Au lendemain de son élection, la présidente centrafricaine de transition, Catherine Samba Panza, s'attelait hier à sa première priorité: pacifier un pays où la peur de nouvelles tueries taraude les milliers de déplacés des violences. A Bangui, toujours placée sous couvre-feu sillonnée par les soldats français de l'opération Sangaris et africains de la Misca, la nuit a été «particulièrement calme» malgré des actes très isolés de pillages de boutiques par des groupes de jeunes hommes, selon des habitants. En province, aucune violence à grande échelle n'avait été signalée hier après-midi. Mais lundi encore, l'armée camerounaise a tué trois combattants, deux ex-Séléka et un anti-balaka, après un accrochage à la frontière entre les deux pays, selon Yaoundé. Que ce soit par la population ou par la classe politique, l'élection de Catherine Samba Panza - la première femme accédant à la tête de l'exécutif dans l'histoire de la Centrafrique - a été bien accueillie, tout comme son appel à déposer les armes lancé aux miliciens chrétiens anti-balaka et aux combattants musulmans ex-Séléka. Un représentant de la mouvance anti-balaka, Lévi Yakété, a ainsi assuré «réitérer l'appel au cessez-le-feu à nos combattants et qui est suivi jusqu'à présent». «Nous avions un objectif à atteindre qui était le départ» de l'ex-président de transition Michel Djotodia, a-t-il ajouté. M. Djotodia, qui avait renversé le régime de François Bozizé en mars 2013 à la tête de sa coalition rebelle Séléka, a été contraint à la démission le 10 janvier, sous pression de la communauté internationale excédée par son incapacité à mettre fin aux tueries interreligieuses. «Maintenant nous attendons le cantonnement de nos combattants, pour un retour véritable à la paix», a affirmé M. Yakété. L'attentisme dominait en effet hier à Bangui. Chacun attendait des actes, d'abord un désarmement et une neutralisation des hommes en arme et des pillards. C'est le cas au camp de déplacés de l'aéroport de la capitale, où s'entassent depuis des semaines environ 100.000 personnes. «Moi, je ne bouge pas», dit une déplacée, «je n'ai plus rien, ma maison a été pillée, j'ai peur, et tant que les Séléka ne sont pas désarmés, je reste ici». Elle a écouté lundi le premier discours de Mme Samba Panza. «Elle a bien parlé, c'est vrai. Mais cette dame, on ne la connaît pas vraiment, on attend de voir ce qu'elle va faire pendant ses premiers mois», ajoute -t-elle, résumant le discours ambiant. Consciente de la situation de son pays et de la crise humanitaire sans précédent en cours, la présidente, qui doit organiser des élections auxquelles elle ne sera pas candidate d'ici février 2015 au plus tard, a annoncé sa volonté d'agir vite. Le nouveau Premier ministre de transition «sera nommé d'ici deux ou trois jours», «mercredi ou jeudi», a-t-elle déclaré hier dans un entretien à RFI. Pour s'atteler - une fois qu'elle aura prêté serment devant la Cour constitutionnelle provisoire, peut-être dès aujourd'hui - à la pacification et au redressement d'un pays dévasté, elle veut «un gouvernement de technocrates, avec une forte probité morale». Dans un pays également miné par la corruption depuis des décennies, la communauté internationale, qui a promis un soutien militaire - avec l'envoi prochain d'une force européenne à Bangui - et financier massifs, veut en effet des interlocuteurs crédibles avant de débloquer des fonds. Quant à la question religieuse, la présidente - une chrétienne qui ne met pas en avant ses convictions - la juge secondaire pour choisir des hommes et des femmes compétents. «Je cherche des compétences, je veux un gouvernement de technocrates, avec une forte probité morale. Si j'ai un Premier ministre qui répond à ces critères et qui a une religion musulmane, je ne vois pas pourquoi je ne le nommerais pas», a-telle expliqué. Sur la durée de la transition, Mme Samba Panza juge que «le calendrier initialement prévu de février 2015 est tenable».