Le groupe salafiste algérien est devenu le parfait alibi pour se rapprocher de Washington. La bataille qui a opposé l'armée régulière libyenne des frontières à un groupe armé du Gspc n'est qu'une histoire inventée par Tripoli. C'est ce qu'affirme le mouvement de la rébellion tchadienne, le Mdjt, selon lequel aucune bataille n'a eu lieu : «La Libye dit avoir récupéré deux personnes à l'issue d'un combat à la frontière tchado-libyenne. C'est faux, ce sont deux personnes que nous avons remises aux autorités libyennes». Les deux personnes en question s'appellent Bilal et Mustapha alias Noureddine Griga, et ont été remis aux autorités libyennes le 25 juin 2004 à la frontière tchado-libyenne. Le communiqué du Mdjt dit que «ce transfert devait être suivi par la remise du reste du groupe, mais la Libye a refusé de transmettre ces individus au pays concerné. Ainsi les opérations ont été interrompues». Le Mdjt a également démenti toute «collaboration entre le Mdjt et le Gspc» et «l'existence d'une base islamiste au Tibesti», avancées par l'hebdomadaire français Le Journal du Dimanche (JDD), et s'est dit «fidèle à ses idéaux démocratiques et laïques». Les services libyens auraient découvert «une base d'opérations» du Gspc dans le Tibesti, «nouveau sanctuaire» d'Al Qaîda, le mouvement d'Oussama Ben Laden, selon l'hebdomadaire. Toujours selon le JDD, Le «Para» aurait été libéré par ses geôliers du Mdjt, les deux organisations faisant désormais cause commune contre l'armée tchadienne. Selon M.Radjab-Dazi, ces accusations sont une «manipulation» de Tripoli qui désire «se laver de ses péchés précédents» en matière de terrorisme, en prétendant désormais lutter contre celui-ci. Le Mdjt est traversé par plusieurs courants, et certains sont vraisemblablement pour l'option de la libération de Abderrezak Le «Para», afin de l'inclure dans le combat qu'ils mènent depuis 1998 contre le régime d'Idriss Déby. Depuis la mort de la figure emblématique et fondateur du Mdjt, Youssouf Togaïmi, en septembre 2002 (Tripoli est accusé d'avoir «précipité sa mort» dans un de ses hôpitaux où il était venu se faire soigner), le mouvement a subi de larges fissures et au moins trois groupes rivaux se disputent le leadership de la rébellion tchadienne. En fait, aussi bien au Tchad et en Libye qu'au Mali et au Niger, la manipulation du terrorisme est soudainement redevenue le cheval de bataille pour asseoir ses positions et le parfait alibi pour se rapprocher de Washington. Pour le moment, tout ce beau monde se sert d'un joker appelé Gspc, allié d'Al Qaîda et nouveau péril par excellence qui justifierait toutes les manipulations politiques et militaires. Le régime Déby discrédite le Mdjt à qui il trouve des «accointances avérées avec les salafistes algériens». Le Mdjt lui rend l'amabilité en fouillant son passé d'ancien opposant qui se faisait épauler par les islamistes soudanais. La Libye, championne du double jeu, se lance corps et âme dans la lutte antiterroriste, d'autant plus que le dernier dossier (assassinat lancé contre le roi saoudien) la replonge, de nouveau, dans la liste des pays pas très, très fréquentables. Le Mali et le Niger, chacun à sa manière, continuent à voir et à capturer des islamistes algériens, en bougeant peu, mais en regardant bien dans les yeux les experts américains qui leur promettent argent et aide militaire, dans le cadre du plan Pan-Sahel. Tripoli est même allé trouver dans le Tibesti tchadien un nouveau sanctuaire d'Al Qaîda. Toute cette agitation peut bénéficier à Abderezzak Le «Para» et à ses amis qui tentent le tout pour le tout pour le libérer. Si ce n'est déjà fait...