Le message adressé par Bush à Bouteflika annonce la volonté américaine de passer du stade de la parole à celui des actes. Les Etats-Unis d'Amérique lorgnent de plus en plus l'Algérie. Le rythme des visites des officiels américains n'en finit pas de prendre de la vitesse. Le ministère des Affaires étrangères a annoncé, hier, la venue de William Burns, l'assistant du secrétaire d'Etat américain chargé du Proche-Orient, pour demain. La même source a ajouté que l'ordre du jour de cette visite consiste à entretenir «la concertation politique régulière entre l'Algérie et les Etats-Unis». Burns aura à aborder avec les responsables algériens, a précisé le ministère, les modalités pratiques inhérentes au renforcement de la coopération entre les deux pays ainsi que les grandes questions de l'actualité internationale, essentiellement le scandale irakien après les mauvais traitements avérés contre les prisonniers irakiens. Les USA qui ont boudé notre pays durant les années de plomb, portent soudainement un vif intérêt à fructifier les échanges bilatéraux à tous les niveaux. Et la tendance s'est renforcée depuis les évènements du 11 septembre où les Américains commençaient à reconnaître les capacités de nuisance du terrorisme et le rude combat mené par l'Algérie contre ce fléau. C'est d'ailleurs ce qu'a réaffirmé Bush, avant-hier, dans un message adressé à Bouteflika. «L'Algérie peut devenir le porte-étendard d'une politique étrangère», a-t-il indiqué dans sa communication. Dans la foulée, il a annoncé d'imminentes visites à Alger de hauts responsables de la Maison-Blanche dont la première aura lieu dès demain. Il va sans dire que la Maison-Blanche a trouvé en la personne de Bouteflika un allié stratégique pour sauvegarder mais également réaliser ses projets dans le monde arabe. Ainsi, depuis son investiture, le président de la République n'a cessé d'engranger des signaux forts de la part de ces mêmes Américains qui ont failli classer l'Algérie sur la liste des Etats voyous au moment même où elle se débattait dans des transes infernales. Il est clair que la donne terroriste est ce qui a le plus conforté les relations entre les deux Etats. Après que les USA sont devenus la cible par excellence des ouailles de Ben Laden - le chef de l'organisation terroriste Al Qaîda - l'apport des services de renseignement algériens lui est incontournable. Le choix du partenaire n'est point fortuit du fait que le territoire national a été l'un des premiers à être infesté par les hordes intégristes. Une certitude publiquement mise en évidence par l'ambassadeur américain, Richard Erdam, dans une interview accordée, avant-hier, au Quotidien d'Oran. «Dans le sillage de ces évènements (ceux du 11 septembre), nous avons acquis une meilleure compréhension à l'égard des problèmes auxquels l'Algérie faisait face depuis les années 90», a-t-il avoué et de renchérir: «Nous comprenons, maintenant, que ce n'était pas un problème de terreur et de violence locales, mais que le phénomène n'était qu'une partie d'un grand problème international. Un fléau global. La coopération de l'Algérie en matière de lutte antiterroriste est exceptionnelle et mutuellement bénéfique». Au-delà de cette collaboration militaire tant indispensable pour les deux parties, il apparaît que les stratèges des hautes instances américaines auraient conclu que leur visée de démocratiser le monde arabe passerait d'abord par les contrées où le processus démocratique est déjà mis en branle. Le gouvernement algérien semble avoir pris une sérieuse longueur d'avance par rapport à ses pairs, comme l'a bien démontré l'ambassadeur américain: «Nous considérons, d'abord, que nos aspirations demandent un Maghreb engagé dans la démocratie, la prospérité et la stabilité. C'est-à-dire une région qui ne produit pas et qui n'exporte pas le fléau du terrorisme en Afrique ou vers l'Europe». Et, vraisemblablement, c'est la raison pour laquelle Bush considère que «l'Algérie est un exemple à suivre». Du coup, il en a résulté la transformation d'une relation qui, historiquement était à «un niveau très, très modeste», de l'aveu de Richard Erdman et de préciser que «cette transformation est en train de se faire et beaucoup de choses deviennent possibles dans ce contexte». Les sévices infligés aux détenus irakiens de la prison Abou Ghreib, font partie également des soucis majeurs de Bush du fait de l'indignation qu'ils ont suscité de par le monde. Un fait que Burns, l'émissaire du président américain, ne manquera pas de mettre à l'actif de certains «zélés» et, du coup, faire admettre des excuses à l'un des peuples frères de l'Irak. Bien que l'escale de Burns se présente sous de bons auspices, il semblerait, néanmoins, que le problème du Sahara occidental serait la source d'un débat houleux sur les tergiversations américaines à faire respecter le plan onusien. Un vrai dilemme pour la diplomatie américaine qui s'est toujours gardée de fâcher le Maroc, le principal obstacle pour le règlement de la crise.