneusement éludé la question, affirmant ne pas envisager de perdre, avant de laisser planer le doute samedi sur son avenir au PS, si elle arrivait deuxième.