Nommée récemment à la tête de l'Institut arabe de la traduction, Mme Biod fait le point. Après une riche carrière dans le domaine de la traduction, de la poésie et aussi de la peinture Mme Iname Biod, interprète officielle, a consacré sa vie à la traduction considérant que «la traduction, dit-elle, c'est ma raison de vivre». Mme Biod a été nommée récemment par le secrétaire général de la Ligue arabe, Amr Moussa, au poste de directrice de l'Institut arabe de la traduction. Elle nous parle dans cet entretien du rôle et des objectifs de cet institut, et aussi, de l'importance de la traduction dans la promotion de la langue et la culture arabes. L'Expression: Vous avez été nommée à la tête de l'Institut arabe de la traduction, que représente à vos yeux une telle nomination? Iname Biod: Bon, comme vous le savez, c'est Amr Moussa qui m'a désignée au poste de directrice de l'Institut arabe de la traduction, lors de sa dernière visite en Algérie. Cela eut lieu au niveau du ministère des Affaires étrangères en présence des autorités algériennes. Et je pense qu'après une longue carrière dans le monde de la traduction, je suis aujourd'hui bien récompensée et j'estime que c'est un honneur aussi bien pour moi que pour l'Algérie. Mais votre ascendance maternelle est-elle pour quelque chose dans votre nomination à la tête de l'institut? Non, désolée, ma nomination au poste de directrice de l'institut n'a rien à voir avec ce que vous dites, au contraire c'est grâce à mon long parcours dans le domaine de la traduction, soit comme interprète officielle. En tant qu'enseignante de traduction, j'ai enseigné dès 1978 et j'ai encadré plus de 300 mémoires de fin d'études. Donc, c'est le CV de Iname Biod qui a été choisi, pas autre chose. Pouvez-vous nous parler, alors, du rôle de cet institut? C'est un institut spécialisé dans la formation et la recherche et surtout dans la production dans le domaine de la traduction. C'est-à-dire enseigner les différentes méthodes et styles de traduction et de l'interprétation (en deux ans), et travailler pour produire une traduction de référence. En outre, vu l'importance de la traduction dans la promotion de la culture des pays, l'institut va travailler pour faire connaître le trésor patrimonial arabe, et aussi enrichir le dictionnaire culturel arabe par les cultures des autres civilisations. Parlons de la promotion de la langue et la culture arabes, ne pensez-vous pas que l'idée de créer un tel institut est venue un peu tard? Ecoutez, ceux qui n'avancent pas reculent. Et je pense que rien n'est trop tard, et puis une chose que peut-être vous ignorez, c'est que l'idée de travailler pour la promotion des langues et du dialogue entre civilisations existait dans la charte de la Ligue arabe depuis 1946, et je vois qu'aujourd'hui nous sommes passés à l'action et c'est le plus important, et nous n'avons qu'à appliquer un programme que nous percevons adéquat pour lancer la machine. Justement parlez-nous du programme et aussi des objectifs de cet l'institut? Outre la formation des traducteurs et des interprètes et l'enseignement des différents styles et méthodes de traduction, nous allons travailler pour promouvoir la technologie de la langue et de tirer profit des moyens scientifiques et techniques modernes de la traduction, et aussi l'enrichissement de la lexicographie et la «traductologie». Parallèlement, nous allons travailler avec d'autres centres de recherche dans le domaine des langues, outre les pays arabes. Comme nous allons organiser des congrès et des séminaires sur la traduction et la langue avec des chercheurs et des linguistes des autres universités. Sur quelles langues va travailler votre institut? Bon, comme pour le début, nous allons assurer quatre langues, à savoir le français, l'anglais, l'espagnol et l'allemand et bien sûr en plus de l'arabe. Car pour la première année, nous allons commencer par un nombre réduit pour pouvoir lancer la machine dans les années à venir, et simultanément nous allons faire des recherches pour développer les langues qui existent dans le monde arabe telle tamazight, d'ailleurs, c'est Amr Moussa en personne qui nous a orientés dans cette direction pour la promotion de la langue et de la culture amazighes et de cordonner avec les universités spécialisées dans la langue et la culture amazighes afin de produire des traductions dans cette langue. Alors, quand est-ce que l'institut sera fonctionnel et quelles sont les conditions pour s'inscrire dans votre établissement? Normalement l'institut ouvrira ses portes dès la prochaine rentrée universitaire, c'est-à-dire au mois de septembre et au plus tard au mois d'octobre. Quant aux conditions exigées pour s'inscrire dans l'institut, je dis qu'en premier lieu ce sont les étudiants boursiers des gouvernements arabes qui sont concernés et peut-être qu'il y aura des concours pour les étudiants algériens, nous envisageons de proposer cette idée au conseil de la Ligue. Comment voyez-vous la situation de la traduction en Algérie? En Algérie, je peux vous dire que nous avons des traducteurs, mais pas des spécialistes de la traduction. Car les Algériens sont tous devenus des traducteurs. Or, eux n'ont jamais fait de la traduction, au point où ils comparent les traducteurs aux photocopieurs des textes. C'est tout à fait faux car, la traduction est un travail d'intellectuel. Moi, personnellement, je classe le traducteur au-dessus de l'auteur, car il fait double travail. En outre, j'ai toujours proposé, là où j'enseigne à Alger ou à Oran, de créer une classe spéciale composée des meilleurs étudiants de l'institut pour les garder au service de la traduction. Donc, il faut revaloriser les traducteurs et leur donner un statut. Et je pense que c'est le moment de redonner à la traduction et aux traducteurs la place qu'ils méritent, et de leur consacrer un espace dans le domaine de la recherche scientifique.