Fatima Haram Acyl Ayant été l'axe central de la Conférence africaine sur l'économie verte tenue à Oran, Fatima Haram Acyl, commissaire africaine chargée de l'Industrie et du Commerce auprès de l'Union africaine, est, dans l'entretien qui suit, longuement revenue sur les besoins des populations africaines et les visions de l'Union africaine en matière d'investissements, d'emploi et de développement. L'Expression: Est-ce que vous pensez que les pays africains peuvent sortir de leur pauvreté? Fatima Haram Acyl: Oui, je pense que l'économie verte est parmi tant d'autres moyens qui contribuent à l'éradication de la pauvreté. Mais il faut qu'on mette beaucoup d'efforts dans le développement durable, notamment dans le cadre de l'intégration régionale de l'Afrique, on en a vraiment besoin pour s'assurer de l'emploi localement et que bien évidemment l'industrialisation soit réalisée d'une manière responsable, d'où l'économie verte. Certains affirment qu'il est beaucoup plus facile d'investir dans l'industrialisation que de se lancer dans le développement de l'économie verte? Je ne partage pas nécessairement cette opinion. Je pense que nous avons besoin de cette industrialisation, c'est clair, mais qu'elle doit être faite de manière responsable tout en s'assurant que l'économie verte est vraiment dans nos pages. C'est la seule façon pour le continent d'aspirer à la création d'emploi. On peut pendre comme exemple l'expérience des pays occidentaux qui sont industrialisés et dont on voit maintenant les avantages sur le terrain. On peut donc le faire si cela se fait de façon responsable. L'économie verte nécessite tout de même beaucoup de moyens alors que l'Afrique souffre du défaut des moyens financiers. Je pense que c'est vrai, mais il faut savoir que l'Afrique possède beaucoup de ressources. Je pense que l'Afrique a également beaucoup de priorités que nous devons réorganiser tout en négociant au mieux nos contrats avec l'Occident et ce, pour s'assurer que ces derniers (contrats, Ndlr) permettent le développement que l'Afrique cherche, que ce soit l'industrialisation ou l'économie verte. Nous avons toutes les ressources nécessaires pour s'assurer d'aller dans un cadre de partenariat gagnant-gagnant, la finalité étant d'atteindre nos objectifs. Est-ce que les investisseurs étrangers peuvent venir et investir en Afrique sachant qu'ils ne viennent jamais là ou l'échec est assuré à l'avance? Il n'y a pas un investissement qui n'est pas sans risque. Le risque existe, certes. Mais, plus on le prend, plus le retour est grand. Pour ceux qui veulent investir en Afrique, nous leur dirons que les potentialités sont très grandes, toutes les opportunités sont là. Je pense qu'ils peuvent venir investir mais d'une manière raisonnable en respectant les priorités et les objectifs de notre continent tout en n'excluant pas son développement, s'ils ont bien sûr des visions à long terme. Nous cherchons des investisseurs stratégiques qui doivent respecter les agendas de l'Afrique tout en nous aidant dans la création d'emploi qu'il faut dans nos pays respectifs. Est-ce que la situation politique et sécuritaire qui prévaut en Afrique peut permettre la venue de ces investisseurs tant recherchés sachant que les kidnappings des étrangers font ravage dans les pays du Sahel et que le Mali n'est pas encore stable? En fait, il y a des risques, mais je pense que le monde entier est obligé d'être derrière l'Afrique et s'assurer que les développements sont là. Certaines raisons de l'insécurité qui règne en Afrique ne sont pas liées aux religions dont on parle. Depuis combien de temps les religions existaient dans le continent africain? En fait, ça profite à quelqu'un quelque part. Il faut que les gens comprennent que l'une des principales causes de l'instabilité de l'Afrique est le sous-développement. Les investisseurs doivent être rassurés qu'on va lutter contre ce qui se passe aujourd'hui. Quel est le premier partenaire à qui allez-vous faire appel? Il y a beaucoup de partenaires de l'Afrique comme des Européens, des Français et des Américains. Tout le monde comprend les potentialités de l'Afrique. Je pense que les investisseurs sont prêts à prendre le risque, prêts à venir pour nous aider dans notre développement, ce sont ceux-là à qui je ferais donc appel. Sans citer les préférences, les gens qui veulent respecter nos priorités dans la création de l'emploi, je leur dirais que les potentialités sont énormes, aussi bien pour eux (investisseurs, Ndlr) que pour les pays africains. Dans tout ça, quel est le rôle que doit jouer le Programme des Nations unies Pour l'environnement, le Pnue? Je pense qu'il va nous appuyer dans notre lancée dans la protection de notre environnement. En tant qu'Africains, nous devons, nous aussi, parler d'une seule voix. Et qu'il faut interpeller l'Occident qui est responsable de la pollution. L'Afrique est faiblement responsable dans l'émission de gaz, notre part représente un taux dérisoire de 4% seulement. Le monde doit donc prendre des engagements fermes et les respecter. Parler d'une seule voix est alors l'une des recommandations tant attendues par les Africains à la rencontre d'Oran? Parler d'une seule voix est primordial pour l'Afrique. Si cela se réalise, le monde entier ne peut pas ignorer ce très grand continent composé de 54 pays respectifs. Il possède toutes les richesses qu'il faut, tous les partenaires et le monde entier le savent. L'Afrique doit donc réaliser qu'elle est riche et non pas pauvre. Car nous avons toutes les ressources que tout le monde veut. Il faut s'assurer qu'on peut négocier de manière responsable pour qu'on puisse atteindre nos objectifs.