Protestation - «Non à la France», «Hollande criminel!», scandaient les manifestants, dénonçant «la partialité» des militaires français déployés depuis début décembre en République centrafricaine (RCA). Plusieurs milliers de musulmans ont manifesté pacifiquement, hier, dimanche, à Bangui pour protester contre l'armée française. «Nous ne voulons pas la France! Nous ne voulons pas l'opération Sangaris! La France est venue pour déstabiliser notre pays», criait l'un des protestataires. «C'est une opération sanguinaire, ils (les soldats français) veulent nous diviser, nous, Centrafricains. Ils nous imposent leur volonté pour nous faire tuer tous les jours. Qu'ils arrêtent!», a dénoncé un autre. Ce mouvement est intervenu après la mort quelques heures plus tôt de trois combattants de l'ex-rébellion Séléka dans un accrochage avec des soldats français. Rassemblés dans le centre-ville, les protestataires, portant pancartes et calicots, ont marché pendant près d'une heure sur une grande avenue vers le quartier musulman PK5. Le rassemblement s'est déroulé sans incident avant d'être dispersé, selon l'armée française, par «les forces de police de la Misca» (force africaine en Centrafrique). Hier matin, trois combattants Séléka ont été tués dans un accrochage avec des soldats français, au cours d'une opération de désarmement des groupes armés dans un quartier nord de la ville. L'état-major français à Paris a confirmé l'accrochage mais refusé de donner un bilan, expliquant seulement que les Français ont ouvert «le feu deux fois au cours de la journée»: la première fois «contre un groupe d'une demi-douzaine de personnes soupçonnées d'être des ex-Séléka», qui «allaient faire usage de leurs armes» qu'ils avaient «pointées contre nos troupes», et la deuxième fois «contre un tireur isolé». Selon le chef de l'une des factions de la Séléka, Abacar Sabone, les trois ex-rebelles ont été tués «alors qu'ils étaient armés, certes, mais ils n'avaient montré aucun hostilité envers les Français et n'ont pas fait usage de leurs armes». L'incident avait provoqué une première manifestation dans la matinée de quelques dizaines de sympathisants de l'ex-Séléka, qui ont bloqué l'avenue des Martyrs allant à l'aéroport, avant d'être là aussi dispersés par des policiers congolais de la Misca. Il a ravivé parmi la population musulmane les accusations de «partialité» contre les soldats français, soupçonnés de ne désarmer que les ex-Séléka, jouant ainsi le jeu des milices d'autodéfense chrétiennes «anti-balaka», responsables de nombreuses atrocités ces derniers jours contre des civils musulmans. Le spectre de la Côte d'Ivoire n'est pas très loin, quand les soldats français de l'opération Licorne en 2004-2005 avaient failli à plusieurs moments être submergés par les foules hostiles des partisans du président Laurent Gbagbo. Près d'un millier de personnes ont été tuées depuis le 5 décembre à Bangui et en province dans des violences entre chrétiens et musulmans, selon Amnesty International. La plupart des victimes ont été tuées dans des représailles de la Séléka, mais également dans les attaques et atrocités des milices anti-balaka. Un manifestant tué Des soldats tchadiens de la force africaine en Centrafrique (Misca) ont ouvert le feu ce matin, à Bangui, sur des manifestants rassemblés près de l'entrée de l'aéroport, tuant une personne. Les manifestants majoritairement chrétiens étaient regroupés près de l'entrée de l'aéroport pour demander «le départ» du président Michel Djotodia. Ils exigeaient également le départ du pays des soldats tchadiens de la Misca, aux cris de «Pas de Tchadiens à Bangui». Certains d'entre eux portaient des pancartes sur lesquelles étaient inscrits les slogans: «Oui à l'opération Sangaris (de l'armée française), non à l'armée tchadienne», ou «Oui à la France, non à la Séléka» (ex-rébellion musulmane, au pouvoir depuis mars 2013). Vers 7H40 locales (6H40 GMT), deux 4X4 de soldats tchadiens ont alors fait irruption et se sont approchés du rassemblement. Des manifestants ont commencé à jeter des pierres dans leur direction. Les militaires tchadiens ont réagi en tirant en l'air et dans la foule. Dans le reste de la capitale, la situation était calme avec une reprise notable de l'activité.