Des heurts qui n'augurent rien de bon Touggourt, Ali Mendjeli et El Harrach ont été le théâtre de terribles affrontements qui relancent le débat sur la violence en Algérie. Il est temps de passer à une thérapie de choc. La violence frappe de nouveau! Touggourt, Ali Mendjeli et El Harrach. Ces trois villes de trois régions différentes de l'Algérie ont été le théâtre de terribles affrontements ces dernières 24 heures. Le sang a même coulé à Touggourt dans la wilaya de Ouargla. En effet, vendredi soir dans cette ville du sud du pays, deux personnes sont mortes et une vingtaine d'autres ont été blessées lors de violentes émeutes. Ces incidents se sont produits à la suite de protestations d'habitants du quartier de Ras El Baroud, dans la commune de Nezla, contre le retard dans l'attribution de lots de terrains, de construction et le raccordement à l'eau potable. Les jeunes de la localité tenaient un sit-in depuis deux jours. Ils ont fermé la Route nationale 3 reliant Hassi Messaoud à Ouargla. «La police est intervenue vendredi pour les disperser. Elle a arrêté 14 jeunes», rapportent des sources locales. Comme dans un film western, les manifestants ont pris d'assaut le commissariat où ils étaient détenus, pour les libérer. «Quelque 700 manifestants ont attaqué le commissariat avec des cocktails Molotov», révèlent des sources sécuritaires. C'est à la suite de cette bataille d'une autre époque que les deux victimes sont tombées. A Bouira, des dizaines de jeunes de la ville d'El-Asnam (est de Bouira) ont fermé hier la Route nationale N° 5 pour réclamer l'aménagement de la cité du 1er-Novembre, située au centre de la ville. Les protestataires ont procédé à la fermeture de la voie à l'aide de barricades et de pneus enflammés, perturbant ainsi sérieusement la circulation automobile pendant près de deux heures. La nouvelle ville de Ali Mendjeli à Constantine a, elle aussi, renoué avec les affres de la violence. Les ex-résidents du bidonville de Fedj Errih et ceux de Oued El Had, qui ont été relogés à l'UV14, se sont affrontés en bandes rivales. Les «combats» ont vu l'incendie de quatre véhicules, un balcon d'appartement enflammé par un cocktail Molotov, de grosses pierres lancées de part et d'autre des camps des belligérants et des courses poursuites entre des groupes armés d'épées et de couteaux. Le CEM du quartier n'a pas été épargné. Il a été saccagé par des vandales. Une ambiance apocalyptique a régné dans cette nouvelle ville de Constantine. Tout comme à El Harrach où, encore une fois, un match de football a tourné au drame. La rencontre entre l'équipe locale de l'USM El Harrach et le MC Alger. Les matchs entre ces deux clubs rivaux de la capitale sont toujours à haut risque! Ce derby n'a pas dérogé à la règle. Dès la fin de la rencontre, les deux galeries ont encore une fois réglé leurs vieux comptes. El Harrach et ses environs étaient un terrain miné! Une véritable arène où s'affrontaient des «supporters» en furie. Les routes ont été bloquées. Des feux ont été allumés. Les palmiers qui surplombent la route brûlés. Des pierres fusaient de part et d'autre. Les trains, métro et tramway ont été arrêtés. D'ailleurs, des feux ont même été allumés sur les rails du «tram». De véritables images de guerre étaient visibles à la sortie de ce match de football. Bref, la violence prend de plus en plus d'ampleur. Au point de se banaliser. Une vidéo qui a fait le «buzz» sur la Toile résume parfaitement la banalisation de cette violence dans notre société. Cette vidéo «barbare», qui a choqué toute l'Algérie, montre un homme, visiblement le père ou l'oncle, «expliquer» à un enfant «comment devenir un homme». Il provoque délibérément le garçonnet, qui ne dépasse pas les trois ans, avec un couteau en lui demandant s'il est une femme. Le pire dans cette histoire est que le petit gamin apeuré a lui aussi son propre couteau. Après s'être sauvé, il le sort pour se «défendre» et il montre, comme le souhaite son bourreau, qu'il est un homme. Ce qui rend l'adulte «fier et heureux» de cet apprentissage. L'apprentissage de la violence commence-t-il au berceau dans cette Algérie de 2014?... Où va t-on comme ça? Ce n'est pas normal d'attaquer un commissariat de police pour libérer des émeutiers. On s'attaque directement à l'intégrité de l'Etat. La ligne rouge a été malheureusement dépassée et cela a coûté la vie à deux personnes. On n'est plus devant un simple cas de violence, mais devant une agression pure et simple de l'institution qui doit défendre la sécurité des citoyens et leurs biens. Cela ne peut plus continuer! Les Algériens n'arrivent plus à vivre entre eux en paix. A l'image de ce qui s'est passé à Ali Mendjeli, les nouveaux quartiers et les nouvelles villes du pays connaissent des affrontements entre leurs occupants. La raison: ils viennent de quartiers différents. C'est donc la guerre quotidienne pour marquer son territoire. En fait, les raisons sont simples et diverses pour recourir à la violence en Algérie. Un simple regard, un petit mot déplacé...et c'est la guerre! Le football, lui, est depuis longtemps livré à la violence. Les incidents du match USMH-MCA ne sont que le reflet de ce qui se passe quotidiennement dans nos «arènes de gladiateurs». Les supporters les ont désertés laissant place à des jeunes en furie qui profitent du week-end footbalistique pour exprimer brutalement leur mal-être. Ce n'est plus du sport, mais des combats à ciel ouvert où tous les coups sont permis! On n'aura finalement pas tiré les leçons de la mort du joueur camerounais de la JS Kabylie, Albert Ebossé. L'Etat a essayé de changer les choses en prenant quelques mesures contre la violence, notamment avec la campagne lancée par le ministère de la Communication, «Lahna binatna» (la paix entre nous). Néanmoins, cet énième week-end de violence montre que «Lahna» est loin d'être «binatna». La ligne rouge a été franchie! On n'en est plus à la sensibilisation. Il est temps de passer à une thérapie de choc pour mettre fin à ce fléau...