«L'urgence de susciter le débat» «Il n'y a pas d'industrie de cinéma. Dans ce microcosme complexe, survivent quelques actes de résistance dont Les Rencontres cinématographiques gérées par une association de bénévoles. Or, cette année, le ministère de la Culture a refusé de subventionner ce festival, chose qu'il effectuait depuis 12 ans, depuis sa création. Les raisons? Aucune idée. C'est catastrophique, car ce ministère est sur le point de fermer toute proposition originale liée au cinéma. Des acteurs de la vie cinématographique algérienne se sont unis pour protester à travers un comité de soutien sur Facebook. Le président du festival enverra d'ici quelques jours, à la presse, une lettre ouverte..» écrit le critique de cinéma et néanmoins directeur artistique des Rencontres cinématographique de Béjaïa. C'est dans ce climat de tension, d'urgence, mais de détermination et de soutien sans faille que nous avons décidé d'en savoir plus en s'adressant au premier responsable de cette manifestation qui soufflera cette année sa 12e bougie et que l'on ne voudra pas cesser de grandir... L'Expression: Voila quelques jours que les cinéastes et autres artistes, anonymes et journalistes d'ici et d'ailleurs se mobilisent à travers les réseaux sociaux pour soutenir votre manifestation cinématographique qui atteint, en 2014 sa 12e année. Tout d'abord qu'en pensez-vous et pourquoi cette action? Je ne pourrais que me réjouir de la mobilisation qui va au-delà de la profession pour toucher les autres secteurs de la création et surtout des anonymes. Cette mobilisation démontre, si besoin est, que nous avons au fond de nous de la vitalité et la capacité à s'indigner devant les injustices que nous subissons au quotidien, après, cette vitalité et cette indignation ont besoin de prendre forme et c'est ce qui se passe ces jours-ci à travers les réseaux sociaux,mais pas que, pour soutenir les Rencontres cinématographiques de Béjaïa. Cette mobilisation fait suite à l'injustice subie par notre manifestation par les tenants du portefeuille destiné à aider la culture dans notre pays. Quelques chiffres sont nécessaires pour mettre en lumière cette injustice, ainsi en 2011, et après avoir reçu 500.000,00 DA, nous avons déposé un recours qui a été suivi d'une entrevue avec la chef de cabinet du ministère de la Culture, Mme Yahi, qui a abouti à une réévaluation de cette aide pour passer à 3.000.000,00 DA. En 2012, notre surprise fut grande lorsque nous avons su que nous n'avions reçu que 300.000,00DA, c'est-à-dire que le montant a été divisé en 10 Nous avons, suite à ça, refusé de signer le contrat-programme et déposé en décembre de cette même année (2012) un recours au ministère de la Culture, inutile de vous dire que celui-ci est resté lettre morte jusqu'à aujourd'hui. La cerise sur le gâteau de cette logique du ministère qui nous dépasse, nous a été réservée pour 2013 où nous n'avons rien reçu ou si vous préférez et pour rester dans les chiffres nous avons reçu 0 dinar. Lorsque l'opinion publique a pris connaissance de cette injustice, des soutiens sont arrivés de toute part et l'indignation a pris forme. A votre avis, pourquoi le ministère de la Culture a-t-il refusé cette année de subventionner votre association comme il le fait chaque année, croit-on savoir? Nous n'avons aucune réponse à cette question qui, nous aussi, nous taraude puisqu'il faut juste savoir que les refus de financement ne sont ni notifiés ni justifiés. Aussi, il faut savoir que nous n'avons pas été soutenus systématiquement et chaque année. Que préconisez-vous, faire améliorer les choses ou remédier à cela? Je pense que cette occasion est belle pour ouvrir le débat sur le financement des manifestations culturelles en Algérie et le financement de la création artistique sous toutes ses formes. Comme dit plus haut, les refus ne sont jamais notifiés ni justifiés, il y a un flou total pour ce qui est des financements, nous allons essayer avec toutes les personnes, collectifs et associations qui nous ont manifesté leur soutien d'ouvrir ce débat même si et par souci de reconnaissance nous devons savoir qu'il y a déjà du travail qui se fait dans ce sens avec notamment le Dr Kessab. Le problème dépasse Project'heurts et les Rencontres cinématographiques de Béjaïa, beaucoup d'associations voudraient activer ou ont commencé à le faire avant d'être étouffées dans l'oeuf faute de soutien et aussi parce que ces associations veulent être autonomes et indépendantes dans leur façon de faire et de concevoir la chose culturelle, idem pour les créateurs qui voudraient, eux aussi, savoir et connaître les mécanismes d'aide et de soutien à la création en Algérie. Le cinéma algérien est malheureusement otage des aides qui se donnent au compte-gouttes. Cela est aussi le cas pour les associations, non? Il s'agit pour nous de dire que ces aides doivent exister parce qu'il s'agit d'un argent qui, à l'origine, est destiné à servir la culture dans toute sa diversité, il ne faut pas regarder la chose comme étant une exception d'être soutenus mais plutôt comme quelque chose de tout à fait normale, parce que la culture est un secteur qui doit être aux avant-postes des préoccupations de l'Etat au même titre que l'éducation ou la santé, ce n'est pas un luxe que d'avoir des salles de spectacles, des films qui se font, des pièces de théâtre qui se montent ou des livres qui sont édités, c'est au contraire une nécessité historique de profiter de cette «aisance» financière pour mettre sur pied des mécanismes de soutien et d'aide clairs et transparents afin d'aider l'émergence d'expressions artistiques les plus diverses. J'imagine que cela ne vous découragera pas pour autant à continuer les préparatifs pour la prochaine édition des Rencontres cinématographiques de Béjaïa qui avance à grand pas, puisque cette année cela se fera au mois de mai... Nous continuons à travailler sereinement pour la préparation de la prochaine édition des Rencontres cinématographiques de Béjaïa (31 mai-6 juin 2014), comme nous continuons à faire nos activités régulières et je vous rappelle à ce titre, que notre ciné-club «Allons voir un film» a repris pour sa 12e année de suite, comme nous venons de boucler la 3e et dernière session de l'atelier d'écriture de scénarios «Côté court», mais il est utile et important de dire que cette situation nous fragilise énormément et l'avenir des Rencontres cinématographiques de Béjaïa est en danger.