La difficulté réside dans le fait que la direction centrale de l'organisation reste hostile à tout dialogue. Deux groupes armés, et non des moindres, sont favorables à une «solution négociée» avec les autorités et, par le biais d'émissaires, ont déjà démontré que la trêve reste possible «pour peu que les contacts entrepris aboutissent». Les deux groupes armés, affiliés au Groupe salafiste pour la prédication et le combat, l'un stationné au djebel Boukhil dans le sud de la région de Djelfa, l'autre basé au lieu-dit Dar Aïssa et le sud-ouest de la wilaya de Skikda, ont établi un premier contact avec les autorités et donné leur accord de «principe de trêve» aux autorités, mais rien n'indique encore que cette «bonne volonté» ira à son terme. Il est évident que la direction centrale du Gspc, qui reste encore basée dans ses fiefs inexpugnables de la Grande-Kabylie, s'interposera à toute velléité de trêve en même temps qu'elle condamnera à mort - et exécutera - tout «contrevenant» aux consignes de «guerre totale», données ces derniers jours. Le groupe de Boukhil, stationné au sud de Djelfa est le fer de lance des opérations du Gspc pour le Sud, et la rampe de lancement des attaques spectaculaires comme celles qui ont ciblé les trente-deux touristes européens ou encore, les dignitaires saoudiens. Selon un repenti qui s'est livré de son propre chef aux autorités de Djelfa, il y a quelques jours, le groupe de Djelfa est favorable à la trêve et pourrait déposer les armes et descendre des maquis. Mais beaucoup de responsables de la sécurité de la région restent sceptiques, car le groupe de Boukhil est connu pour sa démarche et ses hommes connus pour être des irréductibles du djihad. Mieux, le communiqué de l'installation du nouvel émir du Gspc, Nabil Sahraoui, a été cosigné par le responsable du groupe dit de Boukhil, qui reste hostile à tout dialogue avec les autorités. L'autre groupe qui pourrait être amené à déposer les armes est celui appelé «Seriat El Habacha», affilié à la katibat dite «Ec-Chouhada», qui active dans l'ouest et le sud-ouest de la région de Skikda. Selon une source sécuritaire, le chef de cette «seriat» (section, ndlr), le dénommé Sista Abdelhakim, s'est déjà livré aux autorités et a affirmé que son groupe est favorable à une trêve négociée. Selon le découpage local, la sériat «El-Habacha» est une section opérationnelle de la katibat (compagnie, ndlr) dite «Ec-Chouhada», dirigée par le dénommé «Abou Moukatil», qui a remplacé Berrouche Adelmadjid, dont on n'entend plus parler depuis quelques mois. La sériat «El-Habacha» est un groupe réduit d'entre 15 à 20 hommes, dont certains y ont femme et enfants, et son aire d'activité est très importante dans la stratégie de domination du Gspc sur la partie sud et ouest de Skikda. D'où toutes les interrogations que peut soulever pareille information. En fait, même si beaucoup de sériat démunies, affaiblies ou réellement convaincues de la nécessité de trouver une issue honorable à une guerre d'usure sans objectifs politiques précis, peuvent présenter le profil de «trêvistes», les problèmes restent ailleurs. La difficulté réside dans le fait que la direction centrale du Gspc, menée par Abou Ibrahim Mustapha (Nabil Sahraoui) et Abou El Haythem Yahia (Abdelhamid Saâdaoui), reste hostile à tout contact avec les autorités. «Ni dialogue ni trêve ni réconciliation avec les apostats», est-il formulé au bas de chaque communiqué que le Gspc diffuse. Plusieurs communiqués ont été rédigés et envoyés aux chefs de groupes locaux, «pour diffusion et application» et dont le maître mot est le refus de tout compromis politique avec les autorités. Mieux, les «combattants» sont mis en garde contre ce que l'émir qualifie de «mensonges et manipulations destinés à faire fléchir le djihad en Algérie». En outre, deux opuscules antitrêve circulent dans les maquis et font déjà partie de la «littérature de base» du terrorisme du Gspc. Le premier, intitulé «Diyâe Sobh'» (La lueur du jour) consacre une large place pour confondre les tenants du dialogue et la réconciliation. Le second, dont le titre «Pourquoi le djihad ?» (rédigé par Abdelmounïm Halima Abou Baçir, le référent doctrinal du Gspc) exclut toute possibilité de dialogue avec ceux qui ne gouvernent pas avec les lois de la chariaâ. L'espoir toutefois, reste de voir les polémiques internes prendre le pas sur les options nihilistes des irréductibles comme cela s'est fait lors de la reddition quasi spectaculaire de toute la katiba de Lakhdaria dite «El Ghoraba», qui, en 1999, déposa les armes et descendit des maquis grâce à un large débat interne qui a duré plusieurs jours et qui a mené l'aile réconciliatrice à prendre le dessus. Près de 70 hommes armés ont alors rejoint la concorde civile et ont réintégré la vie civile, sans effusion de sang et ce, malgré le refus opposé par leur chef, Ahmed Djabri, resté seul au maquis et surnommé depuis lors, «l'émir sans émirat».