«Aujourd'hui, ce seront les urnes qui décideront.» Le citoyen oranais, gavé de discours, et porté par la frénésie d'une campagne faite de mots, de photos et de coups fourrés, s'apprête aujourd'hui à vivre l'épreuve de l'isoloir. Un moment de solitude par lequel il peut encenser, tout comme sanctionner d`ailleurs les candidats qui l'ont abreuvé de promesses. Courtisé, il a répondu à l'appel du pied de la campagne. Mais qui aura les faveurs de son choix? Le chant du cygne, il en connaît un bout, les promesses électoralistes, il sait les subir sans en succomber. Aujourd'hui, les dilemmes deviendront assurance et le citoyen, en accomplissant son droit et son devoir citoyens, décidera en son âme et conscience de la couleur d'un quinquennat et des contours de ce que sera l'Algérie de demain. «Aujourd'hui, ce seront les urnes qui décideront», nous dira un citoyen qui se définit comme un gibier couru, une voix courtisée par tous les candidats, «même par les partisans du boycott qui se recrutent dans les rangs des militants du MDS» avouera-t-il. Interrogé quant à sa participation au vote, il précisera qu'il assumera son devoir jusqu'au bout, «car, pour cette fois, je crois aux chances réelles d'un changement qui inscrirait l'Algérie sur la voie du décollage. Je crois en un changement salutaire pour le pays et pour le processus démocratique qui permettra de mettre en branle l'Algérie des institutions, du droit de la justice», insistera notre interlocuteur. Ce discours qui se veut une réponse très claire aux partisans du boycott, devient nuancé quand on évoque la préférence pour un candidat ou pour un autre. «Moi, c'est la conviction qui guide mon choix, je voterai Bouteflika pour garantir la continuité», dira un ancien de l'Unja, aujourd'hui recyclé dans les affaires. Un partisan de Benflis se dit quant à lui mobilisé pour faire barrage à la fraude. «Il y a de réelles chances pour la démocratie et pour le respect du choix populaire et il serait criminel de laisser des gens verser dans la fraude et plonger le pays dans l'incertitude», avouera-t-il. La même détermination est perçue chez les partisans de Sadi, Hanoune, Djaballah ou encore Rebaïne. Tous se déclarent mobilisés pour faire barrage à toute velléité de fraude. Un tour dans les quartiers dit résidentiels laisse penser que le jeu sera très serré. Les lieux, traditionnellement fortement abstentionnistes, ont l'air de s'impliquer dans la bataille d'aujourd'hui. Dans les fiefs traditionnellement acquis aux thèses des islamistes, on se mobilise pour le scrutin. Ici, les barrières, qui faisaient les clivages Ennahda, El-Islah, Wafa ou sympathisants de l'ex-FIS, ont reculé pour laisser la place à un large front décidé à contrer toute tentative de fraude. «On doit se montrer vigilants pour éviter que ne soit confisqué le choix du peuple», dira un militant du MSP qui a quitté les rangs de son parti pour rejoindre la mouvance née pour soutenir le candidat Djaballah. Cette effervescence est aussi perçue chez les ménagères qui ont envahi les marchés à la quête des produits de première nécessité. «Nous sommes devant une situation de doute et. pour ne pas être prises au dépourvu, nous stockons ; une décision sage quand on entend les menaces des uns et des autres à propos de troubles qui pourraient émailler l'opération du vote», dira une vieille femme du quartier d'El Hamri.