Pour la première fois, un diplomate est kidnappé en Irak où la situation générale ne cesse de se détériorer. Près d'un moins après le transfert du pouvoir au gouvernement intérimaire irakien, la situation reste marquée par la violence et singulièrement par la multiplication des rapts devenus la monnaie d'échange tant des groupes de «résistance» que du grand banditisme, qui tire profit de la désorganisation du pays depuis l'invasion et l'occupation par la coalition américano-britannique. Vendredi soir, c'est un diplomate égyptien qui a été kidnappé, allongeont la liste, déjà longue, des otages ballottés entre la terreur de leurs ravisseurs et la fermeté de leurs pays d'origine. C'est ainsi que deux otages bulgares ont été décapités la semaine dernière. Hier, il n'y avait aucune nouvelle du diplomate égyptien, Mohamed Mamdouh Helmi Qotb, numéro trois de la mission diplomatique égyptienne en Irak. Cet enlèvement a été revendiqué par un groupe se présentant sous le nom «Les Lions d'Allah» indiquant que c'est là une réponse à l'Egypte après son offre d'aide au gouvernement intérimaire. Le rapt de M.Qotb survient deux jours après celui de sept chauffeurs (trois Kenyans, trois Indiens et un Egyptien) enlevés par un groupe se faisant appeler «Le Drapeau noir» Qui sont ces groupes, d'où sortent-ils? Sont-ils affiliés au mouvement de la résistance à l'occupation, ou membres de la phalange dirigée par le terroriste jordanien Abou Moussa Al Zarqaoui, ou sont-ils tout simplement des groupes organisés du grand banditisme tirant profit du désordre ambiant et de la désagrégation de l'autorité centrale? En fait, cela peut être ces trois formes à la fois tant les uns réclament des rançons contre la libération des otages, -cela a été le cas récemment d'un jeune garçon libéré contre 100 millions de dollars- et les autres pour obtenir le départ de contingents étrangers, illustré par le retrait des soldats philippins, un mois avant le terme de leur mission en Irak. En vérité, le chaos s'est ainsi installé en Irak que ne démentent pas les efforts que fait le gouvernement intérimaire irakien pour obtenir l'aide et l'envoi de renforts militaires étrangers Ainsi, après le Premier ministre Iyad Allaoui, parti en pèlerinage à Amman et au Caire, en fin de semaine dernière, pour plaider la cause de l'Irak, c'est au tour de chef de la diplomatie du gouvernement intérimaire, Hoshayr Zebari, de solliciter de la Russie l'envoi de troupes en Irak si Moscou se dit disposé à aider Bagdad au plan technique et à celui de la reconstruction, «la Russie n'a pas le projet d'envoyer un contingent de paix en Irak» affirme le porte-parole du ministère russe des Affaires étrangères, Alexandre Iakovenko. Par ailleurs, sur ce même sujet, Moscou dément fermement la rumeur selon laquelle la Russie aurait donné son accord à Washington pour l'envoi de troupes russes en Irak. De fait, le gouvernement intérimaire dirigé par deux hommes proches des Etats-Unis, -le Premier ministre Iyad Allaoui et le président, Ghazi Ajil Al-Yaouar-, impuissant à mettre un terme à l'anarchie qui s'est emparée du pays, n'avait pas d'autre alternative que de se tourner vers ses voisins les incitant à aider l'Irak. Ainsi, lors d'une réunion des voisins de l'Irak organisée au Caire mardi dernier, Hoshayr Zebari est revenu à l'attaque appelant à une «coopération effective et pas seulement avec les mots» de la part de ses voisins, notamment pour empêcher, selon lui, l'infiltration de terroristes à partir de leur territoire, sans réellement s'engager d'une manière ou d'une autre, les participants à la réunion ont néanmoins admis «la nécessité de liquider les groupes armés terroristes opérant en Irak et dans la région et qui constituent un grand danger pour l'Irak et les pays voisins» Ces groupes opérant en Irak sont actuellement évalués au nombre d'une dizaine qui semblent opérer indépendamment les uns des autres en ordre dispersé et sans stratégie lisible de ce qu'ils veulent faire. Or, le gouvernement intérimaire n'a aucun moyen de venir à bout de l'insécurité et du chaos instauré en Irak, aussi, son dilemme est celui de savoir comment garder un semblant de libre arbitre, tout en ayant recours à une aide massive de l'étranger? En réalité, le seul fait patent en Irak, c'est l'installation de la violence avec dans son sillage l'anarchie induite par l'émergence de groupes terroristes incontrôlables.