Des ténors du mouvement de redressement ont refusé la démarche grâce à laquelle les pro-Benflis s'en sortent bien. La crise qui secoue le Fln depuis bientôt une année est désormais un vieux souvenir. «Il n'y a pas deux Fln. Nous sommes unis au service du parti et du pays». C'est en ces termes que Belkhadem a répondu aux questions des journalistes venus nombreux assister à la cérémonie de mise en place de la commission de préparation du 8e congrès, dit rassembleur. Tout est bien qui finit bien, serait-on tentés de dire. Rien n'est moins sûr pourtant. Dès l'entrée du siège du Fln, nous rencontrons des ténors du mouvement de redressement, comme Amar Tou et Tayeb Louh, qui commencent d'entrée de jeu par «contester le contenu du communiqué envoyé à la presse la veille par l'aile d'Abdelkrim Abada est nul et non avenu». Le document en question annonçait la mise en place de la commission. C'est ce que nos interlocuteurs contestent, de même que la distribution des badges à l'ensemble des membres, au nombre de 165. Selon eux, il fallait, hier, se contenter de mettre en place le bureau de la commission et de lui laisser quelques jours afin d'en désigner et d'en installer les membres. Il faut croire que Belkhadem ne l'entendait pas de cette oreille. A la suite d'une rencontre de la dernière chance, qu'il avait eu la veille avec Abada, jusqu'à une heure avancée de la nuit, un accord a fini par être trouvé. Le chef de file des redresseurs, comme nous l'annoncions dans une précédente édition, prend ainsi la tête de la commission nationale de préparation du 8e congrès. Il sera secondé par Salah Goudjil. Ce dernier, comme le reconnaissent des ministres, «a certes soutenu Benflis, mais il a su demeurer discret, sans jamais se mettre sur le devant de la scène». Daâdoua Layachi, un des premiers députés à avoir contesté le leadership de Benflis et mis en place un groupe parlementaire parallèle, propre aux redresseurs, occupera lui, les fonctions de rapporteur de cette commission. Hier, à l'arrivée de Belkhadem, Abada lui a cordialement cédé la place, lui permettant ainsi d'occuper officiellement les locaux du FLN. Refusant la logique du fait accompli et des rapports de force, lors d'une conférence de presse conjointe, Belkhadem a souligné que «désormais, le Fln est réunifié sans qu'il soit jamais question d'ailes se disputant une quelconque ligne politique». Il ajoute que «la coalition gouvernementale existait bien avant la naissance du mouvement de redressement, ce qui fait que l'Alliance présidentielle représente une activité inscrite en droite ligne des choix politiques et stratégiques de ce parti». Abada ne sera quand même pas relégué au second plan puisqu'il présidera, annonce Salah Goudjil, en compagnie du redresseur Saïd Bouhadja, la commission chargée de gérer les affaires courantes du parti en attendant la tenue du congrès. Nous croyons même savoir qu'une demande pour la levée du gel des avoirs du parti, afin de lui permettre de mieux appréhender cette échéance, aurait été déposée. Elle a de fortes chances d'aboutir incessamment puisqu'il s'est trouvé des ministres pour donner une interprétation «particulière» de la décision de justice venue annuler le 8e congrès de Benflis et geler les activités et les avoirs du parti jusqu'à ce qu'il se conforme de nouveau à la loi. Il n'est un secret pour personne, comme le reconnaît Amar Tou en personne, que des documents portant désignation d'une direction provisoire avaient été déposés «chez qui de droit», le ministère de l'Intérieur sans aucun doute, au lendemain du fameux congrès d'étape. Afin de juguler la vague de protestation, démarrée hier matin par les gens à qui les badges n'avaient pas été remis, Belkhadem a tenté de rassurer tout le monde en précisant que «la liste de la commission demeure ouverte, et sera complétée au fur et à mesure». C'est avec cette même explication qu'il répondra à notre question relative au mouvement d'humeur de certains ministres redresseurs. Quant à l'absence très remarquée d'Abdelkader Hadjar, et le départ précipité d'Amar Tou, force est de dire qu'aucune explication n'a été fournie. Pour ce qui est de la composition actuelle de la commission nationale de préparation du 8e congrès, dit rassembleur, elle se compose de certains membres du comité central issu du 7e congrès, des ministres redresseurs, des membres du bureau national de ce mouvement ainsi que de personnalités qui comptent au sein du parti. Il s'agit, notamment, d'Abderrezak Bouhara, El-Hachemi Hadjerès, Lekhdiri, Belaïd Abdelaziz, Belgasmia Abdelhamid, Lakhdar Dorbani, Ahmed Alioui, Seddiki et Mazouzi. Il est donc loisible de voir que les anciens pro-Benflis n'ont pas été écartés, comme l'espéraient certains leaders du mouvement de redressement. Pour ce qui est des modalités pratiques, la commission doit se réunir dans les tout prochains jours afin de répartir les tâches, mais aussi pour mettre en place les sous-commissions, qui seraient au nombre de cinq. La plus importante, qui doit s'occuper des aspects organiques, et qui aura donc la lourde charge de valider la qualité de congressiste à tous les présents, devrait être présidée par Abdelhamid Si Afif à qui le mouvement doit déjà son fameux congrès d'étapes. Des commissions régionales doivent également être mises en place, en attendant que les coordinateurs locaux et les mouhafedhs trouvent le moyen de fusionner. C'est de cela, grosso modo, que dépendra la fixation de la date de ce congrès. Celle-ci sera annoncée dans quelques semaines lors d'une seconde conférence de presse qu'animera Abdelaziz Belkhadem. Une autre sous-commission sera chargée, elle, d'élaborer les documents politiques ainsi que les nouveaux statuts du parti. S'il ne fait aucun doute que le programme de Bouteflika sera endossé dans ses grandes lignes, il y a de grandes chances que l'organisation de ce parti, anciennement de centre-gauche, vire vers le centre-droite en enterrant le comité central et le bureau politique pour mettre en place un conseil et un bureau tous deux nationaux. Les documents que nous nous sommes procurés lors du congrès d'étapes, en tout cas, prévoient de passer vers ce mode d'organisation, mieux adapté aux changements intervenus de par le monde, avec les nouvelles orientations économiques de l'Algérie.