Jeudi dernier, il n'y avait à la barre que le greffier, deux avocats et...six femmes! Dans ce procès, la juge est une femme, Naïma Dahmani de Chéraga, la procureure est une femme: Tabarout Sarah et la victime est également une femme. Les deux inculpées sont des femmes! Pour faire un bon décor, le défenseur sont deux hommes outre le greffier! D'entrée, Dahmani a voulu jouer au...juge impartial. Et cette présidente sait s'y prendre. Elle ne parle pas beaucoup, mais écoute très bien. Elle pose de pertinentes questions juste pour obtenir des réponses potables. Ce qui n'est pas évident surtout que la victime ne s'était pas déplacée en victime expiatoire. Elle défend crânement ses chances de l'emporter face à ces deux femmes poursuivies pour agressions physiques. Même la femme témoin a placé trois mots... que Maître Ahmed Ammi avait «plaquée» car son témoignage était clair: «Ce témoin est sorti de chez elle en entendant les bruits d'une dispute et de coups!» avait articulé le défenseur. L'avocat de la partie civile Maître Achour Fekkari, a rappelé que les témoins ont été entendus un mois après les faits. «Tous les témoins n'ont jamais déclaré qu'ils ont vu les deux inculpées agresser la victime. Ils ont tous déclaré: «Nous avons entendu...» et jamais dit: «Nous avons vu....» s'est écrié l'avocat qui a demandé de gros dommages. La procureure Sarah Tabarout a demandé une peine d'emprisonnement ferme de un an. Maître Ahmed Ammi plaide calmement. Il affirme avoir décortiqué le dossier et n'y avoir rien eu de grave. «Elle est venue avec sa fille à hospitaliser. Le temps de stationner, un témoin a vu ma cliente être jetée dehors» a ajouté le conseil qui relève la bizarre et énorme contradiction: «Elle a une fracture le 8 juin et se présente aux urgences le 11 du même mois chercher un certificat médical d'un arrêt de travail» et de siffler: «L'objet contendant c'est quoi? C'est imprécis et puis Projetée a même le sol'' c'est quoi comme affirmation? On projette un film sur un écran, jamais le corps humain!» avait articulé Maître Ammi qui avait, au passage, répété l'histoire du «certificat médical, de la durée de la visite médicale et le diagnostic». Passons et revenons aux faits... De gauche à droite, nous avons les deux inculpées Fatiha D. veuve de 52 ans et Ahlam S. 27 ans, célibataire. La victime Fatiha R. mariée, s'était constituée partie civile, les témoins Hamid R. 43 ans chauffeur dans les Forêts, Nacéra R. 47 ans étaient toutes ouïes en ne quittant pas des yeux Naïma Dahmani la présidente dont le regard angélique cache mal la joie née de l'historique victoire des Verts face au Burkina Faso et donc de la qualification au Mondial du Brésil en juin 2014. Ce détail pêché à l'audience méritait d'être signalé, car novembre, ce mois de tous les sacrifices, est pratiquement devenu pour les Algériens, celui des victoires éclatantes, réjouissantes rassurantes et palpitantes. C'est dans cet état d'esprit où la clairvoyance est nettement perçue que Dahmani apprendra de la bouche de la victime que les deux inculpées (présentées plus tard par Maître Ahmed Ammi comme victimes) l'avaient rossée, balancée sur le sol et commis l'irréparable. Les deux femmes inculpées faisaient une moue éloquente quant à une prétendue raclée qu'elles démentiront dix minutes plus tard, évoquant les témoignages banals ramassés à chaud par une police judiciaire beaucoup plus pressée d'enterrer cette affaire de voisinage qui n'arrange généralement jamais le boulot des flics accaparés par d'autres fléaux qui minent notre société. Et le boulot de la présidente est justement de veiller aux deux plateaux de la balance afin que justice soit rendue dans les règles les plus élémentaires de la déontologie...tout simplement. Chapeau Mme la présidente, car ce n'était pas évident pour le tribunal de savoir trier le bon grain de l'ivraie! Et ce constat est né au fur et à mesure de l'avancée des débats menés tambour battant surtout que le rôle de ce jeudi était plutôt nombreux et Sarah Tabarout en sait quelque chose, elle qui en sa qualité d'«as» de l'opportunité des poursuites, sait mieux que «quiconque» que la décision appartient au seul tribunal, maître à bord avec l'inévitable police de l'audience. Et en matière de maîtrise des procédures, Naïma est un «as» en l'absence de tout balbutiement ou hésitation fatale à une magistrate du siège. Fatiha D. âgée d'un demi-siècle, sans profession résidant au village agricole de Mazafran, Ahlem S. la fille de Fatiha, avec ses 27 ans, et célibataire avaient déposé devant les policiers. Elles s'étaient plaintes de coups et blessures volontaires de la part de Fatiha R. venue at home les agresser. Un certificat médical d'arrêt de travail d'un journée avait été déposé. A la barre, elles ont maintenu leurs dires tout en protestant contre les propos «sans vérité ni fondement» de Fatiha R. qui a présenté, elle, un arrêt de travail de vingt et un jours. Les témoins, quant à eux, déposeront sauf que le jour de l'audience, seule Nacéra M. 47 ans avait assuré à la justice que les faits s'étaient déroulés à 19h30, que Fatiha R. avait été vue jetée sur le sol suite à une violente poussée... Et c'est au tour de ce point que Maître Ahmed Ammi, l'avocat, dira que ce sont ses clientes qui sont victimes dans ce dossier. Maître Fekari avait plaidé dans le sens contraire des affirmations. On a même parlé de comportements immoraux de la jeune fille: Ce qui a mis le feu aux poudres. Comme d'habitude, Dahmani ne s'éternisera pas autour de cette triste affaire qui met en cause des familles où des femmes de tout âge y sont mêlées. De toute façon, le tribunal a entendu toutes les parties et même le bancal témoignage de Nacéra qui a beaucoup balbutié qu'expliqué les faits. Les deux avocats ont dit l'essentiel, évitant de jeter de l'huile sur le feu, se contentant d'aller droit sur les faits qu'ils ont donnés tels quels, sans plus. Fidèle à sa démarche, Naïma Dahmani a préféré pendre une semaine avant de prendre sa décision. Ah! ces histoires de voisinage qui ne sont en fait, que des pertes de temps à la justice.