Tout compte fait, est-ce réellement le grand méchant ghoul ce DRS ? Et est-ce vraiment cet ogre gargantuesque qui phagocyte, à lui seul, toute l'Algérie, sa société dite civile, ses partis politiques et ses appareils de sécurité ? Ce qui est déjà considéré comme l'affaire «RCD-DRS», et qui s'embourbe dans un début de feuilleton automnal juridico-politique, ne semble pas vouloir émerger de la zone non franche des supputations tous azimuts. Le Département de renseignement et de sécurité, le DRS, petit-fils de la mythique Sécurité militaire, a tenté d'abattre Saïd Sadi? Rien que ça. Mais pourquoi? Parce que Sadi est un «danger pour l'Algérie»? Autant que Zouabri? Ou est-ce parce que le numéro un du RCD avait fait voter, le vendredi 6 juillet dernier à son Conseil national le Pacte de refondation nationale, qui stipulait dans l'un de ses propositions de sortie de crise «le démantèlement des polices politiques»? Et on peut poursuivre ainsi, plaçant des points d'interrogation tout au long de cet article, mais sans pour autant percer le grand mystère des trous noirs ou des civilisations Mû disparues. Plus sérieusement, si la sortie médiatique de Sadi, copieusement arrosée d'un soupçon de polar à la John Lecarré est une véritable aubaine pour son parti en pleine perte de vitesse, c'est que le RCD a été victime de son propre parcours chaotique sur les sentiers de la politique. Les derniers développements de la situation en Kabylie, avec ses velléités de dialogue avec de mystérieux émissaires du pouvoir, et ensuite l'épisode de la rencontre de quelques délégués «non délégués» avec M.Ali Benflis et le communiqué de la Présidence à la veille de la marche des ârchs le 5 juillet dernier, avaient profondément désarçonné ce parti dont des militants en Kabylie avaient ouvertement accusé l'éternel rival, le FFS, d'être à l'origine de la nouvelle étape des «tractations». Pris de vitesse, sentant le vent tourner en sa défaveur, voyant se profiler le risque de perdre sa base ethnologique électorale au profit du frère ennemi, le FFS, Saïd Sadi n'a pas trouvé mieux que de rebondir sur la scène nationale en se rappelant qu'en Algérie, il existe un département des services de renseignement sur lequel on peut endosser toutes les tares du monde. Le DRS, de par les spécificités de ses missions qui lui imposent un hermétisme et un impénétrable droit de réserve, est la cible opportune pour ce genre d'accusations. Tout compte fait, est-ce réellement le grand méchant ghoul ce DRS? Et est-ce vraiment cet ogre gargantuesque qui phagocyte, à lui seul, toute l'Algérie, sa société dite civile, ses partis politiques et ses appareils de sécurité? La réponse à ces questions par un hochement pathétiquement positif de la tête équivaudrait à avouer que nous ne vivons plus dans une République, qu'il ne faudrait plus aller voter, ni créer de partis, d'associations ou de journaux, mais plutôt se cloîtrer chez soi en attendant que des commandos cagoulés et particulièrement méchants viennent nous kidnapper sous le couvert d'une nuit d'orage et nous conduire, bâillonnés et les yeux bandés, vers de sombres sous-sols où fusent les cris inhumains des suppliciés... Mais arrêtons-nous là, le DRS n'a pas besoin d'avocats ni d'une plaidoirie, si le Dr.Sadi accuse, il doit produire des preuves tangibles sur ce qu'il avance. Depuis des années, la Sécurité militaire, diabolisée à outrance, a toujours bon dos. La situation est trop grave pour s'aventurer dans des manipulations de l'opinion publique alors que les législatives sont toutes proches.